Le report des deuxièmes doses des vaccins contre COVID-19 présente des avantages épidémiologiques, conclut cette équipe de la McGill University (Montréal) qui a modélisé l'incidence de COVID-19 en fonction des niveaux d'immunité de la population. Mais ces chercheurs mettent aussi en garde : Une immunité partielle combinée à une couverture vaccinale encore faible pourrait aussi favoriser la mutation du virus.
A ce jour, prenant en compte les taux de protection élevés apportés par la première dose, quelques semaines seulement après l’injection, plusieurs pays dont le Royaume-Uni et le Canada, ont décidé de reporter la deuxième injection des vaccins à ARNm contre COVID-19. Cela en raison de la pénurie, dans l’objectif d’atteindre le plus rapidement possible une « première » couverture vaccinale. L'auteur principal Chadi Saad-Roy, étudiant en biologie évolutive, quantitative et en bio-informatique, à l'Institut Lewis-Sigler de l'Université de Princeton rappelle, dans un communiqué, les données rassurantes associées à la première injection : « Si l'on en juge par les premiers essais cliniques sur les vaccins et les données épidémiologiques, la première dose est très efficace ».
« Cependant, on ignore la durée de l'immunité conférée par cette première dose »
À l'aide d'un modèle simple et de différentes hypothèses sur la réponse immunitaire associée aux différents schémas vaccinaux, les chercheurs ont réalisé des projections sur l'incidence de COVID-19 et sur le degré d'immunité de la population.
Une seule dose n'est pas toujours suffisante
Le schéma vaccinal n’est pas à 2 doses sans raison et l'étude confirme que si cette première dose déclenche une réponse immunitaire déjà significative, cette réponse est moins vigoureuse que celle constatée avec la seconde injection. Ainsi, si le report de la deuxième dose peut réduire le nombre de cas à court terme en immunisant plus rapidement une population plus vaste, la seconde injection complète la protection du système immunitaire et certainement sa durabilité.
« Au fur et à mesure que notre capacité vaccinale augmentera, nous pourrons accélérer la vaccination ou nous rapprocher du schéma de 2 doses recommandé, si bien que ces effets épidémiologiques à long terme seront sans doute moins marqués », ajoute l’auteur principal.
Autre conséquence non négligeable d'une vaccination et d'une réponse immunitaires partielles : il existe un risque, écrivent les chercheurs dans leur communiqué, « que le virus échappe à l'offensive immunitaire » . Ainsi chez une personne partiellement vaccinée et immunisée, le virus pourrait, face à une « pression sélective » (le niveau d’immunisation collective) muter plus facilement. C’est actuellement le cas d’au moins un variant qui semble échapper partiellement au système immunitaire. Ainsi, de nombreux hôtes avec une immunité partielle pourraient favoriser l'évolution et la transmission des variants.
Alors que l’immunité partielle collective peut être la conséquence d’un schéma de vaccination incomplet mais aussi d’une faible couverture vaccinale, dans tous les cas elle est associée à un nombre de cas plus important et « très probablement » à un potentiel d'adaptation virale plus élevé. Cela suggère qu’en cette période de pénurie de vaccins,
la deuxième dose pourrait être retardée mais pas trop…
Cela souligne également l'importance d’un accès à la vaccination partout dans le monde. « Car une fuite immunitaire se propage rapidement ».
Des modèles décrits comme simples par les auteurs mais qui mettent en lumière toute la complexité de l’épidémie liée à ces multiples facteurs (disponibilité des vaccins, taux de vaccination partielle et complète, mutations du virus…).
Source: Science 09 Mar 2021 DOI: 10.1126/science.abg8663 Epidemiological and evolutionary considerations of SARS-CoV-2 vaccine dosing regimes
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