C’est un vrai changement de protocole de prise en charge des patients COVID-19 modérément malades, que préconisent ces chercheurs du Larner College of Medicine de l’Université du Vermont. Leur essai international « RAPID » vient de conclure à l’efficacité d'une dose complète d’anticoagulant héparine chez les patients COVID-19 hospitalisés modérément malades -et non chez les patients déjà en soins intensifs- à prévenir l’inflammation et la coagulation anormales dans les vaisseaux sanguins, deux caractéristiques prédictives des formes mortelles de la maladie. Ces données, publiées à ce stade sur le serveur de prépublication MedRxiv, donc non encore validées par les pairs, incitent à réflexion les cliniciens en charge des services COVID.
Car il est maintenant bien connu que dans la maladie COVID-19, une inflammation ou réponse immunitaire incontrôlée et une coagulation anormale dans les vaisseaux sanguins, en particulier dans les poumons, sont les premiers signes et facteurs d’une progression vers une forme sévère, des complications et le décès. L’analyse des résultats préliminaires de l’essai Rapid montre que l'administration d'une dose complète d'anticoagulant aux patients hospitalisés modérément malades pourrait stopper ce processus thrombo-inflammatoire délétère.
Vers un changement de pratique clinique ?
Avec des collègues du St. Michael's Hospital, l’équipe du Vermont teste donc ici les effets de l’administration d’une dose d’héparine sur le critère principal d’aggravation de la maladie, définie par le transfert en soins intensifs, la ventilation mécanique ou le décès à 28 jours. L’auteur principal, le Dr Mary Cushman, professeur de médecine à l'Université du Vermont a conduit cet essai international multicentrique randomisé ouvert RAPID (RAPID COVID COAG – RAPID Trial) pour évaluer les avantages de l'administration d'une dose thérapeutique complète d'héparine par rapport à une faible dose prophylactique aux patients modérément malades admis à l’hôpital avec COVID- 19. Les critères d'innocuité comprenaient l'absence de saignements majeurs. L’analyse montre que :
- L’aggravation intervient chez 16 % des patients (ici chez 37 des 228 patients participants) avec la dose complète d’héparine vs 22 % (52 des 237 participants) avec une faible dose d’héparine ;
- Ainsi l’administration d’une dose complète d’héparine, à ces patients hospitalisés pour COVID modéré réduit de 31% le risque d’aggravation (OR : 0,69), par rapport aux patients ne recevant qu’une faible dose ;
- l'héparine thérapeutique ne réduit pas statistiquement significativement l'incidence du critère composite ventilation mécanique ou admission en USI ou décès par rapport à l'héparine à faible dose, mais réduit en revanche significativement (et de 78%) les risques de décès toutes causes confondues.
D'autres preuves d'efficacité : l’équipe avait déjà présenté une méta-analyse des preuves disponibles, qui concluait déjà à l’intérêt de l'héparine pour prévenir l’aggravation chez les patients COVID-19 hospitalisés modérément malades. Un résultat positif qui n’était pas obtenu chez les patients gravement malades, déjà suivis en soins intensifs.
« Pris ensemble, ces résultats devraient entraîner un changement de pratique clinique pour les patients COVID, hospitalisés avec une forme modérée », concluent les auteurs.
Source: MedRxiv 12 July, 2021 DOI: 10.1101/2021.07.08.21259351 Heparin for Moderately Ill Patients with Covid-19
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