Cette équipe du Max Planck Institute of Molecular Cell Biology and Genetics (MPI-CBG, Dresde) révèle ici comment 4 gènes connus pour contrôler la couleur des yeux, sont tout aussi essentiels à la santé du tissu rétinien. Ces travaux expérimentaux, publiés dans la revue PLoS Genetics, associent ainsi pour la première fois la couleur des yeux et la santé rétinienne.
La recherche est menée sur Drosophila melanogaster, une mouche certes, mais qui peut avoir des yeux de différentes couleurs, dont des teintes « anormales » liées, justement, à des mutations dans les gènes impliqués dans une voie métabolique spécifique qui régule la formation de pigments.
Les voies métaboliques sont en fait des « cascades » de réactions biochimiques dans les cellules qui convertissent un composant de départ en d’autres composés. Il est de plus en plus évident que les voies métaboliques associées à des facteurs de stress externes influencent la santé des cellules et des tissus. De nombreuses maladies humaines, y compris les maladies rétiniennes ou neurodégénératives, sont associées à des déséquilibres dans certaines voies métaboliques.
Pigmentation et santé rétinienne partagent une même voie
L’étude : l’équipe de l’Institut Max Planck s’est attachée à l’étude d’une de ces voies métaboliques dans le maintien de la santé rétinienne dans des conditions de stress, et en particulier des gènes caractérisés -depuis des années- comme impliqués dans la pigmentation de la couleur des yeux, en particulier la formation des pigments.
La voie de la kynurénine : ces gènes codent pour des composants de la voie de la kynurénine, dont l’activité convertit, au cours de plusieurs étapes, l’acide aminé tryptophane en d’autres produits. Les chercheurs confirment ici la fonction clé de cette voie métabolique dans la santé rétinienne, indépendamment de son rôle dans la formation des pigments. Réalisés à l’aide d’une combinaison de techniques génétiques et d’analyse biochimique des métabolites pour étudier différentes mutations chez la mouche des fruits, Drosophila melanogaster, ces travaux révèlent que :
- il s’agit d’une voie métabolique évolutive conservée qui régule une variété de processus biologiques ;
- sa perturbation peut entraîner l’accumulation de biomolécules ou de métabolites toxiques ou protecteurs, qui peuvent aggraver ou améliorer, respectivement, la santé du cerveau et la santé -interdépendante- de la rétine ;
- 4 gènes « cinabre, cardinal, blanc et écarlate » nommés selon les couleurs anormales des yeux suite à leur perte chez les mouches, intervenant dans la voie de la kynurénine, apparaissent réguler la santé rétinienne indépendamment de leur rôle dans la formation des pigments ;
- différents niveaux de métabolites sont liés à l’état de santé de la rétine : un métabolite, la 3-hydroxykynurénine (3OH-K), endommage la rétine. L’équilibre entre un métabolite 3OH-K toxique et d’autres métabolites protecteurs, tels que l’acide kynurénique (KYNA) apparaît déterminer le degré de dégénérescence de la rétine ;
- lorsque les chercheurs « donnent » 2 de ces métabolites à des mouches normales (non mutantes) 3OH-K augmente les dommages rétiniens induits par le stress, tandis que KYNA protége la rétine des dommages liés au stress ;
- en ciblant ces 4 gènes et donc 4 étapes distinctes dans la voie, l’étude révèle que non seulement l’accumulation de 3OH-, mais aussi sa localisation dans la cellule et donc sa disponibilité dans d’autres réactions, sont impliquées dans la santé rétinienne.
Améliorer la santé rétinienne semble donc possible, par la modification du rapport des métabolites de la voie de la kynurénine.
En résumé, ces travaux expérimentaux montrent que la voie de la kynurénine est importante non seulement dans la formation des pigments et de la couleur des yeux, mais aussi dans le maintien de la santé rétinienne.
Avec, à plus long terme, l’espoir de stratégies thérapeutiques des maladies oculaires et des différentes affections neurodégénératives., caractérisées par un dysfonctionnement de la voie de la kynurénine.
Source : PLoS Genetics 23 March, 2023 DOI : 10.1371/journal.pgen.1010644 Modulating the Kynurenine pathway or sequestering toxic 3-hydroxykynurenine protects the retina from light induced damage in Drosophila
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