Les études scientifiques suggéraient jusque-là un amincissement du cortex, la couche la plus externe du cerveau, au fil du développement cérébral. Cette équipe de l'Université Stanford (Californie) et de l'Institut Max Planck (Leipzig, Allemagne), apporte un nouvel éclairage : ils révèlent au contraire une augmentation de la myéline, la gaine qui recouvre les fibres nerveuses. Cette myélinisation plus élevée (voir visuel, zones sombres), documentée dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine (PNAS), appelle de prochaines recherches sur son association possible avec la capacité d’apprentissage de l’enfant.
Les jeunes cerveaux se myélinisent
Cette myélinisation est ici documentée précisément dans une zone du cortex visuel supérieur, déterminante pour la reconnaissance faciale. Une découverte alors que de nombreuses études ont conclu plutôt à un amincissement du cortex cérébral, au fil du développement du cerveau : de 3 mm d'épaisseur, en moyenne, la matière grise du cerveau des enfants pourrait perdre, apparemment, jusqu’à 1 mm à l'âge adulte. Parmi les hypothèses proposées pour expliquer cette perte estimée alors comme considérable : les cellules de la matière grise et leurs connexions pourraient être « élaguées », pour promouvoir un cerveau plus efficace. La nouvelle recherche n'exclut pas ce processus et en apporte même quelques preuves supplémentaires, mais conclut essentiellement à une augmentation de la myélinisation.
Les limites entre matière grise et substance blanche ne sont pas si claires : cette analyse par imagerie cérébrale de pointe menée auprès de participants enfants et adultes, montre que les jeunes cerveaux se « myélinisent ». « C'est une bonne chose », mais cette évolution pourrait en fait fausser les estimations de l'épaisseur corticale (la matière grise). La myéline ou substance blanche qui isole de nombreuses fibres nerveuses, permet une neurotransmission plus rapide. La question qui se pose est que les mesures de l'épaisseur de la matière grise dépendent essentiellement de la détection de la frontière entre la substance blanche et la matière grise. Or ici, les chercheurs montrent que cette limite peut être obscurcie et l'épaisseur corticale sous-estimée si la myélinisation augmente au cours du développement. En synthèse, les chercheurs ne contestent pas le fait que le cortex puisse s'amincir au cours du développement mais suggèrent que les estimations de son épaisseur peuvent être faussées en raison d'une myélinisation simultanée.
A chaque zone, sa myélinisation : l’examen de 3 zones de cerveau spécialisées dans le cortex visuel supérieur, révèle, en dépit de leur proximité, un modèle de développement spécifique à chacune, soulignant la nécessité d'une interprétation prudente. Les zones de reconnaissance faciale et verbale présentent ainsi l'effet de myélinisation mais la zone de reconnaissance visuo-spaciale présente un amincissement significatif et aucun signe de myélinisation. Cependant sa structure évolue, la zone semblant s’étirer dans le temps.
Quelles implications ? Si ces résultats semblent quelque peu fondamentaux, les implications sont en fait considérables. Sur des décennies de recherche d’abord, dont il conviendra de vérifier la méthodologie et l’exactitude. Sur l’acquisition des compétences, ensuite, il faudra préciser le rôle de la myélinisation. Enfin, les maladies de la myéline, dont la sclérose en plaques, pourraient trouver, avec ces données sur le développement du cerveau, un nouvel axe de recherche.
Enfin, la technique d’IRM de pointe utilisée pour l’étude promet d'améliorer la détection, la surveillance et le traitement des maladies démyélinisantes.
Source: PNAS September 23, 2019 DOI : 10.1073/pnas.1904931116 Apparent thinning of human visual cortex during childhood is associated with myelination
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