Cette étude menée à l’Université de Washington à Saint-Louis, revient sur l’efficacité de la stimulation nerveuse à réduire les épisodes d’obstruction dans le syndrome d’apnée du sommeil (SAOS). Alors que de nombreux patients restent réticents au traitement standard par pression positive continue (CPAP : Continuous Positive Airway Pressure), la stimulation nerveuse devient une option de plus en plus populaire. Cependant, cette analyse publiée dans le JAMA Otolaryngology–Head & Neck Surgery révèle que cette alternative n’est pas toujours efficace.
Le syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS) est causée par le relâchement des muscles de la bouche et de la gorge durant le sommeil. L’affaissement musculaire peut provoquer un blocage partiel ou complet du flux d’air et de l’apport d’oxygène, en particulier chez les personnes ayant une grande langue, un cou épais et des voies respiratoires étroites. Ces obstructions peuvent amener les personnes souffrant d’apnée du sommeil à arrêter de respirer pendant quelques secondes (parfois plus d’une minute), et à des réveils en sursaut avec le souffle coupé, un cycle qui peut se répéter souvent tout au long de la nuit. L’apnée du sommeil non traitée peut entraîner de graves problèmes de santé, notamment une somnolence diurne excessive, des maux de tête, des accidents vasculaires cérébraux, un rythme cardiaque irrégulier et d’autres problèmes cardiovasculaires.
Le traitement standard se fait par pression positive continue (CPAP), un dispositif installé au chevet du patient, qui maintient les voies respiratoires ouvertes via un tuyau respiratoire et un masque facial bien ajusté. Les appareils CPAP sont efficaces, mais peuvent être bruyants et inconfortables, d’où la réticence de très nombreux patients à suivre et observer ce traitement. Environ la moitié d’entre eux abandonnent.
Ainsi, pour de nombreux patients, la stimulation du nerf hypoglosse semble une alternative avantageuse. La thérapie est pilotée par un petit appareil fonctionnant sur batterie, implanté juste au-dessus des côtes. Un petit fil passe à l’intérieur de la poitrine et dans la mâchoire, où il se connecte à l’hypoglosse, un nerf qui contrôle les muscles de la langue chargés de maintenir les voies respiratoires supérieures ouvertes pendant le sommeil. Chaque fois que le patient inspire, l’appareil délivre des impulsions électriques au nerf hypoglosse, faisant avancer la langue juste assez loin pour éviter ces blocages des voies respiratoires qui entraînent les épisodes d’apnée.
Le traitement de stimulation nerveuse pour le SAOS a initialement été approuvé pour les patients ayant un indice de masse corporelle (IMC) dans la fourchette saine (IMC de 18,5 à 24,9) puis a été étendu aux patients ayant un IMC allant jusqu’à 40, une fourchette de poids associée à l’obésité morbide.
L’élargissement des critères d’éligibilité a permis à davantage de patients souffrant d’apnée du sommeil d’accéder à la thérapie de stimulation du nerf hypoglosse. Cependant, cette recherche révèle aujourd’hui que les chances de succès du traitement par stimulation nerveuse diminuent avec l’augmentation du poids du patient, en particulier lorsque son IMC est au-delà de la fourchette considérée comme saine.
L’étude est une analyse rétrospective du succès du traitement chez 76 patients atteints d’apnée du sommeil avec un IMC inférieur à 35. L’analyse montre que :
« plus le patient est en surpoids et moins le traitement de stimulation nerveuse sera efficace pour traiter son SAOS »,
déclare l’auteur principal, le Dr Eric C. Landsness, professeur de neurologie. Expert du sommeil et exerçant auprès de patients souffrant d’apnée du sommeil, le Dr Landsness a été surpris par les changements apportés aux critères d’éligibilité. Pour comprendre le fonctionnement de l’appareil chez des personnes de différentes corpulences, son équipe a entrepris cette évaluation indépendante du traitement par stimulation nerveuse au Centre de médecine du sommeil de l’Université de Washington de 2019 à 2023.
« Je ne dis pas que nous ne devrions pas mettre en œuvre ce traitement chez les patients ayant un IMC de 38 ou 40. Mais mon travail en tant que médecin consiste à aider les patients en surpoids à prendre une décision éclairée et à mieux prévoir leurs chances de succès ».
- Le principal résultat de l’étude est que, dans l’ensemble, l’appareil fonctionne ;
- 3 patients sur 4 présentent une amélioration significative des symptômes d’apnée au cours de l’année suivant l’implantation ;
- la plupart des participants bénéficient d’une réduction de leurs symptômes d’au moins 50 %, certains même de réductions spectaculaires jusqu’à des niveaux d’apnée du sommeil proches de la normale ;
- cependant, parmi les participants en surpoids ayant un IMC compris entre 32 et 35, les résultats sont moins positifs et les chances de succès sont réduites de 75 % vs les participants ayant un IMC plus faible ;
- pour chaque augmentation d’1 unité l’IMC au-delà de 32, les chances de succès du traitement sont réduites d’environ 17 %.
L’IMC se révèle ainsi un facteur important de réponse à la stimulation du nerf hypoglosse.
Ainsi, alors que l’implantation d’un dispositif de stimulation du nerf hypoglosse constitue une intervention chirurgicale ambulatoire relativement simple, que la thérapie est considérée comme « une alternative révolutionnaire à la CPAP », l’IMC au-delà de la fourchette normale est certainement un frein à prendre en compte dans sa mise en œuvre.
Source: JAMA Otolaryngology–Head & Neck Surgery 4 April, 2024 DOI: 10.1001/jamaoto.2024.0261 Response to hypoglossal nerve stimulation changes with body mass index and supine sleep.
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