Cette observation du développement du cerveau chez la souris, par cette équipe de neurologues de l’Université de l’Ohio, offre un aperçu sans précédent non seulement du développement cérébral mais aussi du développement des maladies neurologiques. Ces travaux révèlent notamment, dans la revue Science Advances, l’interaction très précoce entre les cellules cérébrales neuromodulatrices et les cellules corticales qui, en cas d’anomalie, induit le développement de troubles neurologiques comme l’autisme ou l’épilepsie.
Au coeur de ce processus, le neurotransmetteur acétylcholine, libéré par les cellules du système cholinergique (neurones cholinergiques), initie la ramification, ou l’arborescence des axones sur les cellules chandelier (ou super-neurones) du cortex (cellules corticales) et cette ramification est un préalable à l’efficacité de ces super-neurones à exercer leurs effets inhibiteurs pour contrer l’excitation dans d’autres cellules. Ces travaux montrent, pour la première fois, que les deux types de cellules, neuromodulatrices et corticales sont tous deux impliqués non seulement dans un développement cérébral sain, mais aussi dans le développement de troubles tels que la schizophrénie, l’épilepsie et l’autisme, très tôt dans la vie.
Les expériences précoces peuvent bouleverser cette interaction menant aux connexions
L’étude menée sur la souris peu après la naissance apporte des informations précieuses sur la façon dont les expériences précoces de la vie peuvent affecter les schémas de câblage et de réseaux neuronaux dans le cerveau, ce qui peut déclencher une maladie neurologique plus tard dans la vie.
L’interaction de 2 types de cellules cérébrales est au cœur de ces travaux : ces 2 types de neurones ont déjà été documentés comme liés à des troubles neurologiques chez l’adulte : il s’agit :
- des neurones cholinergiques d’un système de modulation niché profondément dans le cerveau ;
- de neurones « chandelier » dans le cortex, la couche la plus externe du cerveau, qui neutralisent l’excitation dans d’autres cellules via une action inhibitrice.
Les cellules modulatrices envoient des signaux à longue portée au cortex pour influencer à distance l’activité des cellules corticales.
Ces 2 types de cellules communiquent en effet très tôt dans le développement du cerveau. Les chercheurs montrent ici qu’un composé chimique, le neurotransmetteur acétylcholine, libéré par les cellules modulatrices initie la ramification des axones, ces extensions longues et fines des cellules nerveuses qui transmettent les signaux, sur les cellules corticales et cette « arborisation » dicte l’efficacité des cellules du cortex à faire leur travail inhibiteur. cette interaction entre ces 2 types de cellules distants est en effet confirmée par une série d’expériences : l’élimination des récepteurs qui se lient à l’acétylcholine et la diminution de l’activité des neurones cholinergiques réduisent le développement des ramifications, et l’excitation des neurones cholinergiques conduit à une ramification plus étendue. De plus,
la découverte de cette interaction cellulaire dans le cerveau postnatal ouvre la voie à une meilleure compréhension des maladies neurologiques,
et suggère l’importance des événements intervenus à la petite enfance : « On sait que des expériences anormales au début de la vie peuvent avoir un impact sur les sensations et le comportement futurs des enfants. Cette découverte contribue à expliquer ce type de mécanisme », explique l’auteur principal, le Dr Hiroki Taniguchi, professeur agrégé de pathologie à l’Ohio State University.
« Cette étude apporte de nouvelles informations sur le développement du cerveau et la pathologie cérébrale et sensibilise à l’importance cruciale des événements qui surviennent au cours du développement ou au début de la vie, ces expériences pouvant modifier l’activité du système de modulation et, par conséquent, le « câblage » du réseau cortical ».
« Nous ignorions jusque-là comment les systèmes neuromodulateurs régulent les circuits corticaux – pourtant les deux systèmes étaient bien impliqués dans les maladies du cerveau. Il nous faut maintenant déterminer quel type d’environnement, d’expérience ou d’état émotionnel peut avoir un impact sur le développement des neurones inhibiteurs corticaux ».
Source: Science Advances 9 March, 2022 DOI: 10.1126/sciadv.abe7192 Neuromodulatory control of inhibitory network arborization in the developing postnatal cortex
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