Cette étude fait progresser la recherche de marqueurs biologiques qui prédisent le risque de dépression post-partum : précisément, des modifications de la communication extracellulaire de l’ARN retrouvées chez ces femmes qui développent une dépression post-partum, expliquent pourquoi elles sont incapables d’éliminer efficacement certains composants cellulaires vieillissants et défectueux, pouvant favoriser la dépression. Cette altération du processus d’autophagie, décrit dans la revue Molecular Psychiatry, suggère aussi que certains médicaments qui ciblent la même caractéristique dans les maladies neurodégénératives, pourraient être repositionnés pour prendre en charge ce type de dépression.
1 « jeune » mère sur 9 souffre de dépression post-partum, une condition caractérisée par des périodes de tristesse, de solitude et parfois d’incapacité à prendre soin de son nouveau-né. « La dépression post-partum entraîne ainsi de nombreux résultats négatifs dont, chez les mères, un risque accru de suicide, et chez les bébés, des perturbations du développement cognitif, émotionnel et social. Pouvoir identifier les mères les plus à risque avant la naissance, permettrait de prévenir ces événements indésirables », rappelle l’un des auteurs principaux, le Dr Sarven Sabunciyan, professeur de pédiatrie à la Johns Hopkins University.
Cependant, en dépit de nombreuses recherches depuis des décennies, il n’a pas été possible à ce jour, d’identifier des marqueurs génétiques ou d’autres marqueurs biologiques de la dépression post-partum.
Un processus déficient d’autophagie dans le cerveau maternel ?
Par ailleurs, des changements dans la communication extracellulaire de l’ARN, une voie de signalisation cellulaire récemment mise en lumière, ont déjà été associés à la naissance prématurée, au diabète gestationnel, à une hypertension artérielle chez la mère ou prééclampsie, ainsi qu’à d’autres complications de la grossesse.
L’étude a donc analysé des échantillons de sang de 42 mères souffrant de dépression post-partum et spécifiquement le contenu en ARN messager (ARNm) des vésicules extracellulaires (EV) contenant du matériel génétique essentiel à la communication entre les cellules. Pendant la grossesse, ce système de communication s’intensifie pour répondre aux besoins d’implantation et de croissance de l’embryon. Le placenta de la mère libère également de l’ARN vital pour le développement du système immunitaire qui protège le fœtus contre les virus.
L’équipe a recherché l’existence de tels changements de communication extracellulaire durant la dépression. Les altérations identifiées suggèrent que les femmes qui développent une dépression post-partum ont un processus d’autophagie déficient, un dysfonctionnement similaire étant retrouvé dans le cerveau des patients atteints de la maladie d’Alzheimer et de la maladie de Parkinson. Précisément, l’analyse révèle que :
- les niveaux de communication de l’ARN extracellulaire pendant la grossesse et la période post-partum sont considérablement modifiés chez les femmes qui développent une dépression post-partum ;
- ainsi, les niveaux de 2.449 ARNm sont modifiés (1.010 augmentés et 1.439 réduits) ;
- en moyenne, la différence est près du double dans les niveaux d’ARNm individuels entre les groupes de femmes souffrant de dépression, et les mères exemptes de dépression ;
- la grande majorité de ces changements se produisent pendant la grossesse, ce qui suggère qu’il serait encore possible de prédire et prévenir la dépression ;
- les niveaux d’ARNm contenus dans les vésicules extracellulaires, associés à l’autophagie sont très réduits chez les femmes qui vont développer une dépression post-partum ; ce qui suggère qu’elles ne sont plus en mesure d’éliminer les fragments cellulaires, issus de cellules endommagées ou défectueuses ;
- les ARNm contenus dans les vésicules extracellulaires dans la dépression post-partum proviennent principalement de globules blancs (monocytes et macrophages).
Traiter la dépression post-partum avec les mêmes médicaments ? L’étude suggère que la dépression post-partum pourrait être traitée à l’aide de médicaments qui induisent l’autophagie.
Au-delà, si ces modifications qui constituent une signature biologique globale de la dépression post-partum étaient confirmées par d’autres études, la signature pourrait donner lieu au développement d’un test sanguin permettant d’identifier les femmes enceintes à risque élevé de dépression post-partum.
« Si nous pouvons identifier rapidement ces femmes à risque et leur proposer un traitement approprié et précoce, nous serons probablement en mesure de prévenir de nombreux effets graves de la dépression post-partum ».
Source: Molecular Psychiatry 22 Sept, 2022 DOI: 10.1038/s41380-022-01794-2 Altered extracellular mRNA communication in postpartum depression is associated with decreased autophagy
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