Cette équipe de bioingénieurs de l’Université de Barcelone (UAB) s’inspire précisément de la moule pour développer un revêtement antimicrobien permettant de réduire la propagation des agents pathogènes sur les dispositifs de pansement et différents tissus hygiéniques et médicaux. Ce matériau innovant non seulement réduit le risque d’infections mais permet également d’éviter le développement d’une résistance aux antimicrobiens.
Inspiré des substances sécrétées par les moules pour adhérer aux roches, il constitue une alternative efficace aux matériaux couramment utilisés tels que le papier, le coton, les masques chirurgicaux et bien sûr, les pansements. Alors que la surutilisation des antibiotiques a conduit au développement de la résistance aux antimicrobiens (RAM), une menace croissante pour la santé publique, qui rend en pratique clinique, les infections plus difficiles à traiter et augmente le risque de propagation d’agents pathogènes, le développement de nouveaux matériaux antibactériens plus efficaces est devenu une urgence. De plus, il est particulièrement important de contrôler les populations bactériennes dans les environnements de santé tels que les hôpitaux et autres unités de soins afin d’éviter les infections dites nosocomiales, principalement dues à la colonisation bactérienne sur les surfaces biomédicales.
Les infections liées aux soins constituent la 6è cause de décès dans les pays riches,
et bien plus encore dans les pays en développement, précisent les chercheurs. Ces infections liées aux soins menacent tout particulièrement les patients immunodéprimés et en soins intensifs (les victimes de brûlures par exemple ou les patients atteints de pathologies chroniques comme le diabète (plaies diabétiques). Parmi les différents matériaux susceptibles de propager ces populations bactériennes, les tissus médicaux, dont les pansements, font partie intégrante des soins aux patients.
Pour toutes ces raisons, les revêtements antibactériens pour ces types de dispositifs médicaux sont un domaine de recherche très actif.
L’étude : l’équipe s’est inspirée des moules et de leur capacité à évoluer chimiquement au fil du temps en présence d’air et d’atmosphères humides, ce qui favorise la formation continue d’espèces réactives de l’oxygène (ROS). Les chercheurs ont ainsi développé une famille de revêtements biocompatibles et bioinspirés produits par la copolymérisation entre le catéchol et des polyphénols. L’un des principaux composants présents dans ce nouveau « revêtement » se trouve en effet dans les brins sécrétés par les moules, qui permettent leur adhésion aux roches dans des conditions extrêmes, y compris sous l’eau salée.
- Ainsi le matériau développé possède également cette capacité d’adhérer à pratiquement n’importe quel type de surface ;
- présente une résistance élevée aux différentes conditions environnementales telles que l’humidité des plaies ou la présence de fluides corporels ;
- ces composés naturels permettent d’obtenir des matériaux plus biodégradables et biocompatibles ;
- ils favorisent une moindre résistance microbienne.
Testé sur des dispositifs de pansements notamment, le revêtement confirme son activité antibactérienne contre un large spectre d’espèces, y compris des micro-organismes ayant développé une résistance à des conditions environnementales extrêmes (comme B. subtilis), ainsi que des agents pathogènes considérés comme la principale source responsable de nombreuses infections nosocomiales, en particulier celles contractées dans les établissements de santé, à la fois Gram-négatifs (E. coli et P. aeruginosa) et Gram-positifs (S. aureus, S. aureus résistant à la méthicilline – SARM et E. faecalis). Ces matériaux se sont également révélés efficaces contre des champignons tels que C. albicans et C. auris.
Son efficacité est également validée dans des atmosphères humides, comme celles trouvées dans les environnements de soins de santé, ou en cas d’exposition aux différents fluides corporels dont les gouttelettes respiratoires – ce qui réduit le risque de transmission par contact indirect. Cette activité antimicrobienne s’explique par un processus de destruction par contact direct, dans lequel l’agent pathogène est initialement fixé au revêtement par des molécules de catéchol et d’autres dérivés de polyphénols.
Ces revêtements innovants suivent une synthèse simple en une étape et évolutive et utilisent des matériaux abordables et
des méthodologies basées sur la chimie verte.
Enfin, il est possible d’ajuster différents paramètres tels que la couleur, l’épaisseur et l’adhérence, ce qui en fait une solution adaptable aux différentes exigences de l’application finale du matériau.
Source: Chemical Engineering Journal 1 Feb, 2024 DOI: 10.1016/j.cej.2024.148674 Bioinspired phenol-based coatings for medical fabrics against antimicrobial resistance
Laisser un commentaire