Cette toute première recherche à avoir regardé l’association entre la consommation de cannabis et la maladie COVID-19 révèle que la consommation problématique de cannabis est corrélée à des résultats COVID-19 plus médiocres. Les chercheurs de la Washington University à St. Louis incitent ici leurs confrères, dans la revue Biological Psychiatry Global Open Science, à porter une attention particulière aux patients à usage probélématique et à les alerter sur un risque de formes plus sévères de COVID-19.
La consommation problématique du cannabis est peu fréquemment évoquée, cependant elle est dûment référencée par le DSM V (5e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) comme « trouble d'utilisation du cannabis et de substances apparentées », avec pour principaux symptômes une altération du fonctionnement ou une souffrance cliniquement significatives. Ainsi, parmi les signes cliniques de ce trouble d'utilisation du cannabis, figurent outre une consommation en quantité ou sur une durée importantes, la difficulté de contrôler son utilisation, le temps excessif passé à s’en procurer, le « craving » ou désir incontrôlable d’en consommer, le manquement récurrent à des obligations majeures (travail, étude, responsabilités familiales), l’incidence de problèmes sociaux ou relationnels, une consommation qui aboutit à des comportements à risque, et une difficulté au sevrage.
« Alors que les attitudes socioculturelles et les lois entourant la consommation de cannabis deviennent de plus en plus permissives et que COVID-19 continue de se propager, nous devons mieux comprendre comment la consommation de cannabis ainsi que les formes de consommation lourdes et problématiques sont associées aux résultats de la maladie COVID », écrit l’auteur principal, Ryan Bogdan, professeur agrégé au Département des sciences psychologiques et cérébrales de la Washington University.
L'usage « problématique » de cannabis, un facteur de risque de COVID plus sévère ?
Alors que le diabète, l'obésité, certaines comorbidités ainsi que des antécédents de tabagisme sont rappelés par les chercheurs comme des facteurs de risque de mauvais résultats du COVID-19, l’équipe américaine suggère que le trouble de l'utilisation du cannabis devrait être ajouté à la liste de ces facteurs. Ainsi, l’étude révèle :
- une surreprésentation de la prédisposition génétique au trouble de l’usage du cannabis chez les personnes atteintes de formes sévères de COVID- 19.
Prédisposition génétique au cannabis et risque de COVID sévère : précisément, les chercheurs utilisent ici des modèles épidémiologiques génétiques pour conclure que la prédisposition génétique au trouble de l’usage du cannabis est bien liée au risque de forme sévère de COVID-19, soit, précisément l’hospitalisation en cas de COVID.
Les chercheurs ont travaillé sur plusieurs ensembles de données, dont un premier ensemble de 357.806 personnes, dont 14.080 avec trouble de l’usage, une seconde base de 1.206.629 personnes, dont 9.373 hospitalisées pour COVID. Les chercheurs ont également examiné 7 millions de variantes génétiques pour évaluer l'association entre le trouble d’usage du cannabis et le COVID sévère.
En analysant chez les personnes portant les variantes de prédisposition, les résultats liés à la maladie COVID, les chercheurs montrent que :
- la susceptibilité génétique à l’usage de cannabis, pèse pour jusqu'à 40% des facteurs de risque génétiquement influencés de risque de forme sévère (dont font partie l'indice de masse corporelle (IMC) et le diabète).
cette association suggère qu'une consommation importante et problématique de cannabis pourrait suggérer une voie de prévention des formes sévères, chez ce groupe de population. En effet, ces résultats impliquent 2 hypothèses :
- la prédisposition au trouble de l’usage du cannabis et la forme sévère de COVID-19 sont dues à un mécanisme biologique commun, comme par exemple, une des conditions inflammatoires qui induisent des symptômes plus sévères de COVID-19 et/ou une dépendance au cannabis ;
- ou bien un processus causal cannabis – forme sévère de COVID-19.
Alors existe-t-il vraiment une relation de causalité directe ? Plus de recherche sera nécessaire. D’autant qu’être porteur de variantes génétiques de prédisposition ne signifie pas obligatoirement consommer du cannabis ou a fortiori développer un trouble de l’usage. On retiendra néanmoins, que l'association génétique ici identifiée entre le trouble de l’usage et la sévérité du COVID-19 est de taille similaire aux corrélations génétiques entre la gravité du COVID-19 et l'IMC, un facteur de risque bien connu pour les présentations COVID-19 sévères.
« Ces données devraient donc être intégrées dans toute stratégie pour vaincre cette maladie », soulignent ces chercheurs.
Source: Biological Psychiatry Global Open Science June 2021 DOI:10.1016/j.bpsgos.2021.06.005 Genetic Liability to Cannabis Use Disorder and COVID-19 Hospitalization
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