Les capacités cognitives des patients victimes d’infarctus du myocarde déclinent plus rapidement dans les années qui suivent la crise cardiaque, relève cette étude de la Johns Hopkins University (Baltimore) présentée lors de la Conférence internationale sur l'AVC de l'American Stroke Association (ASA/AHA). Ces données, les premières à sensibiliser sur les conséquences cognitives possibles de l'infarctus, engagent à surveiller la santé cognitive des patients cardiaques et à prévenir les crises cardiaques pour ralentir le déclin cognitif. Ainsi, freiner la croissance de la prévalence des troubles cognitifs passe aussi par la prévention des maladies cardio et cérébrovasculaires.
Cette recherche préliminaire rappelle que « tout ce qui se passe dans le cœur et le cerveau est lié. Ainsi, la gestion des facteurs de risque cardiovasculaire est également bénéfique pour le cerveau », résume l’auteur principal, le Dr Michelle C. Johansen, professeur de neurologie cérébrovasculaire à la Johns Hopkins University.
La crise cardiaque attaque aussi le cerveau
L'étude est l'une des premières à examiner à la fois l'impact à court et à long terme d'un événement cardiaque soudain sur les capacités cognitives et mentales. Il s'agit d'une méta-analyse de 6 grandes études longitudinales, menées entre 1971 et 2017 (l’Atherosclerosis Risk in Communities Study; la Coronary Artery Risk Development in Young Adults Study; la Cardiovascular Health Study; la Framingham Offspring Study; la Multi-Ethnic Study of Atherosclerosis; la Northern Manhattan StudyAtherosclerosis Risk in Communities Study).
Au total, l’analyse a porté sur les données de 31.377 participants, âgés en moyenne de 60 ans au moment de la première évaluation cognitive. A l’inclusion, les participants étaient sans antécédent de crise cardiaque et sans diagnostic de démence. Les participants ayant subi un AVC durant le suivi ont été exclus (en raison de l’impact possible de l’AVC sur les performances cognituves). Enfin, les participants ont passé des tests cognitifs dans 3 domaines, la mémoire, le fonctionnement exécutif et la cognition globale. Les résultats ont été ajustés en fonction des facteurs de confusion (de déclin cognitif) possibles (facteurs sociodémographiques, facteurs de risque cardiaque et précédentes évaluations cognitives). La période de suivi médiane était de 6,4 ans. Durant le suivi, 1.047 participants ont eu une crise cardiaque.
Le déclin cognitif est une co,nséquence possible de la crise cardiaque
L’analyse constate que, par rapport aux participants n’ayant pas connu d'infarctus,
- les participants victimes de crise cardiaque ont présenté un déclin cognitif significativement plus rapide, en particulier au niveau de la mémoire, du fonctionnement exécutif et de la cognition globale dans les années qui ont suivi la crise ;
- alors que la démence est un processus lent et progressif, la crise cardiaque semble déclencher un déclin cognitif immédiat mais qui atteint « des proportions significatives plusieurs années plus tard », précisent les auteurs ;
«Il est important de savoir que le déclin cognitif est possible après une crise cardiaque et les médecins doivent gérer à la fois la maladie cardiaque des patients et rechercher simultanément des signes de démence ».
Quels mécanismes ? Il reste à mieux documenter l'association entre crise cardiaque et déclin cognitif avec d’autres recherches qui viseront à identifier les mécanismes impliqués. Mais d’ores et déjà les chercheurs évoquent plusieurs mécanismes dont :
- des dommages continus au cerveau dus à des AVC silencieux,
- les facteurs de risque communs de crise cardiaque et de démence (tabagisme et hypertension),
- ou encore, les effets de la crise cardiaque sur le risque de mini-caillots allant au cerveau et réduisant l'arrivée d’oxygène au cerveau.
Jusqu’à maintenant, les maladies cardiaques et les maladies cérébrales ont presque toujours été traitées comme 2 types de conditions distincts, alors qu’il existe bien une association entre la crise cardiaque et un déclin cognitif plus rapide. Avec des contextes de plus grande vulnérabilité, comme dans les régions du mondes qui n'ont pas accès aux médicaments contre l'hypertension et aux statines pour mieux contrôler la maladie cardiaque après l’infarctus.
« Un certain déclin cognitif fait partie du vieillissement normal cependant maintenant que nous savons qu’un certain nombre de facteurs de risque ont un impact sur la santé cardiaque et la santé cérébrale, un meilleur contrôle de ces facteurs de risque pourrait réduire simultanément la prévalence de démence et des maladies cardiaques ».
Source: American Stroke Association (ASA) International Stroke Conference 3 Feb, 2022 Cognitive skills declined faster in the years after a heart attack
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