Cette recherche va peut-être révolutionner le traitement de la maladie d’Azheimer, une forme de démence pour laquelle il n’existe aucun traitement curatif : pour la première fois au monde, des scientifiques parviennent à détruire un agrégat rigide de fibrilles amyloïdes à l'aide d'un laser. Alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime à plus de 150 millions le nombre de personnes touchées à l’horizon 2050, cette thérapie par laser à haute énergie donc par rupture mécanique, ouvre un immense espoir alors que les thérapies médicamenteuses testées jusque-là n’ont pas donné de résultat.
C’est une équipe de l’Université des sciences de Tokyo qui vient de tester ce laser à électrons libres pour décomposer ces agrégats ou fibrilles amyloïdes, un type de protéines / peptides auto-assemblés qui s’agrègent en forme de feuilles empilées. Des agrégats amyloïdes connus pour être à l’origine de plusieurs maladies dont la maladie d’Alzheimer. Comprendre comment ces agrégats peuvent être brisés est d’un intérêt scientifique et médical immense. D’autant que certains types de fibrilles amyloïdes jouent également un rôle dans la régulation de l'expression des gènes chez certains organismes. Enfin ces agrégats se développent à partir d’échafaudages de fibres sur un principe à partir duquel il serait possible de cultiver des biomatériaux. Toute technique adaptée à la décomposition ou à la « dissociation » des fibrilles de la protéine amyloïde répond à des besoins essentiels en termes de traitement médical, de compréhension et de modification des structures et des fonctions biologiques et enfin de bioingénierie.
Un laser à électrons libres pour décomposer les agrégats de protéines toxiques
Cette équipe japonaise composée du Dr Takayasu Kawasaki, du Pr Koichi Tsukiyama et du Pr Akinori Irizawa montre qu'un laser à électrons libres (free-electron laser : FEL) dans l'infrarouge lointain (far-infrared : FIR), appelé FIR-FEL, peut être utilisé pour décomposer les agrégats de protéines amyloïdes. De précédentes recherches ont visé la dissociation des fibrilles amyloïdes, mais avec un succès limité et des résultats mitigés. Parmi les lasers, le FIR-FEL a peu été étudié en dépit de sa capacité élevée de pénétration et sa bonne absorption par les systèmes biologiques. Il est pourtant utilisé dans l'imagerie des tissus, le diagnostic du cancer et les études biophysiques.
Une preuve de concept in vitro : les chercheurs utilisent ici comme modèle le peptide DFKNF à 5 résidus dont la fibrillation a déjà été corrélée à la pathogenèse. Ce peptide s’assemble automatiquement en feuille de fibrilles. L’équipe montre ici que le FIR-FEL peut rompre la conformation rigide de la feuille en créant de petits trous dans le film peptidique. FIR-FEL rompt également les liaisons hydrogène entre les feuilles superposées et donnait naissance à des peptides libres. C’est la dissociation : non seulement FIR-FEL perturbe la structure en forme de feuille rigide de la fibrille mais induit aussi des modifications morphologiques des fibrilles.
L’objectif serait de pouvoir utiliser FIR-FEL pour détruire les fibrilles amyloïdes profondes dans les tissus, comme dans le cas de la maladie d'Alzheimer. De plus, comme les fibrilles agissent comme des échafaudages pour les matériaux biocompatibles, le FIR-FEL pourrait être aussi utilisé dans l'ingénierie des biomatériaux en médecine régénérative ou dans les systèmes d'administration de médicaments à base de nano-vecteurs.
« Pour la première fois au monde, nous avons découvert qu'un agrégat rigide de fibrilles amyloïdes peut être efficacement décomposé à l'aide d'un laser, la prochaine étape consistera à comprendre comment le laser affecte les différents types de fibrilles peptidiques ».
Source: Scientific Reports 23 July 2019 Dissolution of a fibrous peptide by terahertz free electron laser
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