Ces chercheurs français avec des collaborateurs de Chicago, présentent une nouvelle classe d'antibiotiques, les « ODL », ou odilorhabdines, pour lutter contre la résistance aux médicaments. Cet antibiotique se lie à un site encore jamais ciblé du ribosome de la cellule bactérienne, perturbe ainsi la synthèse des protéines dont la cellule a besoin pour vivre, et élimine ainsi la cellule. Ces travaux présentés dans la revue Molecular Cell, en apportant une nouvelle promesse dans le pipeline, répondent aux besoin urgent de nouveaux antimicrobiens
L’antibiotique présenté par ces chercheurs de l'Université de l'Illinois (Chicago) et de Nosopharm, une biotech française basée à Nîmes a deux particularités : sa source non conventionnelle et sa façon bien à lui de tuer les bactéries. Ces premières données laissent donc espérer une nouvelle classe d’antimicrobiens efficace pour lutter contre infections bactériennes antibiorésistantes.
Les odilorhabdines, ou ODL, sont produites par des bactéries symbiotiques trouvées dans les vers nématodes du sol qui colonisent les insectes à des fins alimentaires. Les bactéries aident à tuer l'insecte et, surtout, sécrètent l'antibiotique pour éloigner les bactéries concurrentes. Jusqu'à présent, personne n’avait prêté attention à ces bactéries associées aux nématodes et aux antibiotiques qu'elles produisent. L'équipe de recherche Nosopharm a examiné 80 souches de la bactérie pour évaluer leur activité antimicrobienne, a ensuite isolé les principes actifs produits par ces souches, étudié leurs structures chimiques et développé des dérivés plus puissants.
Un mécanisme d'action singulier : Ces travaux montrent que les ODL agissent de manière oiginale sur le ribosome des cellules bactériennes. Le ribosome étant la machine moléculaire de la cellule qui produit les protéines dont elle a besoin pour vivre. La particularité des ODL est bien de se lier à un site du ribosome, encore jamais ciblé par d'autres antibiotiques connus. L'antibiotique, une fois lié au ribosome, perturbe sa capacité à traduire le code génétique et le ribosome se trompe lorsqu'il crée de nouvelles protéines, expliquent les chercheurs. Cette altération du codage génétique corrompt la cellule par des protéines défectueuses, ce qui finalement entraîne sa mort.
Une classe d’antibiotiques bactéricides : les antibiotiques bactéricides sont rares et dans le cas des ODL, cette capacité est liée à ce site du ribosome encore jamais exploité par aucun antibiotique connu. C’est ce mécanisme tout à fait unique qui confère aux ODL cette capacité de traiter les infections qui ne répondent pas ou plus aux autres antibiotiques.
De premiers tests concluants : En France, les chercheurs de Nosopharm ont testé les ODL contre les pathogènes bactériens, dont plusieurs pharmacorésistants. Ces premiers tests constatent que les ODL peuvent « guérir » des souris infectées par plusieurs pathogènes à Gram négatif et à Gram positif, dont des Enterobacteriacae résistantes aux carbapénèmes (CRE), principales responsables des infections nosocomiales et du site opératoire.
De premières données d’efficacité qui justifient de mener d’autres recherches sur ce potentiel thérapeutique prometteur des ODL.
Source : Molecular Cell 5, April 2018 DOI: 10.1016/j.molcel.2018.03.001 Odilorhabdins, Antibacterial Agents that Cause Miscoding by Binding at a New Ribosomal Site (Visuel UIC / Yury Polikanov, et al.)
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