Quels sont les grands changements dans la prise en charge de l’anémie et comment ces changements affectent-ils les résultats des patients insuffisants rénaux ? Cette étude d’une équipe de la Louisiana State University révèle que l’utilisation plus circonstanciée des agents stimulant l’érythropoïèse est aujourd’hui associée à des taux d’hémoglobine plus faibles et à une réduction du risque d’événements cardiovasculaires indésirables majeurs, de mortalité et d’accident vasculaire cérébral (AVC) chez les adultes sous hémodialyse, mais… avec un risque plus élevé de crise cardiaque. Des données publiées dans Clinical Journal of the American Society of Nephrology (CJASN) qui incitent, écrivent les auteurs, à prendre en compte, dans la décision de traitement, « la voix des patients » y compris en ce qui concerne leurs préoccupations de qualité de vie.
En 2011, aux Etats-Unis, les recommandations de prise en charge de l’anémie ont été modifiées avec un recours plus restreint aux agents stimulant l’érythropoïétine. Cette étude nous propose un bilan des avantages et des inconvénients de ces modifications pour les patients insuffisants rénaux, sous hémodialyse.
L’anémie est caractérisée par une pénurie de globules rouges sains qui transportent l’oxygène vers les tissus de l’organisme, un problème courant chez les personnes atteintes de maladie rénale. Les agents stimulant l’érythropoïèse incitent la moelle osseuse à produire des globules rouges et permettent donc, « en théorie » de résoudre le problème. Cependant, de récentes études ont établi un lien entre ces médicaments et un risque plus élevé de problèmes cardiovasculaires.
Réévaluer le rapport bénéfice – risque des agents stimulant l’érythropoïèse chez les patients insuffisants rénaux
L’étude : afin d’évaluer les effets à long terme de ces changements sur les soins de l’anémie et les résultats cliniques chez les patients souffrant d’insuffisance rénale et sous hémodialyse, l’équipe du Dr Haesuk Park de l’Université de Floride, Gainesville a analysé les données du United States Renal Data System de janvier 2006 à décembre 2016. Cette très large analyse révèle que :
- sur 481.564 patients insuffisants rénaux sous hémodialyse, l’utilisation d’agents stimulant l’érythropoïèse a diminué de 84,8 pour 1.000 personnes à la suite des changements de recommandations ;
- le recours à la transfusion sanguine a rapidement augmenté de 8,34 pour 1.000 patients en avril 2012 puis a progressivement diminué ;
- le taux d’hémoglobine des patients (la protéine des globules rouges responsable du transport de l’oxygène) a chuté : le pourcentage de patients ayant une hémoglobine > 11 g/dL est passé de 68 % en janvier 2006 à 28 % en décembre 2016, alors que le taux des patients présentant une hémoglobine < 9 g/dL est passé de 5 % à 9 % ;
- à la suite des modifications des recommandations, les risques d’AVC, de mortalité toutes causes confondues, de mortalité cardiovasculaire et d’insuffisance cardiaque ont été réduits de 17 %, 13 %, 19 % et 14 %, respectivement ;
cependant, le risque de crise cardiaque s’est accru de 4 %.
La diminution du recours aux agents stimulant l’érythropoïétine a donc conduit à de meilleurs résultats cliniques dans l’ensemble, mais a accru significativement le risque d’infarctus aigu du myocarde chez les adultes sous hémodialyse.
Les auteurs appellent donc à une nouvelle étude longitudinale et à revoir éventuellement les recommandations de prise en charge.
Source: Clinical Journal of the American Society of Nephrology (CJASN) 19 May, 2019 DOI : 10.2215/CJN.14361121 Medicare Bundled Payment Policy on Anemia Care, Major Adverse Cardiovascular Events, and Mortality Among Adults Undergoing Hemodialysis
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