Cette équipe de cardiologues de l’Université Johns Hopkins s’inspire du rôle des nerfs cardiaques dans les cœurs postnatals où les neurones sympathiques influencent les gènes de l'horloge pour réguler la progression du cycle cellulaire et la multiplication des cellules du muscle cardiaque. Ainsi, leur étude préclinique, publiée dans la revue Science Advances, suggère que la manipulation de certaines cellules nerveuses pourrait contribuer à régénérer le muscle cardiaque perdu, après une crise cardiaque ou d'autres troubles et lésions cardiaques.
Car les cellules du muscle cardiaque humain cessent de se multiplier après la naissance, rendant toute lésion cardiaque plus tard dans la vie permanente, réduisant la fonction et entraînant une insuffisance cardiaque. «Peu de temps après la naissance, les mammifères, y compris les humains et les souris, cessent de produire des cellules du muscle cardiaque. Et contrairement à d'autres organes, comme le foie, le cœur ne peut pas se régénérer après avoir été endommagé. Nous montrons qu'il est possible de manipuler les nerfs et/ou les gènes circadiens, soit par le biais de médicaments ou de thérapies géniques, pour augmenter le nombre de cellules cardiaques après la naissance », écrivent les chercheurs de Baltimore dans leur communiqué.
Les chercheurs apportent les preuves que la manipulation de certaines cellules nerveuses ou des gènes qui contrôlent ces processus de renouvellement avant la naissance, pourrait déclencher, plus tard dans la vie aussi, la formation de nouvelles cellules du muscle cardiaque et restaurer la fonction cardiaque.
Un nouvel éclairage sur la façon dont certains neurones régulent les cellules du muscle cardiaque
On sait depuis longtemps que les cellules nerveuses participent à réguler la fonction cardiaque, mais leur rôle et leur impact au cours du développement cardiaque et leur effet sur la croissance des cellules musculaires restent mal compris.
L’étude examine le rôle des neurones dits sympathiques sur le développement cardiaque après la naissance et montre, qu'en les manipulant, il pourrait y avoir un potentiel énorme pour réguler le nombre total de cellules musculaires dans le cœur, « et même bien après la naissance », réaffirme le Dr Emmanouil Tampakakis, professeur de médecine à l'Université Johns Hopkins.
Les cellules nerveuses qui composent le système nerveux sympathique (SNS) contrôlent les processus automatiques du corps tels que la digestion, la fréquence cardiaque et la respiration. Le SNS est généralement associé à des réponses de « combat ou fuite », soit à la réponse générale du corps à des situations alarmantes, stressantes ou menaçantes. L'équipe a créé un modèle de souris génétiquement modifié en bloquant les neurones cardiaques sympathiques dans les embryons de souris en développement et a analysé les moteurs de la prolifération des cellules du muscle cardiaque au cours des deux premières semaines de vie après la naissance. Cette observation montre :
- une diminution significative de l'activité d'une paire de gènes – les gènes period 1 et period 2 déjà connus pour contrôler le cycle circadien ;
- l’extinction de ces 2 gènes circadiens dans les embryons de souris induit une augmentation de la taille du cœur néonatal et une augmentation du nombre de cardiomyocytes, ou cellules du muscle cardiaque, jusqu'à 10 % : cela suggère que l'effet des nerfs sympathiques sur les cellules du muscle cardiaque est probablement médié par ces deux gènes circadiens ou « horloges » ;
- en résumé, en manipulant les nerfs sympathiques et les gènes de l'horloge – une technique appelée neuromodulation –il serait possible d’induire le cœur à mieux réagir aux blessures.
Les personnes qui survivent à une crise cardiaque peuvent perdre jusqu'à un milliard de cellules musculaires cardiaques, mais certaines études ont suggéré que les cœurs ont tendance à récupérer plus rapidement après une crise, lorsque le nombre total de cellules est plus élevé au départ.
L’étude réaffirme le concept de la neuromodulation, un concept assez nouveau en cardiologie pour de nouvelles stratégies de régénération cardiaque. D'autres expériences sont en cours pour caractériser les différents groupes de neurones qui alimentent le cœur et pour démontrer comment ces nerfs se développent et s'ajustent au fil du temps et après une lésion cardiaque.
Source : Science Advances 2 Dec, 2021 DOI: 10.1126/sciadv.abh4181 Heart neurons use clock genes to control myocyte proliferation
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