Ces experts du Centre for Sustainable Healthcare d’Oxford rappellent l’urgence de lutter contre la crise climatique et écologique, une menace pour la santé publique, qui appelle aussi les professionnels de santé à agir et à réduire l’impact des soins de santé sur le climat. Alors qu’à l’échelle mondiale, le secteur de la santé représente 4,4 % des émissions nettes de gaz à effet de serre, qu’il repose sur une utilisation intensive d’énergie et de ressources et génère des niveaux élevés de déchets, « il est crucial qu’il s’oriente vers l’acceptation de la durabilité comme norme opérationnelle fondamentale ». Si la transition se fait globalement attendre, plusieurs initiatives internationales, nationales ou à l’échelle du système de santé ont déjà été mises en œuvre, et pour certaines avec succès.
50 pays se sont engagés à créer des systèmes de santé résilients et à faible émission de carbone. Le National Health Service britannique a été le premier système à s’engager à atteindre un objectif de zéro émission nette de carbone d’ici 2045 et a développé un programme pour améliorer la durabilité sociale, environnementale et financière de son système public de soins de santé.
En Europe, l’initiative Health Care Without Harm Europe’s Operation Zero a permis de développer une feuille de route adaptable à chaque pays, afin de rendre son système de santé moins consommateur de ressources et plus respectueux de l’environnement.
Une autre initiative, Race to Zero, a mis au point des directives d’écoresponsabilité pour les systèmes de santé de 18 pays, dont les États-Unis.
Malgré cette prise de conscience politique croissante à la fois des effets du changement climatique sur la santé et de la nécessité de soins de santé plus durables, les compétences pratiques nécessaire à cette transition vers des soins de santé respectueux de l’environnement ne sont généralement pas enseignées aux professionnels de la santé. L’éducation et la formation des personnels de santé restent donc une priorité clé, sans laquelle les systèmes de santé n’atteindront pas les objectifs de durabilité.
D’autant que les cliniciens sont les utilisateurs et les prescripteurs de la majorité de ces produits, ainsi que des déplacements des patients qui génèrent aussi leurs émissions et leur empreinte carbone.
Les auteurs citent à l’appui de leur appel, les résultats d’une enquête mondiale menée dans 112 pays et montrant que seulement 15 % des facultés de médecine incluent des connaissances sur le changement climatique dans leur cursus.
La durabilité doit être intégrée dans la démarche d’amélioration de la qualité des soins
La durabilité fait référence à une population qui « répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité de réponse pour les générations futures ».
L’amélioration de la qualité du système de santé, démarche à laquelle doit être intégrée la dimension de durabilité, nécessite une approche systématique, une méthodologie, une métrique : ces experts d’Oxford proposent ici un cadre novateur qui intègre la durabilité environnementale, sociale et économique dans la dynamique d’amélioration de la qualité des soins. Il s’agit d’une approche visant à améliorer les soins de santé de manière holistique, à travers le prisme d’un « triple bilan », la durabilité étant appréciée selon un rapport entre les résultats pour les patients, et les impacts environnementaux, sociaux et financiers pour les populations.
- En d’autres termes, les résultats de santé des patients et des populations « couvertes » par un système, un service ou un protocole de soins devraient toujours être mis en balance avec les impacts environnementaux, sociaux et financiers générés, afin de déterminer sa valeur durable globale. L’application du triple bilan pour concevoir et évaluer les résultats de santé fournit ainsi un nouveau cadre d’évaluation de l’amélioration de la qualité des soins de santé, durabilité comprise.
Ce cadre vise à favoriser la transition vers des soins de santé durables à 3 égards :
- il introduit les ressources environnementales et sociales en tant que composantes du système ;
- il considère que même des résultats remarquables ne sont pas durables si les ressources environnementales, sociales et financières sont dépassées ;
- les impacts environnementaux deviennent un critère à part entière, ce qui nécessite l’intégration de nouvelles compétences au sein des systèmes de santé.
On le voit bien, les initiatives se multiplient pour amorcer la transition vers des soins de santé durables ; certains de ces programmes apportant déjà des réductions de carbone substantielles ainsi que des économies.
Sources :
- The Lancet Planetary Health 2023 DOI : 10.1016/S2542-5196(22)00330-8 Teaching skills for sustainable health care
- Centre for Sustainable Healthcare d’Oxford 2023 Sustainability in Quality Improvement (SusQI)
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