On sait que « l'hyperuricémique » d'aujourd'hui ou « le goutteux » est aussi souvent un patient hypertendu et à risque cardiaque. Cette équipe de envisage justement de repositionner la colchicine, un médicament utilisé dans le traitement de la crise de goutte, pour lutter également contre les maladies cardiaques. L’essai clinique présenté à la Digital Expérience de l’ESC Congress 2020, suggère que la colchicine permet en effet de réduire le risque d'événements cardiovasculaires majeurs chez les patients atteints de maladie coronarienne chronique.
La goutte est un rhumatisme inflammatoire qui provoque des douleurs et un gonflement des articulations. En cause, l'acide urique produit par le corps lors du processus de décomposition des purines, des substances naturelles présentes dans les cellules du corps et dans la plupart des aliments. Ces niveaux de purine sont particulièrement élevés dans la viande, les fruits de mer et l'alcool. Résultat d'une accumulation de cristaux d'acide urique dans l'articulation, la goutte affecte souvent le gros orteil, mais peut affecter des articulations plus importantes, comme le genou. Déjà associée dans l'histoire à l'art de vivre et de manger, la goutte est liée à l'obésité, la consommation excessive d'alcool, mais aussi à la prise de diurétiques, en traitement de l'hypertension artérielle.
La maladie cardiaque est souvent récidivante :
sur une décennie, plus d'un patient cardiaque sur 3 subit une autre crise cardiaque ou un accident vasculaire cérébral (AVC), voire décède de maladie cardiaque, en dépit de son traitement préventif.
La colchicine, extraite du bulbe de la plante de crocus, est utilisée depuis l'Antiquité pour traiter l'inflammation. Désormais fabriqué de manière synthétique, il s'agit d'un médicament générique utilisé pour traiter la goutte. Le médicament inhibe également plusieurs voies inflammatoires connues pour être importantes dans l'athérosclérose.
L'essai LoDoCo (Low Dose Colchicine) suggère l’efficacité de la colchicine
pour prévenir les événements cardiovasculaires chez les patients « cardiaques »
L'essai LoDoCo2 a suivi 5.552 patients atteints de maladie coronarienne chronique et tolérants à la colchicine pendant une phase initiale de 30 jours de traitement par colchicine (0,5 mg par jour) ou par placebo. Le critère d'évaluation principal était un composite de décès cardiovasculaire, d'infarctus du myocarde, d'accident vasculaire cérébral ischémique ou de revascularisation coronarienne provoquée par l'ischémie. Au cours d'un suivi médian de près de 30 mois,
- le critère d'évaluation principal est survenu chez 6,8% patients du groupe colchicine vs 9,6% témoins, ce qui donne une réduction de 31% du risque cardiovasculaire (tel qu’estimé par le critère principal de l’essai) ;
- la tendance est idem avec l’analyse séparée des critères secondaires composant le critère principal.
- plus de 90% des patients apparaissent tolérants à la colchicine. Chez les autres participants, les effets indésirables constatés comprenaient des symptômes gastro-intestinaux transitoires. Globalement, la colchicine à faible dose est bien tolérée sur le long terme ;
- sur un suivi de 5 ans, la colchicine à faible dose n'est associée à aucun effet indésirable sévère ;
L’auteur principal de l'étude, le Dr Mark Nidorf (du Centre de soins GenesisCare, Australie) conclut que l’incidence des événements cardiovasculaires pourrait être divisée par 4 chez les patients à risque élevé, avec l'ajout de colchicine à faible dose à leur traitement préventif.
« Enfin, l'ampleur de l'effet de la colchicine constatée dans cet essai, conforme aux résultats de précédents essais (CANTOS et COLCOT) soutient la colchicine comme une nouvelle option de prévention cardiovasculaire très prometteuse chez les patients atteints de maladie coronarienne chronique ».
Source: ESC Congress 2020 The Digital Experience 31 August 2020 Gout drug repurposed to fight heart disease
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