La dépendance à l’alcool à l’adolescence a déjà été associée à des problèmes de développement du cerveau, cette équipe de l’University College London (UCL) révèle pour la première fois son association avec un risque de dépression un peu plus tard dans la vie. En d’autres termes, suggère cette étude publiée dans le Lancet Psychiatry, la dépendance à l’alcool prépare le cerveau à développer une dépression, et parfois dès le milieu de la vingtaine.
Les signes d’alcoolodépendance comprennent l’incapacité à s’arrêter de boire, une incapacité à répondre aux attentes normales et à fonctionner normalement en raison de la consommation d’alcool et un besoin de boire après une activité intense, ainsi qu’une perte de mémoire liée à la consommation d’alcool. « l’alcoolodépendance à l’adolescence ou, plus largement, les habitudes de consommation problématiques pourraient être un signe avant-coureur de futurs problèmes de santé mentale.
Par conséquent, aider les jeunes à modérer leur consommation pourrait avoir de grands avantages à long terme en Santé publique », écrivent les chercheurs de l’UCL qui ont analysé, avec des collègues de l’Université de Bristol, un vaste ensemble de données longitudinales pour identifier ce lien.
L’étude a suivi ainsi 3.902 participants de l’étude de cohorte Children of the 90s (Avon Longitudinal Study of Parents and Children – ALSPAC), une cohorte de parents et d’enfants nés dans le sud-ouest de l’Angleterre en 1991 et 1992, qui ont répondu à plusieurs enquêtes à intervalles réguliers. Les chercheurs ont donc pris en compte la consommation d’alcool et les signes de consommation problématique, ou de dépendance, à l’âge de 18 ans, et la dépression 6 ans plus tard à l’âge de 24 ans.
L’analyse révèle que :
- les participants dépendants à l’alcool à 18 ans (ou entre 17 et 22 ans) sont plus susceptibles de souffrir de dépression à l’âge de 24 ans ;
- un score de zéro sur l’échelle de dépendance à l’alcool à 18 ans est associé à un risque de dépression de 11 % à 24 ans, vs 15 % pour un score de 1 sur l’échelle ;
- une augmentation de 0 à 1 sur l’échelle de dépendance à l’alcool représente une augmentation de 28 % du risque de ne pas être capable d’arrêter de boire une fois que l’on a commencé et une augmentation de 33 % du risque d’incapacité à « fonctionner » normalement ;
- la relation vaut toujours après prise en compte des facteurs de confusion possibles dont la consommation d’autres substances ce qui suggère fortement -sans la démontrer- une relation causale entre la dépendance à l’alcool et la dépression ultérieure ;
- les niveaux de consommation seuls ne sont pas associés à ce risque accru de dépression,
il s’agit bien ici de la dépendance à l’alcool et pas seulement, de sa consommation.
L’un des auteurs principaux, le Dr Gemma Hammerton de l’Université de Bristol ajoute que si la consommation d’alcool à elle seule, à l’adolescence, ne semble pas augmenter le risque de dépression, plus tard dans la vie, une consommation excessive d’alcool est sans aucun doute un facteur précurseur de risque d’alcoolodépendance…
En pratique, l’alcoolodépendance, chez les jeunes, est associé au risque de dépression plus tard dans la vie, et les interventions de prévention, y compris en santé mentale, devraient prendre également en compte ce facteur de risque et cibler la consommation problématique d’alcool, en particulier chez les jeunes. Mais pas seulement.
Enfin, les auteurs ajoutent que ces résultats concordent avec ceux d’une autre étude récente menée également par l’UCL mais auprès d’adultes et qui montrait que la consommation problématique d’alcool est également associée à un risque accru de tentative de suicide ou d’automutilation.
Source: The Lancet Psychiatry 1 June, 2023 DOI: 10.1016/S2215-0366(23)00138-4 The association of alcohol dependence and consumption during adolescence with depression in young adulthood, in England: a prospective cohort study
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