Une consommation régulière de cannabis peut entraîner une dépendance à la substance, une dépendance qui semble naître « sous le joug de l’habitude », suggère cette équipe internationale qui révèle par neuroimagerie la formation -avec une consommation quotidienne- de réseaux neuronaux, typiques de la dépendance chez les « gros » consommateurs de cannabis. L’étude, présentée dans la revue Biological Psychiatry : Cognitive Neuroscience and Neuroimaging contribue à expliquer comment le cerveau de l'habitude passe à l'addiction et pourquoi tous les consommateurs de cannabis ne développent pas cette dépendance, même avec un usage régulier à long terme.
Les chercheurs de l'Université des sciences et technologies électroniques de Chine et de l'Université de Bonn (Allemagne), utilisent l'imagerie cérébrale pour surveiller l'activité neurale lorsque les consommateurs de cannabis visionnaient des images (ou stimuli) associées à la consommation de cannabis. Bien que tous les usagers de cannabis participant à l'étude aient signalé une consommation importante, seuls quelques participants s’avèrent réellement dépendants. Si tous les consommateurs de cannabis, dépendants et non dépendants, présentent des réponses exacerbées dans une zone de la récompense, le striatum ventral, seuls les utilisateurs dépendants présentent aussi des réponses plus importantes dans la zone du cerveau qui forme les habitudes, le striatum dorsal.
La dépendance sous l’emprise de l’habitude plus que de la récompense
Ainsi, la consommation importante de cannabis est d'abord favorisée par des modifications du système de récompense du cerveau. Cependant, ces modifications ne suffisent pas à expliquer le passage vers la dépendance. La dépendance semble « plutôt provoquée par des modifications des systèmes cérébraux qui favorisent les comportements habituels ou automatiques », écrivent les chercheurs. Et cela peut aussi expliquer pourquoi certains consommateurs continuent à consommer malgré l’atténuation voire l'absence d'effets gratifiants de la drogue : leur comportement est désormais sous le l'emprise de « l’habitude » plutôt que de la récompense.
Cependant, l’imagerie cérébrale révèle aussi d'autres zones suractivées dont celles qui « attribuent une importance aux choses », ici aux stimuli de la substance. Cela suggère que le développement de la dépendance au cannabis intègre d'autres zones du cerveau, vouées à la récompense, et susceptibles de renforcer le désir de substance.
Il s'agit donc de lutter contre l’habitude : face à une libéralisation croissante du cannabis, ces données qui permettent de mieux comprendre pourquoi certaines personnes risquent davantage de devenir dépendantes au cannabis sont cruciales : différencier les circuits cérébraux uniques sous-jacents à la dépendance va permettre de mieux lutter contre le trouble de la dépendance au cannabis mais aussi de mieux détecter le passage au stade problématique de la dépendance.
L'identification du striatum dorsal et du comportement répétitif en tant que facteur de dépendance inspire notamment des interventions bien spécifiques visant à lutter contre l’habitude et à accroître ainsi les chances de succès du traitement.
Source: Biological Psychiatry: Cognitive Neuroscience and Neuroimaging 22 April 2019 DOI : 10.1016/j.bpsc.2019.04.006 Cue-reactivity in the ventral striatum characterizes heavy cannabis use, whereas reactivity in the dorsal striatum mediates dependent use
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