Ces nouvelles données publiées dans la revue Acta Psychiatrica Scandinavica par une équipe de l’Université d’Aarhus (Danemark) montrent que fumer augmente significativement le risque de dépression. Cette augmentation est même ici évaluée à de plus de 100 %. C’est donc une nouvelle bonne raison, complémentaire, pour arrêter de fumer.
Chez certains fumeurs, fumer une cigarette peut procurer une sensation immédiate de calme et de détente, cependant ce tabagisme a de graves conséquences à long terme sur la santé mentale aussi. Ce danger, encore moins documenté, n’est pas encore développé sur les messages d’avertissement figurant sur les paquets de cigarettes, pourtant ces dernières années, des recherches de plus en plus nombreuses ont suggéré cette forte corrélation entre le tabagisme et la maladie mentale.
Est-ce le tabagisme qui provoque la dépression ?
La question du sens de la relation se pose à nouveau : est-ce le tabagisme qui provoque la dépression, ou fume-t-on pour tenter d’apaiser les symptômes d’un trouble mental latent ?
L’équipe du Centre de génétique de l’Université d’Aarhus nous apporte une première réponse, suggérant que le tabagisme peut tout à fait conduire à la dépression et au trouble bipolaire. L’auteur principal, le Dr Doug Speed est même catégorique : « le tabagisme survient généralement avant la maladie mentale. En fait, bien avant. En moyenne, nos participants ont commencé à fumer à l’âge de 17 ans et n’ont été généralement suivis pour un trouble mental qu’après cet âge de 17 ans ».
L’étude a analysé les données de santé de 350.000 participants. L’analyse ne pouvait en effet que s’effectuer sur de très gros volumes de données, afin de pouvoir prendre en compte les très nombreux facteurs de trouble mental-ou de confusion possible. Les chercheurs se sont donc tournés vers la UK Biobank, l’une des plus grandes bases de données au monde sur la santé humaine. La base de données contient des données génétiques sur plus d’un demi-million de personnes, ces données étant également complétées par de nombreuses autres informations sur la santé et le mode de vie. L’analyse confirme :
- la corrélation entre tabagisme et dépression ;
- la survenue du tabagisme généralement bien avant la maladie mentale : ainsi, les participants fumeurs ont commencé, en général, à fumer à l’âge de 17 ans, bien avant le diagnostic d’un trouble mental ;
- les gènes déterminent dans une large mesure la susceptibilité au tabagisme : si vous devenez fumeur : ainsi, à l’appui de cette conclusion, les chercheurs précisent que 90 % des participants qui fumaient encore ou avaient fumé ont commencé avant l’âge de 20 ans ; par ailleurs, l’examen des données génétiques de ces participants permet d’identifier et de retrouver un certain nombre de variantes génétiques récurrentes ;
- ces données sont en ligne avec celles de précédentes études menées chez des jumeaux : « nous pouvons estimer que les gènes peuvent expliquer 43 % du risque de devenir fumeur » ;
- le risque est enfin plus élevé lorsque les parents des participants ont été fumeurs et ont transmis certains gènes.
Enfin, ces « gènes liés au tabagisme » sont associés à un risque accru de troubles mentaux.
On conclura donc a minima à une forte association entre tabagisme et dépression, avec une autre explication biologique possible : fumer provoque une inflammation du cerveau, ce qui, à long terme, peut endommager certaines parties du cerveau et donc accroître le risque de troubles mentaux.
Source: Acta Psychiatrica Scandinavica 23 Aug, 2023 DOI : 10.1111/acps.13601 Using polygenic risk scores to investigate the evolution of smoking and mental health outcomes in UK biobank participants
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