Les changements rapides des niveaux de dopamine pourraient littéralement guider les comportements humains, révèlent cette recherche d’une équipe de l’Université Wake Forest (Caroline du Nord) qui a suivi ces niveaux, chez des participants sous stimulation cérébrale profonde et jouant à un jeu vidéo. L’étude, publiée dans la revue Science Advances, permet de mieux cerner le rôle bien plus large de la dopamine dans le cerveau humain lors d’expériences positives et négatives, et et finalement son implication dans la prise de décision et l’adaptation du comportement humain. Au-delà d’être l’hormone du plaisir, la dopamine joue aussi son rôle en cas d’expérience négative et permet l’apprentissage par le retour d’expérience.
La dopamine est un neurotransmetteur produit dans le cerveau qui sert de messager chimique, facilitant la communication entre les cellules nerveuses du cerveau et du corps. L’hormone est impliquée dans de nombreuses fonctions telles que le mouvement, la cognition et l’apprentissage. Si la dopamine connue sous le nom « d’hormone du plaisir » est surtout documentée pour son association avec les émotions positives, elle joue également un rôle en cas d’expériences négatives.
Impliquée dans l’apprentissage par l’expérience
La recherche montre que la libération de dopamine dans le cerveau humain joue un rôle crucial dans le codage des erreurs de prédiction des récompenses et des sanctions. En d’autres termes, la dopamine est également impliquée dans le processus d’apprentissage des expériences négatives -comme positives-, et elle permet au cerveau d’ajuster et d’adapter son comportement en fonction des résultats des expériences, y compris des expériences négatives.
« Il s’agit de la première étude chez l’Homme à examiner comment la dopamine code les récompenses et les sanctions et comment la dopamine délivre un signal « d’enseignement » ou de retour d’expérience, un type de rétroaction utilisé dans la recherche sur l’intelligence artificielle la plus avancée », explique l’un des auteurs principaux, le Dr Kenneth T. Kishida, professeur agrégé de physiologie, de pharmacologie et de neurochirurgie à l’Université de Wake Forest.
L’étude utilise une technique électrochimique, la voltammétrie, associée à l’apprentissage automatique, pour détecter et mesurer les niveaux de dopamine en temps réel soit à raison de 10 mesures par seconde. Cependant, cette analyse ne peut être réalisée que lors de procédures invasives telles que la chirurgie cérébrale par stimulation cérébrale profonde, une thérapie maintenant couramment utilisé pour traiter certaines maladies neurologiques, dont la maladie de Parkinson, les tremblements essentiels, le trouble obsessionnel-compulsif et l’épilepsie. Une microélectrode en fibre de carbone était ainsi profondément implantée dans le cerveau des 3 participants- qui devaient recevoir une stimulation cérébrale profonde pour traiter des tremblements essentiels. Une fois les participants réveillés, ils ont été invités à jouer à un simple jeu informatique et les mesures des niveaux de dopamine ont été relevées dans le striatum, une région du cerveau impliquée dans la cognition, la prise de décision et la coordination des mouvements. Au cours du jeu, les choix des participants étaient soit récompensés, soit sanctionnés par des gains ou des pertes monétaires réels. Le jeu était divisé en trois étapes au cours desquelles les participants recevaient des commentaires positifs ou négatifs sur leurs choix passés, de manière à pouvoir ensuite optimiser leurs chances de gains et réduire leurs pertes. Les niveaux de dopamine ont été mesurés en continu, toutes les 100 millisecondes, tout au long de chacune des 3 étapes du jeu. L’expérience révèle que :
- la dopamine joue non seulement un rôle dans la signalisation des expériences positives et négatives dans le cerveau ;
- elle le fait de manière optimale pour apprendre de ces résultats ;
- il existe des voies indépendantes dans le cerveau qui engagent séparément le système dopaminergique pour les expériences gratifiantes ou les expériences négatives ;
- ces 2 voies codent ces des expériences positives et négatives sur des échelles de temps légèrement décalées, séparées de seulement 200 à 400 millisecondes ;
- enfin, la signalisation dopaminergique est très probablement modifiée dans les troubles psychiatriques et neurologiques, ajoutent les chercheurs.
Ainsi, la dopamine n’est pas seulement le neurotransmetteur du plaisir,
c’est aussi le neurotransmetteur de toutes nos expériences, positives et négatives,
qui nous permet d’apprendre et d’adapter nos comportements en conséquence.
« C’est le transmetteur clé d’un système sophistiqué qui éduque notre cerveau et guide notre comportement ».
Source: Science Advances 1 Dec, 2023 DOI : 10.1126/sciadv.adi4927 Subsecond fluctuations in extracellular dopamine encode reward and punishment prediction errors in humans
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