C’est l’étude la plus large jamais réalisée sur la charge virale associée à COVID-19, par groupe de population. L’équipe de Charité – Universitätsmedizin Berlin a ainsi évalué par PCR la charge de SARS-CoV-2 chez plus de 25.000 patients atteints de COVID-19. Cette large analyse, publiée dans la revue Science a permis d’estimer les niveaux d'infectiosité dans différents groupes d'âge et pour différents niveaux de gravité de la maladie. L’étude apporte également de précieuses informations sur la variante B.1.1.7.
Le nombre de reproduction (R 0) permet d’estimer à combien de personnes, une personne infectée par le SRAS-CoV-2 transmet son infection. Si la mesure est utile dans un contexte épidémiologique, souligne l’auteur principal, le Dr Christian Drosten, directeur de l'Institut de virologie de la Charité et chercheur au Centre allemand de recherche sur les infections (DZIF), «R 0» ne se prête pas à l'estimation du risque de transmission au niveau d’un individu ou d’un groupe spécifique d’individus. Et chaque groupe peut différer considérablement en termes d’infectiosité et de durée de contagiosité. Ces données sont bien évidemment essentielles pour freiner la transmission de l’épidémie en adaptant au mieux les interventions à chaque groupe de population.
Les niveaux d'infectiosité chez les plus jeunes enfants sont environ 80% de ceux trouvés chez les adultes
L'étude : pour mieux comprendre et estimer l'infectiosité de groupes spécifiques d'individus, l’équipe allemande a analysé les échantillons PCR de plus de 25.000 cas de COVID-19 afin de déterminer leur « charge virale », c’est-à-dire le nombre total de copies du génome du SRAS-CoV-2 contenues dans l'échantillon. La charge virale apporte ainsi une estimation approximative de la quantité de virus présente dans les voies respiratoires du patient et permet donc d’estimer son infectiosité. Pour améliorer encore leurs estimations, les chercheurs ont également appliqué les résultats concernant le seuil de charge virale minimum généralement requis pour pouvoir isoler le virus SRAS-CoV-2 en culture cellulaire. Des échantillons séquentiels étaient ainsi disponibles pour plus de 4.300 des cas étudiés. En les utilisant pour suivre les données de charge virale au fil du temps, les chercheurs sont parvenus à modéliser le développement typique des charges virales au cours de l'infection. Les chercheurs ont ensuite recherché des différences significatives dans leurs données, en particulier en ce qui concerne les différents groupes d'âge, la sévérité de la maladie et les variantes du virus. Cette analyse à la fois large et complète révèle :
- l’absence de différence notable dans les niveaux de charge virale parmi les individus positifs au SRAS-CoV-2 âgés de 20 à 65 ans ;
- les charges virales les plus faibles chez les très jeunes enfants (de 0 à 5 ans) ;
- une augmentation de la charge virale avec l'âge qui se rapproche des niveaux adultes chez les enfants plus âgés et les adolescents.
«Les charges virales observées chez les plus jeunes enfants sont, en fait, à peine en dessous du seuil auquel nous les considérerions normalement comme cliniquement pertinentes », écrivent les auteurs. Cependant, ils relèvent une limite à ces conclusions : les écouvillons pour enfants sont nettement plus petits et collectent moins de la moitié de la quantité d'échantillon normalement disponible pour les tests PCR.
Concrètement, quelle infectiosité ? En comparant les charges virales maximales estimées à partir des échantillons, les chercheurs ont estimé que :
- les niveaux d'infectiosité chez les plus jeunes enfants (0 à 5 ans) sont d'environ 80% de ceux trouvés chez les adultes ;
- les niveaux d’infectiosité des enfants et des adolescents d'âge scolaire se rapprochent des valeurs des adultes.
Les symptômes sont-ils révélateurs de l'infectiosité ?
Une analyse des symptômes observés dans les différents groupes confirme les observations précédentes, à savoir que
même des personnes asymptomatiques peuvent porter des charges virales très élevées ;
- les personnes hospitalisées pour des formes et des symptômes plus sévères présentent néanmoins en majorité une charge virale plus élevée que les autres personnes atteintes de COVID, pendant toute la durée de la maladie ;
- enfin, un pic de charge virale dans la gorge semble atteint entre 1 et 3 jours avant l'apparition des symptômes.
Des super-contaminateurs ? Environ 9% des cas de COVID-19 testés présentent des charges virales extrêmement élevées d'un milliard de copies par échantillon ou plus. Plus d'un tiers de ces personnes extrêmement infectieuses n'ont présenté aucun symptôme ou seulement des symptômes bénins.
«Ces données suggèrent qu'une minorité d'individus infectés est à l'origine de la majorité de toutes les transmissions ».
La variante britannique plus infectieuse ? Dans les échantillons collectés auprès de personnes infectées par la variante B.1.1.7, les charges virales moyennes s’avèrent augmentées d'un facteur 10, tandis que les estimations de l'infectiosité basées sur le laboratoire sont augmentées d'un facteur 2,6. « Une chose est claire : B.1.1.7 est plus infectieux que les autres variants »
Ces travaux sur les charges virales vont se poursuivre tout au long de la pandémie et au fur et à mesure que de nouvelles variantes apparaissent et que le virus s'adapte à des niveaux croissants d'immunité.
Source: Science 25 May 2021 DOI: 10.1126/science.abi5273 Estimating infectiousness throughout SARS-CoV-2 infection course
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