Les vaccinations répétées contre le COVID-19 produisent des anticorps qui neutralisent non seulement les variantes du SARS-CoV-2, le virus qui cause le COVID, mais aussi d’autres coronavirus. Ainsi la capacité protectrice du vaccin mis à jour est renforcée par les vaccins antérieurs et génère aujourd’hui des anticorps largement neutralisants, conclut, dans la revue Nature, cette équipe de virologues de l’Université de Washington, qui va jusqu’à suggérer que cette immunité croisée pourrait nous protéger contre des variants qui ne sont pas encore apparus.
La pandémie COVID est peut-être terminée, mais le virus circule toujours, entraînant toujours des milliers d’hospitalisations dans le monde et évoluant vers de nouveaux variants avec une régularité déprimante. Les auteurs rappellent en effet que la capacité exceptionnelle du virus SARS-CoV-2 à se modifier et à échapper aux défenses immunitaires a conduit l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à recommander une mise à jour annuelle des vaccins COVID.
La recherche confirme la nécessité d’une telle adaptation et conclut que les professionnels de santé notamment, ayant reçu les premières doses du vaccin contre le COVID-19 en décembre 2020 et qui ont bien fait leurs rappels de vaccination avec des versions mises à jour du vaccin COVID, sont aujourd’hui largement protégés contre les coronavirus associés.
Cependant, la nécessité d’un programme de vaccination annuel, comme pour la grippe, fait aujourd’hui débat. Avec un argument, l’immunité conférée par le vaccin d’une année peut interférer avec les réponses immunitaires des années suivantes, ce qui peut, dans certains cas, réduire l’efficacité des vaccins.
Les rappels de vaccination COVID favorisent de très larges réponses anticorps
L’étude apporte une réponse, en démontrant que l’immunité antérieure contre le SRAS-CoV-2, n’inhibe pas les réponses vaccinales ultérieures. Au contraire, elle favorise le développement d’anticorps largement neutralisants.
Pour comprendre comment l’empreinte influence la réponse immunitaire lors d’une vaccination répétée contre le COVID-19, l’équipe a mesuré les anticorps de souris ou de personnes ayant reçu une séquence de vaccins et de rappels contre le COVID-19 ciblant d’abord les variantes d’origine, puis les variants Omicron. Certains des participants humains avaient également été naturellement infectés par le virus responsable du COVID. Les chercheurs ont mesuré les niveaux d’anticorps neutralisants spécifiques à la variante originale, aux nouveaux variants Omicron ou aux deux. Ils observent que :
- très peu d’hôtes, humains ou souris, développent des anticorps uniques à Omicron ;
- peu d’hôtes également, humains ou souris, développent des anticorps uniques à la variante originale ;
- la grande majorité développent des anticorps neutralisants qui confèrent une immunité croisée contre les différentes souches. En d’autres termes, ces anticorps reconnaissent une caractéristique partagée par plusieurs variantes ;
- testés contre un panel de coronavirus, dont les virus SARS-CoV-2 de deux lignées Omicron ; un coronavirus provenant des pangolins ; le virus SRAS-1 qui a provoqué l’épidémie de SRAS de 2002-03 ; et le virus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS), ces anticorps montrent une forte capacité à neutraliser tous les virus à l’exception du virus MERS ;
- cette ampleur remarquable apparaît bien liée aux rappels de vaccination, mais aussi à l’exposition à plusieurs variantes (immunité naturelle) ;
- ainsi, après un rappel avec un vaccin qui cible Omicron, l’immunité croisée contre les différentes espèces de coronavirus est très augmentée.
Ainsi, les personnes vaccinées à plusieurs reprises contre le COVID-19, ayant donc reçu le premier vaccin contre la souche d’origine, puis des rappels avec des vaccins mis à jour ciblant les nouvelles variantes, génèrent des anticorps capables de neutraliser un large éventail de virus SRAS-CoV-2 et même certains coronavirus éloignés ;
Les rappels réguliers de vaccin COVID loin d’entraver la capacité de l’organisme à reconnaître et à répondre aux nouveaux variants, permet aux individus de constituer progressivement un stock d’anticorps largement neutralisants qui les protègent contre les variantes émergentes mais aussi contre d’autres espèces de coronavirus, même celles qui n’ont pas encore infecté les humains.
Quel processus ?
- Le premier vaccin induit une forte réponse immunitaire primaire qui façonne les réponses à une infection et à une vaccination ultérieure. Cette première vaccination déclenche le développement de cellules immunitaires mémoire : « cet effet connu sous le nom d’empreinte immunitaire est dans ce cas largement positive, car elle induit le développement d’anticorps neutralisants à réactivité croisée avec un spectre d’activité remarquable », commente l’auteur principal, le Dr Michael S. Diamond, MD, PhD, professeur de médecine.
- Une deuxième vaccination entraîne une réponse assez similaire à la première, en réactivant les cellules mémoire provoquées par le premier vaccin. Ces cellules mémoire dominent et façonnent la réponse immunitaire aux rappels ultérieurs ;
- Ce n’est pas le cas avec le vaccin contre la grippe, dont l’empreinte a des effets négatifs : les cellules mémoire productrices d’anticorps évincent les nouvelles cellules productrices d’anticorps, et le développement des anticorps neutralisants contre les souches du nouveau vaccin.
Pris ensemble, les résultats suggèrent qu’une revaccination régulière avec des vaccins COVID-19 mis à jour contre les variantes apporte l’immunité nécessaire pour combattre non seulement les variantes du SRAS-CoV-2 représentées dans les vaccins, mais également d’autres variantes du SRAS-CoV-2 et d’autres coronavirus.
Peut-être même des coronavirus qui ne sont pas encore apparus !
« Au début de la pandémie de COVID-19, la population mondiale était naïve sur le plan immunologique, ce qui explique en partie pourquoi le virus a pu se propager si rapidement et faire autant de dégâts. Recevoir chaque année un vaccin actualisé semble protéger contre un large spectre de variantes et même contre des coronavirus émergents,
…ou même contre une future pandémie « .
Source: Nature 15 May, 2024 DOI: 10.1038/s41586-024-07539-1 Imprinting of serum neutralizing antibodies by Wuhan-1 mRNA vaccines.
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