Cette équipe de chercheurs de la Yale School of Public Health identifie 2 PFAS ou « produits chimiques éternels » qui incitent les cellules cancéreuses à migrer et contribuent ainsi à la formation de métastases. La recherche menée à ce stade en laboratoire et publiée dans la revue Environmental Science & Technology, commence tout juste à décrypter le processus par lequel certaines expositions toxiques favorisent la propagation des cancers mais marque une étape importante dans la compréhension de « l’exposome ».
La recherche se concentre sur les effets cancérigènes de ce groupe de produits chimiques industriels appelés substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS), connues également sous le nom de « produits chimiques éternels » car elles ne se décomposent pas dans l’environnement et peuvent s’accumuler dans le corps humain, et sont également connues pour leur omniprésence, leur stabilité environnementale exceptionnelle et leurs multiples effets toxiques.
Ces substances chimiques sont également retrouvées dans le sang des nouveau-nés, des personnes vivant dans certaines communautés autochtones subarctiques, dans les poissons et les moules, et même dans les œufs des oiseaux. Aucun niveau de PFAS dans le corps n’est considéré comme sûr, et leurs effets ont été associés à un large éventail de problèmes de santé, notamment les cancers. En novembre, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé l’acide perfluorooctanoïque (PFOA), un PFAS courant, comme cancérogène pour l’Homme et l’acide perfluorooctanesulfonique (PFOS), un autre PFAS courant, comme « potentiellement » cancérigène pour l’Homme.
« Les PFAS constituent une classe connue et répandue de polluants organiques persistants qui suscite une préoccupation croissante du public et des scientifiques du monde entier. « Ces substances sont fréquemment détectées dans l’environnement, comme dans l’eau potable, la poussière intérieure, les produits de nettoyage et les revêtements », rappelle l’un des auteurs principaux, Jie Zheng, chercheur en sciences de la santé environnementale.
L’étude a porté précisément sur l’effet des PFAS sur la propagation du carcinome colorectal (CRC). On pense qu’environ 80 % des cas de CCR sont liés à une exposition environnementale, et on sait que les pompiers souffrent de ce type de cancer à des taux plus élevés que la population générale et ils sont fortement exposés aux PFAS. Cependant, on ignore les mécanismes en cause dans cette association.
L’équipe de la Yale utilise la métabolomique pour mesurer les niveaux fluctuants de milliers de petites molécules comme les acides aminés, les lipides et les protéines lorsque des cellules de CCR sont immergées dans une solution PFAS, et précisément de PFOS et de PFOA pendant 7 jours. Pour ces tests, 2 types de cellules de CCR ont été utilisés, un type avec un gène KRAS non muté ou « de type sauvage » et un type avec gène KRAS muté, associé à un type de tumeur du côlon particulièrement mortel chez la femme. L’expérience révèle :
que la solution de PFAS augmente la capacité de migration des cellules ;
- une motilité cellulaire accrue avec cette exposition aux PFAS et des changements métaboliques similaires à ceux observés lors de la formation de métastases cancéreuses ; ainsi, les sphéroïdes de cellules CCR produisaient une variété d’acides gras, d’acides aminés et de protéines de signalisation selon des modèles documentés comme liés aux métastases. Les acides gras à petite chaîne, qui peuvent protéger contre les tumeurs et l’inflammation, sont également régulés à la baisse ;
- une régulation révélatrice de protéines signal spécifiques associées aux métastases -observée notamment au cours du processus de transition épithéliale-mésenchymateuse – un phénomène qui se produit dans la cicatrisation des plaies, la fibrose des organes et dans l’initiation des métastases dans la progression du cancer.
- ces observations concordent avec les connaissances actuelles sur le métabolisme, la propagation et le pronostic du cancer, ce qui suggère bien que l’exposition à ces produits chimiques éternel peut induire ou favoriser la formation des métastases.
Cette recherche fait partie d’une quête scientifique
pour mieux comprendre l’exposome,
c’est-à-dire toutes les influences environnementales sur une personne depuis la conception jusqu’à la mort, ces expositions pouvant influer co,sidérablement sur la santé.
« Si de nombreuses études in vitro ne peuvent être transposées chez l’Homme, ces travaux apportent, a minima, une nouvelle compréhension des mécanismes par lesquels les expositions à certains PFAS peuvent réellement affecter la croissance des cellules cancéreuses et la formation de métastases ».
Source: Environmental Science & Technology 8 Dec, 2023 DOI : 10.1021/acs.est.3c04844 Perfluorooctanesulfonic Acid and Perfluorooctanoic Acid Promote Migration of Three-Dimensional Colorectal Cancer Spheroids
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