« Nous sommes à court d'options », alerte cette équipe de biologistes et de pharmacologues de l’Université du Texas à Arlington (UTA) qui travaille à lutter contre ces infections bactériennes multirésistantes. Ces experts prédisent que sans intervention drastique, le problème de la résistance antimicrobienne pourrait devenir catastrophique et irréversible d'ici 2050, tuant près de 10 millions de personnes chaque année.
L’équipe du Dr Joseph Boll, professeur de biologie à l’UTA est soutenue dans ses recherches par les National Institutes of Health (NIH). Son objectif, identifier et inhiber les mécanismes de défense d’une bactérie spécifique, Acinetobacter baumannii, l’un des principaux responsables d’infections nosocomiales. A. baumannii peut provoquer des infections dans le sang, les voies urinaires et les poumons, ou dans les plaies. Ces infections généralement traitées par antibiotiques, sont, de plus en plus fréquemment résistantes aux médicaments, notamment aux carbapénèmes, une classe d'antibiotiques très efficaces généralement réservés aux infections bactériennes multirésistantes sévères.
Les bactéries résistantes aux médicaments ont poussé les médecins à utiliser des thérapies combinées, qui utilisent plusieurs médicaments pour traiter les infections bactériennes résistantes, mais même ces combinaisons deviennent de plus en plus inefficaces. « C'est devenu un jeu. Les chercheurs découvrent un nouvel antimicrobien, puis les bactéries y deviennent résistantes. Nous sommes à court d'options et la résistance bactérienne dépasse rapidement le développement de nouveaux antibiotiques ».
Décrypter les mécanismes de protection des bactéries
L’enveloppe cellulaire se fait bouclier : l’équipe a découvert que lorsque A. baumannii subit un stress, tel qu'une exposition à un traitement antibiotique, la bactérie modifie son enveloppe cellulaire pour pouvoir supporter l'antibiotique pendant de longues périodes. Ce type de modifications spécifiques permettent aux bactéries de survivre assez longtemps pour acquérir une véritable résistance aux antibiotiques, qui devient structurelle et peut conduire à l'échec du traitement antibiotique.
2 enzymes clés identifiées : l’acquisition de la résistance se produit dans les 24 heures suivant l'exposition aux antibiotiques. C’est pourquoi l’équipe travaille à identifier les adaptations dans l'enveloppe cellulaire qui permettent au pathogène de survivre en présence d'antibiotiques et à décrypter les mécanismes qui contribuent ensuite à l'acquisition d'une véritable résistance. 2 enzymes « LD-transpeptidases A » apparaissent jouer un rôle clé dans ce mécanisme d’acquisition de résistance, ces enzymes remodèlent l'enveloppe cellulaire de la bactérie, pour lui permettre de résister au stress.
Remonter jusqu’aux gènes qui codent pour ces enzymes de la LD-transpeptidase : les scientifiques ont trouvé le moyen d’isoler la partie de l'ADN qui contrôle ce mécanisme et de la « coller » à un gène différent dont la fonction est de faire bleuir la cellule bactérienne. Lorsque la cellule se trouve dans un environnement où elle souhaite modifier son enveloppe cellulaire pour se protéger, elle devient bleue et les chercheurs peuvent alors observer et dater toute la cascade d’événements. Ainsi, lorsque les scientifiques administrent à la bactérie des antibiotiques, ou l’exposent à des changements de température, de pH ou à des privations de nutriments, chacune de ces expositions induit une réponse bactérienne « qui les rapproche de la compréhension dont les modifications de l'enveloppe cellulaire maintiennent la cellule bactérienne intacte en cas de stress ».
L’objectif est d’identifier de nouvelles cibles à la surface cellulaire pour développer de nouveaux antimicrobiens capables d’enrayer la résistance aux antibiotiques (RAM) existants.
Source: mBio 2021 DOI: 10.1128/mBio.02185-20 Septal Class A Penicillin-Binding Protein Activity and ld-Transpeptidases Mediate Selection of Colistin-Resistant Lipooligosaccharaide-Deficient Acinetobacter baumannii
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