Des sutures de nouvelle génération, intelligentes car capables de détecter une infection, de surveiller la fermeture de la plaie et son épithélialisation, et de véhiculer et de libérer des médicaments ? C’est l’objectif de nombreuses équipes de recherche expertes en chirurgie et en cicatrisation, qui travaillent, depuis des dizaines d’années à des matériaux et des dispositifs toujours plus performants, avec un objectif, permettre une cicatrisation plus durable. Ainsi, cette équipe de bioingénieurs qui vient de concevoir une suture durable, qui reproduit la structure des tendons et exploite en l’accélérant le processus naturel de cicatrisation tout en évitant le risque d’effets « indésirables ».
Les sutures conventionnelles constituent depuis des siècles un moyen de refermer les plaies, en particulier chirurgicales, jusqu’à l’aboutissement du processus de cicatrisation, soit une fermeture de la plaie sans « cicatrice » ou sans fibrose. Cependant, « les sutures actuelles sont loin d’être idéales pour la réparation des tissus », écrivent les chercheurs . La rugosité de la fibre utilisée peut endommager des tissus déjà fragiles, ce qui peut entraîner des complications post-chirurgicales. Une grande partie du problème réside dans l’inadéquation entre les tissus mous à suturer et les sutures rigides qui blessent les tissus en contact, à l’inverse de l’objectif poursuivi.
Des matériaux durables inspirés de la nature : Les sutures de nouvelle génération contiennent une enveloppe de gel glissante mais résistante, qui imite la structure des tissus conjonctifs mous. En testant ces sutures dites « TGS » (tough gel sheathed), les scientifiques montrent que la surface avec gel, qui évite ainsi la friction, atténue considérablement les dommages aux tissus, causés par les sutures traditionnelles.
Des scientifiques s’inspirent également « de la nature» pour développer de nouvelles technologies qui reproduisent la mécanique des tendons ou les propriétés des tissus humains : « Notre conception est inspirée du corps humain et de la gaine d’endoténon, composée de tissu conjonctif lâche, à la fois résistant et solide en raison de sa structure. La gaine d’endoténon lie les fibres de collagène entre elles et son réseau d’élastine le renforce», écrit l’une des équipes de recherche. La gaine d’endoténon forme non seulement une surface glissante pour réduire le frottement avec les tissus environnants mais elle fournit également les matériaux nécessaires à la réparation des tissus. Ces sutures « TGS » exploitent non seulement ces propriétés mais peuvent même être personnalisées en fonction des besoins du patient et des caractéristiques de la plaie.
D’autres équipes encore s’inspirent du gecko ou de la limace…
Un risque d’infection réduit, une surveillance post-opératoire simplifiée : d’autres sutures qualifiées « d’antimicrobiennes » et qui en pratique, brillent sous imagerie médicale, ouvrent également de nouvelles possibilités, notamment pour la pose d’implants en maille et les points de suture internes. Ces nouvelles propriétés répondent au risque d’infection du site opératoire (ISO), l’une des infections associées aux soins (IAS) les plus courantes et survenant chez 2 à 4 % des patients après la chirurgie. Ces nouvelles sutures chirurgicales intelligentes permettent la prévention de ces infections et une meilleure surveillance du rétablissement des patients, donc une cicatrisation et une récupération plus durables.
Ces dispositifs sont biocompatibles et biodégradables : ces nouvelles sutures peuvent être adaptées pour créer des points biodégradables ou pour être adhésifs d’un seul côté, si nécessaire. Bref, conçus grâce à la collaboration d’experts pluridisciplinaires, en nano-ingénierie, en biomédecine et en bioingénierie notamment, de chirurgiens, de techniciens d’imagerie et de pharmacologues, ces nouveaux dispositifs sont plus durables car ils permettent d’offrir au patient une meilleure qualité et sécurité des soins à long terme
Une gestion avancée et personnalisée des plaies : ces matériaux et ces dispositifs s’adaptent progressivement à l’administration de médicaments, pour prévenir les infections, surveiller la plaie ou relancer le processus de cicatrisation.
Les sutures et les pansements se font ainsi plus naturels, mais plus intelligents, avec une capacité de surveiller les plaies localement et d’ajuster la stratégie de traitement, pour une meilleure cicatrisation, de précision et plus durable.
Sources :
- Science Advances 07 Apr 2021 DOI : 10.1126/sciadv.abc3012 Bioinspired tough gel sheath for robust and versatile surface functionalization
- OpenNano Jan, 2023 DOI: 10.1016/j.onano.2022.100120 Smart suture with iodine contrasting nanoparticles for computed tomography
- Nature 30 October 2019 DOI: 10.1038/s41586-019-1710-5 Dry double-sided tape for adhesion of wet tissues and devices
- Journal of Control Release 1985 Surface, interfacial and molecular aspects of polymer bioadhesion on soft tissues
- The Lancet 25 January 1975 DOI : 10.1016/S0140-6736(75)91360-4 Surgical and economic advantages of polyglycolic-acid suture material in skin closure
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