Cette étude, présentée lors de la Conférence Epidemiology and Prevention (EPI 2024) de l’American Heart Association (AHA) décrypte comment l’exposition à une chaleur élevée peut altérer les cellules du système immunitaire et les induire à produire en excès des molécules de signalisation pouvant entraîner une inflammation. Cette toute première analyse des niveaux de molécules de signalisation immunitaire et des marqueurs de l’inflammation apporte de nouvelles et précieuses données sur l’impact biologique du réchauffement sur la santé humaine.
L’auteur principal, le Dr Daniel W. Riggs, professeur de médecine à l’Université de Louisville (Kentucky) précise que c’est la première recherche à suivre de multiples marqueurs de l’inflammation et de la réponse immunitaire dans le corps pour étudier les effets à court terme de l’exposition à la chaleur. En révélant ce processus qui conduit à l’inflammation, la recherche contribue à expliquer comment, même une exposition à court terme à une chaleur plus élevée peut interférer avec les fonctions normales du système immunitaire, ce qui peut augmenter la susceptibilité aux infections et accélérer la progression des maladies cardiovasculaires.
L’inflammation fait partie des défenses normales de l’organisme contre les blessures ou les infections. Cependant, une réponse inflammatoire chronique, c’est-à-dire qui dure de longues semaines, voire des mois, ou qui se produit dans les tissus sains est dommageable et joue un rôle clé dans l’accumulation de plaque dans les artères ou athérosclérose. On sait déjà que les vagues de chaleur favorisent l’inflammation.
L’étude est menée auprès de 624 participants ayant effectué une analyse de sang, dans différents centres et durant les mois d’été, et les chercheurs ont analysé le sang à la recherche de plusieurs marqueurs du système immunitaire. L’équipe a également examiné les associations entre ces marqueurs du système immunitaire et les niveaux de chaleur, notamment la température, la température effective nette (qui prend en compte l’humidité relative, la température de l’air et la vitesse du vent) et l’indice climatique thermique universel (UTCI : un indice thermophysiologique qui prend en compte la température, l’humidité, la vitesse du vent et les niveaux de rayonnement ultraviolet). L’analyse révèle :
- pour chaque augmentation de 5 degrés de l’indice UTCI, une augmentation des niveaux de marqueurs clés de l’inflammation soit de 4,2 % des monocytes, e 9,5 % des éosinophiles, de 9,9 % des lymphocytes T tueurs, de 7 % du facteur de nécrose tumorale alpha dans le sang. Ces molécules immunitaires indiquent l’activation du système immunitaire inné du corps, qui déclenche une réponse inflammatoire rapide et non spécifique dans tout le corps ;
- une diminution des cellules B (-6,8 %), suggérant que la réponse immunitaire adaptative du corps qui se souvient de virus et de germes spécifiques et crée des anticorps pour les combattre, a été abaissée.
Alors que les participants n’ont été que légèrement exposés à des températures élevées le jour de leur prise de sang, cette exposition mineure a suffi à entraîner des modifications des marqueurs immunitaires. Les auteurs notent que, « avec la hausse des températures mondiales, l’association entre l’exposition à la chaleur et une réponse affaiblie du système immunitaire est préoccupante, d’autant la température et l’humidité sont connues pour être d’importants facteurs environnementaux de transmission de maladies infectieuses aéroportées. Ainsi, pendant les jours les plus chauds de l’été, la vulnérabilité aux maladies ou aux inflammations devrait augmenter ».
- En cas de maladie cardiovasculaire préexistante, le risque d’événements cardiovasculaires et de décès liés à la chaleur est particulièrement élevé.
« Il est important que les médecins communiquent avec leurs patients sur le risque d’effets néfastes sur la santé liés à l’exposition à la chaleur. Les cardiologues notamment devraient sensibiliser les patients à leur sensibilité aux effets des températures élevées. Certains médicaments pourraient rendre les gens plus sensibles aux maladies liées à la chaleur ou certains pourraient ne pas être aussi efficaces lorsque le corps est exposé à ces températures élevées », concluent les chercheurs.
Source: American Heart Association (AHA) EPI 2024 Session P02.05 – Environmental Exposures 19 March, 2024 P297 – Associations Between Short-Term Outdoor Heat Measures and Markers of Immune Response and Inflammation
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