Seule une minorité de personnes souffrant de troubles liés à la consommation d’alcool suit un traitement et reçoit des médicaments, conclut cette étude observationnelle menée à l’Institut Karolinska, qui engage les professionnels à une meilleure détection de ces troubles et les patients à en discuter avec leur médecin traitant. Il existe aujourd’hui des médicaments qui contribuent à réduire ces troubles, mais dont les prescriptions apparaissent également inégalement réparties en fonction des différents groupes de population.
L’auteur principal, Sara Wallhed Finn, chercheur et psychologue au Département de santé publique du Karolinska Institutet résume les principales conclusions par « une grande sous-utilisation des médicaments contre l’alcool » ainsi que par « une offre de traitement inégale entre les différents groupes de la société ». Un constat préoccupant compte-tenu du fardeau sanitaire représenté par ces troubles à la fois pour l’individu et pour la société dans son ensemble.
Les taux de traitement sont particulièrement faibles chez les personnes atteintes de comorbidités
Quelles explications ? Les auteurs invoquent une trop faible connaissance des médicaments disponibles, à la fois en soins primaires et chez les patients, au-delà des traitements les plus prescrits (Disulfirame (Antabuse), Naltrexone, Acamprosate et Nalmefene (Selincro)). Certains patients s’orientent plus volontiers vers une thérapie psychologique. Enfin, certains antécédents ou comorbidités, comme une maladie du foie, rendent impossible la prise de certains types de médicaments.
« S’il existe une myriade d’explications possibles, nous devons mieux comprendre pourquoi ces médicaments approuvés et efficaces sont si peu utilisés dans un contexte de hausse continue de la consommation nocive d’alcool et de ses conséquences en termes de maladies et de décès ».
Les prescriptions des 4 médicaments contre l’alcool approuvés (Disulfirame, Naltrexone, Acamprosate et Nalmefene) aux personnes traitées pour un trouble de la consommation d’alcool ont été examinées chez 130.000 participants adultes diagnostiqués entre 2007 et 2015 avec un trouble lié à la consommation d’alcool. L’analyse révèle que :
- la proportion de patients ayant reçu une prescription est comprise entre 22 et 24% ;
- que ce taux global de prescription est stable tout au long de la période de suivi de 9 ans ;
- des différences de prescription sont identifiées entre différents groupes de population : ces médicaments sont prescrits dans une moindre mesure aux hommes, aux personnes âgées, aux personnes ayant un niveau d’études et de revenus inférieur, les personnes vivant dans des villes de taille moyenne ou des zones rurales et les personnes souffrant de comorbidités ;
ces données suggèrent, en particulier, que,
- l’accès aux soins dépend fortement du lieu de résidence, les services de soins spécialisés étant concentrés dans les grandes villes ;
- les taux de prescription sont particulièrement faibles pour les personnes atteintes d’autres maladies même lorsque la comorbidité ne constitue pas un obstacle à la prescription de médicaments contre l’alcool : les troubles de la consommation d’alcool semblent pris en charge « après » d’autres maladies chroniques.
Au total, seulement 2 à 2,5 % des personnes alcoolodépendantes seraient ainsi traitées.
Source: Drug and Alcohol Dependence Sept. 10, 2021 DOI: 10.1016/j.drugalcdep.2021.108964 Pharmacotherapy for alcohol use disorders – unequal provision across sociodemographic factors and co-morbid conditions. A cohort study of the total population in Sweden
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