Subir des privations dans l'enfance est lié à l’impulsivité à l'âge adulte conclut cette équipe de pédiatres et de psychiatres de l’Université d'Aston (UK). Des conséquences, documentées dans la revue Royal Society Open Science, qui peuvent rejoindre, sous certains aspects, celles de la négligence et de la maltraitance ou toute autre exposition négative à l'enfance de nature à déclencher un besoin de compensation.
Les chercheurs identifient également un lien entre la privation à l'enfance et des dépendances plus tard dans la vie. Cependant, c’est surtout une forme « caractéristique » d’impulsivité qui se traduit par une préférence marquée et incontrôlable pour la gratification immédiate qui ressort de cette étude. En pratique cette impulsivité caractéristique à l’âge adulte se traduit par une augmentation des dépenses alimentaires, des aliments malsains et caloriques, entre autres formes de surconsommation -et de compensation.
De précédentes études avaient déjà suggéré, écrivent les auteurs dans leur communiqué, que les enfants ayant vécu dans la pauvreté et l'insécurité alimentaire ont tendance à avoir un indice de masse corporelle plus élevé à l'âge adulte.
L’étude, issue de plus de 6 années de suivi, identifie ainsi,
un autre lien entre l'impulsivité, l'obésité et les autres dépenses de la vie courante.
L’auteur principal, Richard Tunney, directeur et professeur à l'école de psychologie de l'Université d'Aston et son équipe ont suivi 146 enfants, âgés en moyenne de 8 ans, vivant dans certaines des zones les plus défavorisées d'Angleterre et ont comparés leurs données de comportement et de dépenses, avec celles d’enfants vivant dans des quartiers plus aisés. Les enfants avaient le choix entre ramener à la maison une petite somme d'argent (par exemple, 1 £) ou de recevoir 10 £ par semaine, voire plus un an plus tard. Le délai que chaque participant est capable d’attendre pour obtenir sa récompense permet, dans de telles études, d’évaluer un « taux d'actualisation » qui illustre à quel point le temps d'attente réduit la valeur de l'argent. Ainsi,
- une personne impulsive va préférer 1 £ immédiatement, plutôt que 10 £ dans 1, 6 mois ou 1 an,
- une personne moins impulsive sera disposée à attendre 6 mois pour recevoir 10 £, une personne encore moins impulsive, 1 an, pour recevoir 15 £.
- Le modèle conclut que les enfants vivant dans les zones les plus défavorisées ont « des taux d'actualisation » significativement plus élevés et que la privation à l’enfance motive cette forme d’impulsivité caractéristique.
« Cette préférence pour l’immédiateté est un trait de personnalité constant tout au long de la vie ».
Une récente étude de la même équipe, ayant également porté sur l'impulsivité chez plus de 1.000 adultes âgés de 50 à 90 ans, révèle que les adultes plus âgés vivant dans les zones les plus défavorisées montrent cette même préférence pour l’immédiateté. Cette impulsivité caractéristique se traduit même dans le choix de la profession, les adultes exposés à la privation optant plutôt pour des professions qui rapportent immédiatement, plutôt qu’à plus long terme.
Ensuite, cette impulsivité prédit fréquemment l'obésité.
Mais pas seulement, les personnes exposées aux privations dans leur enfance étant plus susceptibles de d’opter pour des choix malsains à plus long terme. Dont la consommation de substances, le tabagisme et le jeu.
« La privation est l'un des nombreux facteurs qui peuvent conduire à un comportement impulsif tout au long de la vie d'une personne. Ce facteur s’ajoute à la génétique qui joue également un rôle dans l'impulsivité ».
Source: Royal Society Open Science Oct, 2022 DOI: 10.1098/rsos.220102 Individual differences in decision-making: evidence for the scarcity hypothesis from the English Longitudinal Study of Ageing
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