Cette étude des combinaisons spécifiques de maladies chroniques associées au risque maximum d’hospitalisation donne lieu à un modèle de prévision des « pressions hivernales » sur un système de santé ou un groupe d’établissement. Cet exercice, présenté dans la revue BMC Medicine, met en lumière l’impact particulièrement élevé des maladies cardiovasculaires, du cancer, des maladies rénales et du diabète, liés à un risque d'hospitalisation jusqu’à 11 fois plus élevé.
Des combinaisons spécifiques de maladies chroniques jouent un rôle majeur dans les pressions supplémentaires exercées, notamment durant l’hiver, sur les systèmes de santé. Cette multimorbidité chronique vient en effet s’ajouter aux infections hivernales et entraînent, par elles-mêmes des risques significativement plus élevés d'hospitalisation et de décès.
Pourquoi des taux d’hospitalisation plus élevés durant l’hiver ? Les infections hivernales ne sont pas seules en cause. Les pressions hivernales sont provoquées par l’aggravation de problèmes de santé résultant du temps plus froid, des virus saisonniers, de l’isolement et de la solitude accrus, ainsi que des difficultés au niveau des systèmes causées par une occupation plus élevée des lits et des absences de personnels. Ces pressions supplémentaires sont généralement observées durant la période du 1er décembre au 31 mars.
Dans les pays riches, dont ici l’Angleterre, la prévalence de la multimorbidité (soit 2 ou plusieurs maladies chroniques) devrait atteindre près de 70 % d’ici 2035. Cette prévalence croissante de la multimorbidité, corrélée au vieillissement des populations, appelle la préparation d’une réponse de nos systèmes de soins de santé. Pourtant, on ignore quelles sont les combinaisons de multimorbidité chronique les plus critiques.
L’étude analyse les données de santé primaires et secondaires collectées en Angleterre, pendant la période de pressions hivernales de 2021-22, afin d’identifier les facteurs ou causes d’admission à l’hôpital. Cette période coïncidait avec la pandémie de COVID-19. Les données complètes étaient disponibles pour plus de 48 millions de personnes. 59 maladies chroniques ont été prises en compte dans l’analyse, réparties en 19 groupes de maladies. Au cours de la période d'étude, près de 5 millions d’hospitalisations et de 180.000 décès ont été enregistrés.
- 40,5 % des personnes hospitalisées étaient exemptes de maladie chronique ;
- 28 % souffraient d'1 maladie chronique ;
- près d'un tiers soit 31 % souffraient de 2 maladies chroniques ou plus.
Des combinaisons à risque accru d'hospitalisation et de décès : après prise en compte des facteurs de confusion possibles, dont l’âge, le sexe, l’origine ethnique et le statut socioéconomique,
- les patients atteintes de cancer, de maladie rénale, de maladie cardiovasculaire et de diabète de type 2 ont un risque multiplié par 11 d’hospitalisation pendant l’hiver ;
- ce risque était près de 10 fois plus élevé avec la combinaison cancer, maladie rénale chronique, maladie cardiovasculaire et arthrose ;
- ce risque est également 10 fois plus élevé avec la combinaison cancer, maladie rénale chronique et maladie cardiovasculaire ;
- les maladies cardiovasculaires sont présentes dans les 10 combinaisons qui contribuent le plus aux hospitalisations, sauf une, c’est le cas des maladies rénales chroniques dans 8 de ces 10 combinaisons et du cancer dans 6 de ces combinaisons ;
- l’analyse des décès révèle que les personnes atteintes de maladies cardiovasculaires et de démence ont un risque multiplié par 15 de décès vs celles exemptes de ces maladies ;
- les patients atteints de la combinaison maladie rénale, maladie cardiovasculaire, démence et arthrose sont plus de 24 fois plus à risque de décès ;
La multimorbidité associée au risque maximum ?
La combinaison identifiée ici est la multimorbidité suivante :
maladie rénale + maladie cardiovasculaire + démence + arthrose.
- Cette multimorbidité est en effet liée à un risque de décès 24 fois plus élevé ;
- le risque d'hospitalisation est également 11 fois plus élevé chez les patients atteints de la combinaison cancer, maladie rénale, maladie cardiovasculaire et diabète de type 2 vs les personnes exemptes de ces maladies chroniques ;
S’il s’agit d’une étude d’observation qui ne démontre pas de relation de cause à effet, l’analyse est suffisamment large pour en tirer des conclusions sur la pression hospitalière l’hiver, et des implications pour une meilleure gestion de nos systèmes de soins.
« Les directives cliniques et politiques actuelles considèrent le risque d’hospitalisation et de décès pour de multiples maladies chroniques pendant la saison hivernale comme une seule maladie homogène, alors que ce n’est pas le cas », concluent les auteurs.
Source: BMJ Medicine 12 Nov, 2024 DOI: 10.1136/bmjmed-2024-001016 (In Press via MedRiv) Combinations of multiple long term conditions and risk of hospital admission or death during winter 2021-22 in England: population based cohort study
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