Cette étude menée à l’Université de Pittsburgh met en lumière la question fondamentale de savoir comment les virus -précisément le polyomavirus à cellules de Merkel (MCV)- remplacent le système de réplication de l’ADN des cellules hôtes et provoquent ainsi des maladies, ici le carcinome à cellules de Merkel, un cancer de la peau agressif. Ces travaux, publiés dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine (PNAS), permettent donc de mieux comprendre comment le MCV se réplique et apportent déjà de nouveaux indices précieux sur le développement de ce cancer de la peau hautement mortel.
L’un des auteurs principaux, le Dr Patrick Moore, professeur émérite de microbiologie et de génétique médicale à la Pitt School of Medicine commente ces travaux : « Cela donne également un aperçu du mode d’action d’autres virus cancérigènes et explique aussi pourquoi certains virus ne causent pas de cancer. À l’avenir, cela pourrait nous aider à développer de nouvelles thérapies ou de nouveaux vaccins contre les cancers causés par une infection ». Le Dr Yuan Chang, auteur principal également de l’étude, professeur de pathologie a découvert le MCV en 2008. Alors que la plupart des adultes hébergent ce virus, celui-ci reste généralement inoffensif- mais dans certains cas rares provoque donc un carcinome à cellules de Merkel.
L’étude se concentrée sur la réplication du MCV à l’aide d’un instrument appelé C-trap et d’une technique appelée SMADNE. Le C-trap nous permet de regarder les protéines se lier à une seule molécule d’ADN en temps réel sous forme de petits points de lumière. « C’est comme regarder un film au lieu de regarder une photo ». L’analyse révèle que :
- avec le MCV, certaines mutations peuvent entraîner l’insertion de tout le code génétique, ou génome, du virus dans le génome de son hôte, provoquant une croissance et une division sans inhibition des cellules auparavant normales pour devenir cancéreuses ;
c’est ainsi que le virus « surpasse » la réplication cellulaire normale.
Vers de nouvelles thérapies antivirales : ces observations pourraient permettre de développer de nouveaux traitements, moins pour le MCV généralement inoffensif, que contre des virus étroitement apparentés (JC et BK) qui touchent notamment les patients transplantés ou pour d’autres virus cancérigènes. JC peut également être responsable de leuco-encéphalopathie multifocale progressive chez les personnes vivant avec le VIH, BK peut notamment induire des cystites hémorragiques et des néphropathies avec risque de rejet de greffe chez les transplantés rénaux. En plus du MCV, 6 autres virus humains sont connus pour causer le cancer, dont le papillomavirus humain (HPV) qui cause le cancer du col de l’utérus et de la tête et du cou, et le virus de l’herpès du sarcome de Kaposi qui cause un type de cancer qui se forme dans la paroi des vaisseaux sanguins et lymphatiques.
Ces travaux apportent en effet une nouvelle compréhension de la réplication.
« Les virus sont comme de minuscules robots, avec des mécanismes très complexes qui leur permettent de s’adapter à leur environnement, à la cellule hôte et de savoir s’il est préférable de passer à l’état latent ou à la réplication. Comprendre comment ils se répliquent est essentiel pour développer des médicaments ou des vaccins antiviraux sûrs et efficaces qui ciblent ces protéines dans les cellules cancéreuses, notamment ».
Source: Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) 17 July, 2023 DOI: 10.1073/pnas.2308010120 Unlicensed origin DNA melting by MCV and SV40 polyomavirus LT proteins is independent of ATP-dependent helicase activity
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