Les maladies neurologiques sont source de troubles vésico-sphinctériens, qui se manifestent par l’incontinence et/ou la rétention urinaire. Certaines maladies du système nerveux central et périphérique perturbent en effet la commande vésicale : c’est le cas de la maladie de Parkinson, de la maladie d’Alzheimer, des neuropathies diabétiques, de la sclérose en plaques, autant de conditions dont la prévalence augmente avec le vieillissement des populations. Des traitements et des dispositifs d’aide à la miction et à la continence existent, mais, au-delà de leur surveillance,
l’aidant et le soignant à domicile ont un rôle clé à jouer : préserver la qualité de ces personnes face à ce double handicap, de perte de contrôle neurologique et vésical.
Les atteintes neurologiques des systèmes de régulation de la vessie peuvent intervenir à différents niveaux, tronc cérébral, encéphale, médullaire centrale ou périphérique (syndrome de la queue de cheval, neuropathie diabétique).
La fonction vésicale dépend fortement de son innervation et, de ce fait, est particulièrement exposée à ces différentes atteintes neurologiques. Qu’elles interviennent au niveau cortical, médullaire, ou périphérique, les lésions neuronales sont susceptibles d’entrainer une incontinence.
Ainsi, dans la sclérose en plaques (SEP) la prévalence des troubles vésico-sphinctériens (TVS) est comprise entre 30 et 96 %, variant selon le stade de la SEP et le degré de handicap. Les TVS apparaissent en moyenne entre 6 et 10 ans d’évolution de la SEP. De même, en cas d’AVC, l’incontinence urinaire est fréquente, avec une prévalence pouvant atteindre 80 % dans la période aiguë de l’AVC. Les troubles vésicaux seraient retrouvés ultérieurement chez 10 % des patients post-AVC. Enfin, d’autres situations d’atteinte neurologique aussi, dont les troubles cognitifs ou psychologiques, la dépression sévère ou la maladie d’Alzheimer, sont des causes prévalentes d’incontinence ou de dégradation de la continence.
Une double perte de contrôle qui obère la qualité de vie
L’aidant et le soignant se doivent alors comme le patient, de faire face à cette « double peine », la perte de contrôle neurologique et vésical, avec une priorité dans sa prise en charge, en identifier l’origine. Les facteurs d’incontinence neurologique sont multiples et peuvent être aggravés par des facteurs environnementaux ou de mode de vie, comme,
- la prise de certains médicaments dont les diurétiques, mais aussi les somnifères, certains anxiolytiques ou autres antihypertenseurs qui peuvent provoquer un relâchement de la vessie ;
- la consommation de boissons comme le coca-cola, le café, le thé et plus largement les boissons à base de caféine qui ont également une action diurétique ;
Vessie neurogène, comment la contrôler ? Les options thérapeutiques sont nombreuses et bien documentées :
- certains changements de mode de vie, dont l’évitement de certains aliments ou boissons qui peuvent être irritants pour la vessie (alcool, caféine notamment) ;
- le contrôle de la glycémie pour les personnes atteintes de diabète ;
- la gestion médicamenteuse et nutritionnelle de la constipation ;
- l’utilisation de cathéters et du sondage intermittent qui permet au patient de vider sa vessie à la demande ; cette option est à préférer au cathétérisme continu ;
- certains médicaments permettent également de traiter la vessie neurogène ;
- les injections de toxine botulique A (Botox®) dans la vessie ou les sphincters urinaires ;
- dans les cas plus sévères, la chirurgie d’augmentation de la vessie (cystoplastie d’augmentation) qui vise à réduire la pression interne de la vessie et à augmenter sa capacité à stocker l’urine ou la réalisation d’une stomie urinaire.
Conserver la continence pour préserver la qualité de vie : l’aidant et le soignant mettent en œuvre des thérapies conservatrices qui trouvent tout leur intérêt aussi, dans l’incontinence neurologique. Chez la plupart des patients, le problème de stockage des fluides, conduisant à l’incontinence, est associée à un problème de vidange, les deux facteurs doivent donc être considérés et gérés simultanément : en pratique,
contrôler l’apport hydrique et adapter les mictions en fonction
constitue une condition du succès du traitement.
Le rôle de l’aidant est primordial, il dispose de tout un arsenal de mesures du quotidien pour atteindre ces 2 objectifs. Un programme de réadaptation individuelle, basé sur un certain nombre de données, dont le journal des mictions, le volume de la vessie, les apports de liquide, le volume urinaire résiduel post-mictionnel mais aussi l’état mental et les capacités cognitives du patient, peut combiner différentes mesures, parmi lesquelles :
- l’aide à la miction, à la toilette,
- la reprise d’une routine mictionnelle soit la mise en place d’horaires réguliers pour aller aux toilettes (dont juste après le lever, après chaque repas, environ toutes les 2 heures au cours de la journée),
- la vigilance à l’égard des signes d’appel de la personne et des signes d’urgence des mictions,
- un apport limité de boissons avant le coucher,
- l’optimisation et « le désencombrement » de l’accès aux toilettes,
- l’absence de limite donnée au temps passé aux toilettes,
- l’installation de barres de maintien ou autres aménagements facilitant la miction,
- l’éducation au sondage intermittent et la surveillance des infections urinaires,
- le contrôle des toilettes en vérifiant qu’il y a eu miction,
- le choix de vêtements faciles à enlever et à nettoyer, la prévision de vêtements de rechange pour les sorties,
- le choix de sous-vêtements absorbants, de protège-slips et de protections qui peut également, dans certaines situations, contribuer à prévenir la macération et les odeurs, préserver la santé de la peau et l’état des vêtements,
- le recours à des dispositifs à usage unique, comme des draps jetables ou des protège-matelas.
Ces mesures simples, qui ne sont pas très éloignées de celles recommandées pour les jeunes enfants avec handicap mental ou troubles sensoriels, vont permettre d’améliorer le fonctionnement au quotidien de la personne, mais aussi de l’aidant et de son entourage. Elles contribuent à restaurer une qualité de vie souvent très altérée, avec les effets de la maladie neurologique et de l’incontinence à la fois sur la fonction physique, le bien-être émotionnel et les relations sociales. Les études relèvent ainsi que
la qualité de vie des patients incontinents neurologiques est considérablement réduite,
par rapport à celle de patients atteints d’incontinence urinaire « en général ».
Ainsi, au-delà de la prise en charge organique par des traitements médicamenteux, rééducatifs ou chirurgicaux, c’est aux aidants et aux soignants que revient ce rôle fondamental de soutien et d’accompagnement au quotidien.
« Avant toute mesure thérapeutique, il s’agit de se montrer indulgent et bienveillant au quotidien », soulignent les experts.
Sources :
- NIH National Library of Medicine Urinary Incontinence in Neurological Disease: Management of Lower Urinary Tract Dysfunction in Neurological Disease
- Neurourology and Urodynamics 2010 DOI 10.1002/nau Neurologic Urinary Incontinence
- Health and Quality of Life Outcomes 2013 DOI : 10.1186/1477-7525-11-13 Health-related quality of life and economic impact of urinary incontinence due to detrusor overactivity associated with a neurologic condition: a systematic review
- The Journal of Urology 2007 DOI :10.1016/j.juro.2007.08.006 The Relative Importance of Health Related Quality of Life and Prescription Insurance Coverage in the Decision to Pharmacologically Manage Symptoms of Overactive Bladder
- Quality of Life Research 2010 DOI : 10.1007/s11136-010-9590-z Exploring the impact of changes in neurogenic urinary incontinence frequency and condition-specific quality of life on preference-based outcomes
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