Chez les personnes souffrant de psychose, 2 systèmes cérébraux clés fonctionnent mal : le « filtre » qui concentre l’attention vers les événements externes importants et le système « prédicteur » qui anticipe la récompense. 2 systèmes cérébraux clés au cœur de la psychose, qui laisse une « porte ouverte » aux délires et aux hallucinations. Ces mécanismes sous-jacents, mieux décryptés par cette équipe de psychiatres de la Stanford Medicine, viennent confirmer une théorie déjà suggérée sur la manière dont se produit cette rupture avec la réalité.
Car la recherche explique comment le dysfonctionnement de ces 2 systèmes rend difficile l’appréhension ou la connaissance de la réalité et peut entraîner les hallucinations et les délires, caractéristiques de la psychose. Pendant la psychose, les patients éprouvent des hallucinations, entendent des voix ou développent des croyances délirantes. La psychose peut survenir d’elle-même mais peut être aussi une caractéristique de certaines maladies mentales graves, notamment du trouble bipolaire et de la schizophrénie. La schizophrénie se caractérise également par un retrait social, une pensée et un discours désorganisés ainsi qu’une réduction de l’énergie et de la motivation.
Une toute nouvelle compréhension de la progression de la schizophrénie,
est apportée par cette nouvelle recherche, souligne l’un des auteurs principaux, le Dr Kaustubh Supekar, professeur agrégé de psychiatrie et de sciences du comportement. On ignore comment la schizophrénie commence dans le cerveau. Cette maladie apparaît généralement chez les adolescents ou les jeunes adultes, et la plupart des patients commencent rapidement à prendre des médicaments antipsychotiques pour soulager leurs symptômes. Et lorsque les chercheurs analysent les scintigraphies cérébrales de ces patients atteints de schizophrénie, ils sont dans l’incapacité de distinguer les effets de la maladie de ceux des médicaments. De plus, on ignore comment la schizophrénie modifie le cerveau au fur et à mesure de sa progression.
L’étude analyse les données d’imagerie cérébrale de 101 patients, enfants, adolescents et jeunes adultes atteints de psychose et présentant une maladie génétique rare appelée syndrome de délétion 22q11.2. Au syndrome de délétion 22q11.2 est associé un risque de 30 % de psychose, de schizophrénie ou des deux maladies. A titre de base de comparaison, les scientifiques ont utilisé les scintigraphies cérébrales de plusieurs groupes sans syndrome de délétion 22q11.2 : 120 personnes atteintes de psychose idiopathique précoce, 101 personnes atteintes d’autisme, 123 personnes atteintes d’un trouble de déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH) et 411 témoins en bonne santé. L’analyse révèle que :
- la fonction cérébrale des patients 22q11.2 atteints de psychose est similaire à celle des personnes atteintes de psychose d’origine inconnue ;
- les schémas cérébraux correspondent aux symptômes de psychose déjà référencés et documentés ;
cependant, ces modèles cérébraux soutiennent le dysfonctionnement de 2 systèmes de contrôle cognitif dans la psychose :
- les pensées qui ne sont pas liées à la réalité peuvent capter les réseaux de contrôle cognitif du cerveau ; ce processus fait dérailler la fonction « normale » de contrôle cognitif, permet aux pensées intrusives de prendre le dessus, ce qui aboutit aux symptômes bien connus de la psychose ;
- ainsi, le système de filtrage cognitif du cerveau ou réseau de saillance qui oriente, normalement, et sélectivement notre attention sur les pensées internes et les événements externes importants, rejette les pensées irrationnelles et les événements anodins et nous permet de nous concentrer sur ce qui est réel et significatif, est dysfonctionnel ; l’insula antérieure un élément clé du réseau de saillance ou « filtre » présente ainsi une activité anormale ;
- idem pour le striatum ventral, une petite région du cerveau, et les voies cérébrales associées pilotées par la dopamine, qui jouent un rôle clé dans la prédiction de ce qui sera gratifiant ou important présente également ;
- au niveau neuronal, les caractéristiques différenciant les individus atteints de psychose dans le syndrome de délétion 22q11.2 reflètent les voies déjà identifiées dans la schizophrénie.
Détecter la psychose ? Les scientifiques documentent également un modèle algorithmique permettant de distinguer les scanners cérébraux des patients atteints du syndrome de délétion 22q11.2 de ceux qui en sont exempts. Le modèle prédit le syndrome avec une précision supérieure à 94 %.
Mieux traiter la psychose ? En plus d’apporter une nouvelle compréhension des mécanismes en jeu dans le développement et la progression de psychose, ces observations ont des implications pour la prévention et le traitement. « L’un de nos objectifs est de prévenir ou de retarder le développement de la schizophrénie ».
Ces découvertes concordent avec de précédentes recherches de notre équipe sur les centres cérébraux qui contribuent au développement de la schizophrénie ». Les chercheurs prévoient d’utiliser des traitements existants, tels que la stimulation magnétique transcrânienne ou les ultrasons focalisés, ciblés sur ces centres cérébraux chez les jeunes à risque de psychose, comme ceux atteints du syndrome de délétion 22q11.2 ou chez les deux parents atteints de schizophrénie, pour regarder si ces traitements peuvent prévenir ou retarder l’apparition de la maladie, voire atténuer ses symptômes.
Source: Molecular Psychiatry 12 April, 2024 DOI : 10.1038/s41380-024-02495-8 Robust and replicable functional brain signatures of 22q11.2 deletion syndrome and associated psychosis: a deep neural network-based multi-cohort study
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