Si de précédentes recherches ont suggéré qu’un grand nombre de personnes âgées, atteintes de troubles cognitifs, n’arrêtaient pas obligatoirement la conduite automobile, cette étude, plus subtile, menée à de l'Université de Washington, identifie un léger déclin cognitif juste avant l’arrêt spontané de la conduite automobile chez la majorité des personnes âgées. Un petit signal d’alarme, documenté dans la revue Neurology, qui pourrait aider, via quelques tests cognitifs simples, les conducteurs âgés à prendre les bonnes décisions.
L’une des décisions les plus épineuses auxquelles sont confrontées les personnes âgées est de savoir quand renoncer à la conduite automobile. Car la conduite participe aussi au maintien des capacité cognitives et contribue à l’autonomie de la personne âgée.
Cette nouvelle recherche pourrait aider les personnes âgées à mieux planifier cet arrêt. Les chercheurs de Saint Louis ont découvert que l’altération des fonctions cognitives préfigure la décision de nombreuses personnes âgées d’arrêter de conduire. Et cette altération pèse plus encore dans leur décision, que l’âge ou les signes moléculaires de la maladie d’Alzheimer.
Même de très légers changements cognitifs sont le signe que l’arrêt de la conduite automobile est imminent.
L’un des auteurs principaux, le Dr Ganesh M. Babulal, professeur agrégé de neurologie, note que « de nombreux conducteurs âgés sont conscients des changements qui se produisent avec l'âge, y compris de leur déclin cognitif subjectif ». L’auteur engage donc « les médecins à discuter de ces changements avec leurs patients plus âgés. Si le risque est identifié tôt, il reste plus de temps pour soutenir les capacités et les compétences restantes, en prolongeant le temps de conduite en toute sécurité, et pour planifier une transition vers des options de transport alternatives » -afin de préserver aussi la mobilité.
Avec l’âge, le risque d’accident :
les adultes de plus de 65 ans sont les conducteurs les plus prudents sur la route.
Ils sont moins susceptibles d’excès de vitesse ou de conduite sous l’influence de substances. Cependant, les changements liés à l'âge, tels qu'un temps de réaction plus lent, la perte de vision et d’audition, et le déclin cognitif, les exposent à un risque d'accident plus élevé. Lorsque de tels accidents se produisent, leur risque de décès est également plus élevé. Dans le même temps, renoncer à conduire n’est pas non plus sans risques : les personnes qui arrêtent de conduire sont plus susceptibles de dépression, de solitude et d’isolement.
La déficience cognitive, le meilleur prédicteur de l’arrêt de conduite. Telle que mesurée par un score supérieur à zéro sur l’échelle Clinical Dementia Rating (CDR), 0 indiquant une fonction cognitive normale, 3 indiquant une démence sévère, la déficience cognitive est, selon ces chercheurs, un bon prédicteur de la décision d’arrêter de conduire. Avec une précision importante, de précédentes recherches ont montré que les capacités cognitives d’une personne peuvent se détériorer des années avant que le score CDR n’indique un problème….
L’étude prend donc en compte même des changements cognitifs subtils, dans la décision de « quitter » le volant et a suivi, pendant près de 6 ans, 283 personnes âgées en moyenne de 72 ans, qui conduisaient au moins une fois par semaine, exemptes de trouble cognitif l’inclusion. Les participants ont passé des tests cognitifs au début puis chaque année, des scintigraphies cérébrales et une analyse de liquide céphalo-rachidien au début de l’étude, puis tous les 2 à 3 ans.
- Au cours de l’étude, 24 participants ont arrêté de conduire,
- 15 participants sont décédés,
- 46 ont développé des troubles cognitifs -mesurés par un score CDR supérieur à 0.
L'analyse révèle 3 facteurs prédictifs de l’arrêt de la conduite automobile :
- les troubles cognitifs,
- l'aggravation des marqueurs prédictifs d’Alzheimer,
- le fait d'être une femme.
- Les participants avec un score de 0,5 ou plus au CDR sont alors 3,5 fois plus susceptibles d'arrêter de conduire ;
- l'effet le plus important est observé avec le facteur sexe, les femmes étant 4 fois plus susceptibles que les hommes d'arrêter de conduire au cours du suivi.
Les médecins ne conseillent pas systématiquement les patients âgés sur l'abandon de la conduite automobile, cependant ces résultats suggèrent qu’avec quelques tests cognitifs de routine simples, en détectant le déclin le plus précoce et le plus subtil, ils pourraient aider les personnes âgées à prendre une décision mieux éclairée et mieux planifiée concernant la conduite automobile.
Source: Neurology 22 May, 2024 DOI: 10.1212/WNL.0000000000209426 Predicting Driving Cessation Among Cognitively Normal Older Drivers.
Lire aussi : TROUBLES COGNITIFS : Ils n’arrêtent pas pour autant la conduite automobile
Laisser un commentaire