Dans le cercle vicieux « obésité, troubles du sommeil et restriction alimentaire », il est difficile de distinguer la cause de la conséquence. Cependant, cet essai randomisé contribue à éclairer cette relation complexe, en montrant qu’une mauvaise qualité de sommeil est révélateur d’un régime alimentaire inadapté et annonciateur d’une reprise du poids. En d’autres termes, les troubles du sommeil sont un marqueur de régime alimentaire inadapté et un facteur d’échec de la tentative de perte de poids. L’étude, présentée lors de l’European Congress on Obesity (ECO) apporte un nouvel éclairage sur l’importance de la qualité de sommeil pour l’atteinte et le maintien d’un poids de santé.
La prévalence de l’obésité et celle des troubles du sommeil suivent une tendance à la hausse similaire, suggérant aussi ce lien entre ces deux fléaux modernes : plus d'un tiers des adultes des pays riches ne dorment pas suffisamment (6 ou 7 heures par nuit), en raison de différents facteurs de mode de vie dont le stress, le temps d’écran, les dispositifs intelligents et l’absence de frontière entre vie personnelle et professionnelle.
Le sommeil, un révélateur de la qualité du régime alimentaire
De nombreuses études ont documenté le lien entre un sommeil de mauvaise qualité ou insuffisant et les risques d'hypertension artérielle, d'hypercholestérolémie et d'athérosclérose. Le manque de sommeil est lié à l'obésité, au diabète et à l'inflammation, tous des facteurs de maladies cardiovasculaires.
Enfin, il a été montré que dormir trop ou trop peu augmente le risque d'accident vasculaire cérébral (AVC), de crise cardiaque et de décès.
L’étude : il s’agit de l’analyse des données de l'essai randomisé contrôlé S-LiTE, mené auprès de 195 adultes, âgés de 18 à 65 ans et atteints d’obésité (IMC : 32 à 43 kg/m2) et ayant suivi un régime très restrictif (800 kcal/jour) pendant 8 semaines. Ces participants avaient perdu en moyenne 12 % de leur poids corporel. Les participants ont été assignés au hasard à un an de régime de maintien de la perte de poids avec soit une injection quotidienne de placebo (49 participants), une injection quotidienne de 3 mg de liraglutide, un médicament amaigrissant (49), 4 séances d'exercice par semaine ou une combinaison des deux traitements (49). La durée du sommeil a été mesurée à l'aide des données d'accéléromètres portés par les participants à l'étude avant et après le régime hypocalorique et après 13, 26 et 52 semaines de maintien du poids. La qualité du sommeil a été mesurée à l’aide du Pittsburgh Sleep Quality Index (PSQI) : des scores plus faibles indiquent une meilleure qualité de sommeil, allant de 0 pour le meilleur à 21 pour un sommeil de la plus mauvaise qualité. L’analyse révèle que :
- avec le régime hypocalorique de 8 semaines, la qualité et la durée du sommeil s'améliorent chez tous les participants ;
- après un an de maintien du poids, les participants des groupes d'exercice maintiennent une bonne qualité de sommeil,
- les participants ne pratiquant pas l’exercice perdent considérablement en qualité de sommeil ;
- le traitement au liraglutide ne semble entraîner aucun effet significatif sur la qualité ou la durée du sommeil ;
- les mauvais dormeurs (<6 heures par nuit) augmentent leur IMC de 1,3 kg/m2 pendant la phase de maintien du poids d'1 an vs les bon dormeurs (>6 heures par nuit) ;
- les mauvais dormeurs (score PSQI >5) au début de l'étude augmentent leur IMC de 1,2 kg/m2 pendant la phase de maintien du poids vs bons dormeurs (score PSQI <5).
Si l'étude est observationnelle et montre des associations et non des relations de cause à effet, le sommeil semble un marqueur intéressant du maintien et de la perte de poids. Il est possible que, dans l’autre sens, améliorer le sommeil chez les personnes obèses puisse permettre de limiter la reprise du poids.
Source: European Association for the Study of Obesity – European Congress on Obesity (ECO) 4 May, 2022 Poor sleep may undermine people’s attempts to keep weight off
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