La perturbation de l'autophagie, un mécanisme de dégradation et d'élimination du matériel cellulaire obsolète, pourrait être à l'origine de changements cognitifs précoces dans la maladie de Huntington. C’est pour ces neurologues de la Columbia University (New York) une cible prometteuse pour de nouvelles thérapies. Cette revue de la littérature, publiée dans le Journal of Huntington's Disease décrit en effet comment la fameuse protéine huntingtine mutante (mHtt) contribue au dysfonctionnement cognitif et à la mort cellulaire, en perturbant justement, l'autophagie synaptique.
La maladie de Huntington est une maladie neurodégénérative progressive causée par l’excès d'un certain type de séquences d'ARN répétées dans un gène – la huntingtine- présent dans chaque cellule. Ces séquences répétées – sous forme de petits ARN interférents (siRNAs)- attaquent les gènes essentiels à la survie de la cellule et notamment des cellules nerveuses dans le cerveau. La maladie est caractérisée par des symptômes moteurs, cognitifs et psychiatriques, et les symptômes moteurs étant souvent précédés de changements cognitifs. De récentes études ont suggéré que le mécanisme d’autophagie joue un rôle central dans le maintien synaptique, et la perturbation de l'autophagie peut être à l'origine de changements cognitifs précoces.
Mieux comprendre ces mécanismes pourrait permettre de développer de nouveaux traitements pour la maladie de Huntington et d’autres troubles neurodégénératifs.
L'autophagie permet la maintenance synaptique dans le cerveau sain
Ici, les experts newyorkais décrivent comment l'autophagie, le processus cellulaire responsable de l'élimination des fragments obsolètes ou endommagés de la cellule, joue un rôle essentiel en soutenant la maintenance synaptique dans le cerveau sain, et comment le dysfonctionnement de l'autophagie dans la maladie de Huntington compromet la maintenance synaptique et donc déclenche le développement précoce de la maladie. En interférant avec l'efficacité de l'autophagie, la protéine Huntingtine (mHtt) compromet la plasticité synaptique, provoquant à la fois un dysfonctionnement cognitif et une perte d'entrée synaptique normale vers les cellules post-synaptiques et une rétroaction vers les cellules présynaptiques.
La perte d'entrée et cette rétroaction synaptiques induit la mort cellulaire (Voir schéma).
Cette voie pathogénique jusqu'alors inexplorée va permettre d’identifier de nouvelles thérapies permettant de modifier le cours de la maladie, écrivent les chercheurs dans leur communiqué : « Comme de nombreuses maladies neurodégénératives affectant la cognition, comme la maladie d'Alzheimer par exemple, les données précliniques et cliniques indiquent que les synapses, la partie des cellules du cerveau responsable de la communication entre les cellules, sont affectées au tout début de la maladie », expliquent les auteurs, le Dr Hilary Grosso Jasutkar et Ai Yamamoto, PhD, des départements de neurologie et de pathologie et de biologie cellulaire de la Columbia University. « Nous avons longtemps pensé que l'autophagie jouait un rôle dans la physiopathologie de la maladie de Huntington, mais ce rôle restait mal compris. Des preuves récentes indiquent que :
l'autophagie peut être déterminante dans le maintien de la synapse.
L’autophagie, une nouvelle cible médicamenteuse pour traiter la maladie de Huntington dès ses débuts : dans cette revue de la littérature, les chercheurs discutent les preuves croissantes du rôle central de l'autophagie dans la maintenance synaptique et des effets de la perturbation de l'autophagie sur les changements cognitifs précoces caractéristiques de la maladie. Les auteurs rapportent ainsi des données pathologiques et d'imagerie chez des patients porteurs de mutations de la protéine Huntingtine (mHtt), ainsi que des données issues d’animaux modèles, qui suggèrent qu'un dysfonctionnement synaptique peut survenir très tôt dans la maladie, bien avant la mort cellulaire. Ces changements synaptiques se manifestent notamment par des altérations de la plasticité synaptique et donc par des troubles ou déficits cognitifs. Cette perturbation de la signalisation synaptique contribue en soi à la mort cellulaire dans la maladie.
Il reste à démontrer la relation causale directe entre le mutant Htt et le dysfonctionnement synaptique puis les troubles cognitifs caractéristiques de la maladie. Cependant, cette revue de la littérature apporte déjà de multiples indices semblant confirmer ce mécanisme. Si ce mécanisme était démontré, il est clair que des thérapies relançant l'autophagie synaptique pourraient protéger contre les déficiences cognitives précoces et même peut-être contre la neurodégénérescence.
A la fois dans la maladie de Huntington mais probablement dans de nombreuses maladies neurodégénératives.
Source: Journal of Huntington’s Disease 9 June 2021 DOI: 10.3233/JHD-200466 Do Changes in Synaptic Autophagy Underlie the Cognitive Impairments in Huntington’s Disease?
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