Le travail par quarts et surtout de nuit provoquent des troubles du sommeil chez plus de la moitié des personnes qui suivent ces rythmes décalés, conclut cette nouvelle étude de chercheurs en psychiatrie de l’Institut de santé mentale GGZ Drenthe (Pays-Bas). Les conclusions, publiées dans la revue Frontiers in Psychiatry, alertent ainsi sur le risque très élevé de troubles du sommeil, et de comorbidités associées -dont la maladie cardiaque- en particulier chez certains groupes de population identifiés ici comme plus vulnérables à ces effets.
Parmi les groupes de personnes pratiquant des horaires décalés les plus touchés par les troubles du sommeil, figurent notamment les jeunes adultes à plus faible niveau d’études. Cependant, les effets sur le sommeil sont généralisés : ainsi, 51 % des personnes travaillant de nuit sont ici diagnostiquées avec au moins un trouble du sommeil.
Le sommeil est essentiel au fonctionnement diurne et neurocognitif,
mais également à la santé physique et mentale. Or, 21 % des travailleurs de l’Union européenne travaillent par quarts ou de nuit, et « encaissent » ainsi des rythmes circadiens ou veille-sommeil perturbés. L’auteur principal, le Dr Marike Lancel, chercheur en psychiatrie rappelle que lla moitié de ces personnes travaillant en horaires décalés « sont testées positives pour au moins un trouble du sommeil ». En somme, 10 % des européens souffrent de troubles du sommeil liés au travail posté.
L’étude s’est concentrée sur la relation entre différents modèles de travail posté, les facteurs sociodémographiques et les troubles du sommeil. Car si de nombreuses recherches ont déjà confirmé le lien entre une horloge biologique décalée et les troubles du sommeil, et le risque de maladies dont des complications cardiométaboliques, on sait peu de choses sur l’influence des différents types de modèles de travail sur la prévalence des troubles du sommeil. L’analyse des habitudes de travail, des données démographiques et de santé de plus de 37.000 participants, ainsi que l’analyse des caractéristiques de leur sommeil (dont l’insomnie, l’hypersomnie, la parasomnie, les troubles respiratoires liés au sommeil, les troubles du mouvement liés au sommeil et les troubles du rythme circadien) révèle que :
- le travail de nuit, même régulier, est l’habitude de travail la plus dommageable en matière de sommeil ;
- la moitié des travailleurs de nuit dorment moins de 6 heures par 24 heures ;
- 51 % signalent un trouble du sommeil ;
- 26 % 2 troubles du sommeil ou plus ;
Quelle influence des facteurs démographiques ? Les caractéristiques sociodémographiques dont le sexe, l’âge et le niveau d’études ont un impact significatif sur la « santé » du sommeil. Ainsi,
- les hommes dorment moins d’heures que les femmes ;
- les troubles du sommeil associés au travail de nuit ou par quarts sont plus fréquents chez les femmes ;
- l’âge influence aussi les caractéristiques du sommeil : les participants plus âgés dorment encore moins d’heures, mais la plupart des troubles du sommeil et leurs comorbidités sont plus fréquents au sein du groupe de participants le plus jeune, âgé de 30 ans et moins ;
- le niveau d’éducation est inversement associé au risque de troubles du sommeil, un niveau d’études inférieur augmentant le risque de développer des troubles du sommeil. Ce groupe dorme également moins longtemps et présente un risque plus élevé de comorbidités.
Certaines personnes travaillant de nuit ont moins de problèmes de sommeil que d’autres, mais dans l’ensemble, concluent les chercheurs, il est peu probable que toutes les conséquences négatives du travail de nuit puissent être complètement évitées.
Des informations cruciales pour l’ensemble des professions qui travaillent par quarts ou de nuit, comme les personnels de santé. Un nouvel appel à d’autres recherches sur les stratégies -comme un planning de siestes ou de récupérations optimisé– qui pourraient permettre de réduire ces conséquences dévastatrices des horaires de travail décalés.
Source: Frontiers in Psychiatry 7 Dec, 2023 DOI: 10.3389/fpsyt.2023.1233640 Shift work is associated with extensively disordered sleep, especially when working nights
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