Tout médicament a son rapport bénéfice-risque, cependant certains effets secondaires ne sont constatés et répertoriés parfois que des années après la mise sur le marché. Un système capable de prédire les effets secondaires répond donc à un besoin réel et considérable. C’est la technologie proposée par cette équipe de la Harvard Medical School, dans la revue EBioMedicine. Basée sur l’apprentissage automatique, cette technologie, open source, identifie les protéines associées aux effets secondaires des médicaments.
En somme, l’outil relie les cibles médicamenteuses aux effets indésirables et peut donc ainsi les « prédire » avant même que les candidats médicaments ne passent les essais cliniques humains ou ne soient mis sur le marché en tant que médicaments approuvés. Ensuite, la technique apporte un aperçu de la façon dont le corps humain réagit aux composés médicamenteux au niveau moléculaire, de manière souhaitée et involontaire.
L'apprentissage automatique va permettre d'accélérer le processus de développement de nouveaux médicaments
C’est l’idée de l’auteur principal, Robert Ietswaart, chercheur en génétique : « Bien que cet outil ne puisse prédire tous les effets indésirables possibles, nos travaux vont considérablement aider les chercheurs à repérer les problèmes potentiels dès le début et à développer des médicaments plus sûrs ».
Les effets secondaires ou réactions indésirables peuvent être « légers » mais également sévères ou mortels. Ils peuvent survenir soit lors de la prise d'un médicament prescrit, soit à la suite d’une erreur de dosage, soit en raison d’une interaction de plusieurs médicaments ou encore d'une utilisation hors AMM. Des effets indésirables de médicaments se produisent au cours de 10 à 20% des hospitalisations. De nombreuses stratégies ont été mises en œuvre au cours des dernières décennies pour éviter ou réduire l’incidence de ces effets indésirables. Mais parce qu'un seul médicament interagit avec plusieurs protéines dans le corps, et parfois « imprévues », il est difficile de prévoir tous les effets secondaires.
L’apprentissage automatique au secours de la pharmacovigilance : ici, les chercheurs travaillent à partir d’une base de données existante des effets indésirables et d’une autre base de données de 184 protéines avec lesquelles certains médicaments sont connus pour interagir de manière fréquente. L’équipe a ensuite développé un algorithme rapprocher ces données. A partir de cette l'algorithme a mis au jour 221 associations entre les protéines individuelles et des effets indésirables spécifiques, dont certains déjà connus et d’autres pas.
Ces associations ont révélé
quelles protéines représentent des cibles associées à des effets secondaires particuliers.
L’algorithme retrouve des protéines aux effets indésirables déjà bien documentés : c’est le cas par exemple de la protéine hERG déjà associée à des arythmies cardiaques. Ou encore de la protéine PDE3, associée à plus de 40 réactions indésirables aux médicaments : les médecins savent depuis des années que les inhibiteurs de la PDE3, un traitement anticoagulant courant de l'insuffisance cardiaque aiguë peuvent provoquer des arythmies, une réduction des niveaux de plaquettes et une élévation des enzymes transaminases, un indicateur possible de lésions hépatiques. L’algorithme documente cependant un grand nombre d’effets jusque-là inconnus.
Avant même les essais cliniques et l’AMM : l’algorithme peut aider les médecins et les scientifiques à prédire si un nouveau candidat-médicament est susceptible d’entraîner des effets secondaires par lui-même ou en cas d’interaction avec d’autres médicaments. L'objectif est de pouvoir optimiser l’innocuité des nouveaux médicaments mais aussi de réduire les risques des participants lors des premiers essais cliniques.
Quelle précision des nouvelles prédictions? Les nouvelles prédictions se sont avérées ne pas être fausses du tout, expliquent les chercheurs qui ont comparé ces résultats aux notices des médicaments et aux données de pharmacovigilance.
Le modèle est publié gratuitement
en ligne sur https://github.com/samanfrm/ADRtarget
N.B. Ces travaux ont reçu le soutien du laboratoire Novartis.
Source: EBioMedicine 17 June, 2020 Machine learning guided association of adverse drug reactions within vitrotarget-based pharmacology
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