Cette étude de la « Penn » suggère que le ciblage des fibrilles amyloïdes, présentes dans le sperme de patients infectés, permettrait d’empêcher la transmission sexuelle de l’infection. Ces fragments de protéines présentes dans le sperme humain augmentent en effet significativement l'infection par le virus Ebola, notamment en le protégeant contre certaines conditions environnementales extrêmes dont la chaleur et la déshydratation. Les chercheurs de la Perelman School of Medicine de l'Université de Pennsylvanie documentent ce processus dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine (PNAS).
Si le virus Ebola est principalement transmis par contact direct avec du sang et d'autres fluides corporels provenant de personnes infectées, des études de suivi de l'épidémie de 2014 ont montré que les hommes peuvent « héberger » le virus dans leur sperme pendant au moins 2,5 ans. L'équipe de la Penn estime que cibler les amyloïdes dans le sperme pourrait prévenir la transmission sexuelle du virus Ebola : « La transmission sexuelle du virus Ebola pose un problème de santé publique important, en particulier à la lumière de l'épidémie d'Ebola en cours en République démocratique du Congo », rappelle l’auteur principal, le Dr Paul Bates, professeur de microbiologie.
La transmission sexuelle a également été liée à la résurgence du virus Ebola en Guinée, qui avait pourtant été déclarée exempte d'Ebola lors de l'épidémie en Afrique de l'Ouest. Le rôle de facteurs de l'hôte et notamment impliqués dans la transmission sexuelle était resté mal compris. Des stratégies de lutte contre les amyloïdes, telles que la création de petites molécules qui perturbent sa structure, ont été mises au point pour ralentir ou stopper la transmission du VIH. Les chercheurs suggèrent que cette approche pourrait être testée pour sa capacité à réduire la transmission sexuelle d’Ebola.
Plusieurs types d'amyloïdes trouvés dans le sperme augmentent la transmission et l'infection d'autres virus, tels que le VIH, en aidant le virus à se fixer sur la membrane entourant les cellules hôtes. Lors d’une précédente recherche, l’un des co-auteurs de l’étude actuelle, le Dr James Shorter, professeur agrégé de biochimie et de biophysique avait décrypté comment les protéines de choc thermique de levure et une petite molécule appelée CLR01 pourraient perturber la formation de fibrilles amyloïdes trouvées dans le sperme.
Les amyloïdes transmettent 20 fois plus efficacement l’infection : Pour tester la capacité des amyloïdes à transmettre l'infection, des virus bénins avec la glycoprotéine Ebola (un marqueur à l'extérieur de la particule virale) ont été incubés avec des concentrations physiologiques d'amyloïdes de sperme avant de servir à infecter divers types de cellules humaines dont des macrophages. Les niveaux d'infection des cellules avec ce virus Ebola bénin et les amyloïdes étaient environ 20 fois plus élevés. Les amyloïdes améliorent la liaison du virus aux cellules et augmentent sa capacité à « s’introduire » dans les cellules hôtes. Les fibrilles modifient considérablement les propriétés physiques du virus, le rendant plus apte à survivre dans des environnements corporels internes extrêmes (température élevée et déshydratation).
Les amyloïdes du sperme apparaissent à la lumière de ces travaux comme des cibles prometteuses pour inhiber la propagation du virus Ebola. Les prochaines étapes sont de déterminer si les amyloïdes ont un effet sur Ebola dans les modèles d'infection vaginale et si les composés qui perturbent les amyloïdes sont bien protecteurs. Il « faudra » également analyser les amyloïdes trouvés dans d'autres sites, tels que l'intestin humain, pour préciser leur rôle éventuel dans d'autres types d'infections virales.
Source: Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) June 25, 2018. DOI: 10.1073/pnas.1721646115 Enhancement of Ebola virus infection by seminal amyloid fibrils (Visuel NIAID/NIH)
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