Cette recherche, menée à l’Institut Pasteur révèle une résurgence significative « post-COVID » de la méningococcie invasive, liée à des sérogroupes de méningocoques moins fréquents avant la pandémie, cette résurgence touchant principalement les jeunes âgés de 16 à 24 ans. Ces données, publiées dans le Journal of Infection and Public Health, constituent un exemple de résurgence rapide d’une activité bactérienne (ici de la bactérie Neisseria meningitidis) chez une population naïve, privée d’exposition avec les mesures de distanciation sociale prises durant la pandémie.
L’équipe de scientifiques utilise ici la base de données du Centre national de référence des méningocoques pour retracer l’évolution des cas de méningococcie invasive en France entre 2015 et 2022. Les résultats de cette analyse qui précise les formes de la résurgence devraient inciter à l’adaptation de la stratégie vaccinale contre cette maladie mortelle.
En cause dans cette résurgence bactérienne, les mesures d’hygiène comme le port du masque et la distanciation sociale imposées par la pandémie COVID, qui ont d’ailleurs contribuer à faire chuter l’incidence de nombreuses autres infections, virales ou bactériennes, comme la méningococcie invasive dont le nombre d’infections a chuté de plus de 75 % en 2020 et 2021.
Plusieurs recherches avaient d’ailleurs fait l’hypothèse, ou démontré, la résurgence de certaines infections, après la levée de ces mesures de distanciation sociale liée au COVID. L’un des auteurs principaux, Muhamed-Kheir Taha, chef de l’unité des infections bactériennes invasives à l’Institut Pasteur souligne ainsi : « Pendant la pandémie de Covid-19, 2 théories ont émergé : la première était que cet effet positif perdurerait et que les méningocoques cesseraient de circuler à long terme. La seconde était qu’il y aurait une résurgence rapide de l’activité bactérienne au sein d’une population naïve ». Ces travaux confirment la deuxième hypothèse.
L’étude détaillée de l’évolution de la maladie entre 2015 et 2022, aboutit à un constat clair :
une résurgence sans précédent des méningococcies invasives à l’automne 2022 ;
- à l’automne 2023, un nombre de cas plus élevé qu’avant la pandémie ;
- vs 298 cas enregistrés entre janvier et septembre 2019, 421 cas ont été déjà recensés entre janvier et septembre 2023, ce qui représente une hausse de 36%, alors que le pic hivernal n’est pas encore arrivé ;
- l’incidence pour la même période en 2021 était de 53 cas.
Quelles explications ?
- Une immunité générale plus faible car les souches ont moins circulé durant la période pandémique ;
- une diminution de la vaccination : la vaccination contre la méningite C a ainsi chuté de 20 % lors du premier confinement ;
- une insuffisance d’immunité face à des bactéries dont le génome est en constante évolution.
Ainsi, les scientifiques précisent que, depuis la pandémie, les sérogroupes méningococciques W et Y marquent une résurgence plus élevée par rapport aux autres sérogroupes. La tranche d’âge la plus touchée sont les jeunes de 16 à 24 ans.
« C’est comme si l’épidémie de COVID avait réinitialisé tout le système ».
Les auteurs alertent contre une résurgence des méningites qui pourrait encore s’accélérer dans les mois à venir avec l’effet de la grippe saisonnière. Le virus de la grippe créant un contexte favorable au développement des bactéries méningococciques.
En France, seule la vaccination contre la méningite C est obligatoire ; la vaccination contre la méningite B est simplement recommandée chez les nourrissons. Mais il n’existe pas encore de recommandations en population générale pour les sérogroupes Y et W. Les scientifiques travaillent aujourd’hui avec la Haute Autorité de Santé (HAS) à l’adaptation de la stratégie vaccinale.
Source: Journal of Infection and Public Health 12 oct, 2023 DOI : 10.1016/j.jiph.2023.10.001 The rapid rebound of invasive meningococcal disease in France at the end of 2022
Lire aussi :
Laisser un commentaire