Cette équipe de de la Perelman School of Medicine de l'Université de Pennsylvanie en révélant comment une bactérie favorise la cicatrisation des plaies diabétiques chroniques jette les bases de nouveaux traitements topiques ou bactériens pour relancer le processus de réparation de ces plaies à retard de cicatrisation. Ces travaux, présentés dans la revue Science Advances, identifient à la fois une bactérie pro-cicatrisante et des voies en aval de ces effets bénéfiques.
Ce microbe pro-cicatrisation, Alcaligenes faecalis (A. faecalis), est une bactérie présente dans de nombreux types de plaies chroniques et qui, contrairement aux nombreuses bactéries nocives également présentes dans les plaies, stimule en fait leur cicatrisation. Précisément, la bactérie bénéfique favorise les mouvements des cellules cutanées essentiels à la fermeture des plaies et inhibe les enzymes néfastes et retrouvées à des niveaux excessifs chez les personnes atteintes de diabète.
L’auteur principal, le Dr Elizabeth Grice, chercheur en dermatologie, suggère que cette découverte des mécanismes sous-jacents à la manière dont A. faecalis stimule la cicatrisation va contribuer au développement de nouveaux traitements pour les plaies diabétiques : «la recherche s’appuie largement sur de précédents travaux nous ayant permis de profiler les bactéries trouvées dans les ulcères du pied diabétique au fil du temps et d’analyser comment ces bactéries influencent le processus de cicatrisation. Mais nous ne nous attendions pas à identifier une bactérie capable de favoriser la cicatrisation ».
A. faecalis, un allié surprenant de la cicatrisation
Les plaies chroniques, ulcères ou lésions qui ne cicatrisent pas ou trop lentement, sont fréquentes chez les patients diabétiques : on estime à pas moins de 2% l’incidence du pied diabétique chez ce groupe de patients. Ces plaies diabétiques peuvent être douloureuses, accroître la vulnérabilité à d’autres infections et sont liées à des taux de morbidité et de mortalité accrus. Il existe un immense besoin de nouvelles thérapies pour ces plaies invalidantes, au-delà de l’ablation chirurgicale des tissus lésés et des soins de pansement.
Comment A. faecalis influence la cicatrisation ?
L’étude a compris plusieurs expériences sur des souris diabétiques, leurs cellules cutanées et des échantillons de peau humaine de patients diabétiques. Ces expériences révèlent que :
- l’inoculation d’A. faecalis chez des souris diabétiques qui présentent des défauts de cicatrisation des plaies, permet une cicatrisation accélérée des plaies sans aucun signe d’infection ;
- l’introduction d’A. faecalis dans les plaies même déclenche et accélère la prolifération et la migration des kératinocytes, le type dominant de cellules de cicatrisation des plaies dans l’épiderme, ce qui permet une fermeture plus rapide de la plaie ;
- des échantillons de peau prélevés sur des patients diabétiques, cultivés avec A. faecalis présentent 10 jours plus tard, une croissance statistiquement significativement plus importante de kératinocytes ;
- les plaies diabétiques des souris traitées avec A. faecalis révèlent des gènes liés à l’activation des leucocytes, dont les lymphocytes T, essentiels à la défense du système immunitaire ;
- A. faecalis régule également à la baisse les gènes responsables de la dégradation du collagène, en particulier les enzymes appelées métalloprotéinases matricielles (MMP) ; ce point est d’autant plus important que chez les personnes diabétiques les MMP en excès inhibent la cicatrisation des plaies ; en particulier la MMP-10, exprimée par les kératinocytes, et dont le taux était réduit dans les plaies traitées avec A. faecalis.
L’équilibre nécessaire des métalloprotéinases matricielles (MMP) pour la cicatrisation : les MPP sont des enzymes nécessaires qui brisent les connexions entre les cellules pour permettre aux cellules de se déplacer. Mais chez les patients diabétiques, ces MMP existent à des niveaux beaucoup plus élevés. Or, A. faecalis rééquilibre l’expression des MMP dans les plaies, ce qui permet une fermeture plus rapide de la plaie.
Ces travaux livrent ainsi de nouvelles cibles à explorer, non seulement en révélant ce microbe impliqué dans le processus de cicatrisation des plaies chroniques, mais aussi différentes interactions spécifiques à ce processus. Il semble en effet possible d’isoler les molécules pro-cicatrisantes sécrétées par A. faecalis ou de cibler les voies en aval des effets des bactéries.
Source: Science Advances 26 June, 2024 DOI ; 10.1126/sciadv.adj2020 Alcaligenes faecalis corrects aberrant matrix metalloproteinase expression to promote reepithelialization of diabetic wounds
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