Les antibiotiques ne sont pas les seuls médicaments à favoriser l’émergence des antibiorésistances, rappelle cette équipe de l’hôpital universitaire de Tel-Aviv qui répertorie ici les médicaments courants, non antimicrobiens (NAMD) et couramment utilisés qui sont tout autant facteurs de risque de résistance bactérienne aux antibiotiques. De nouvelles données, présentées au Congrès 2021 de la Société européenne de microbiologie clinique et des maladies infectieuses (European Congress of Clinical Microbiology & Infectious Diseases -ECCMID) qui rappellent la nécessité d’un usage raisonné aussi des autres médicaments.
On pense que les bactéries développent une résistance aux antibiotiques en grande partie en raison d'une exposition répétée par le biais d’un usage excessif, à ces mêmes antibiotiques. Cependant, chez la moitié des patients porteurs de bactéries résistantes ce facteur de risque n’est pas identifié. L’explication suggérée est que d’autres médicaments que les antibiotiques, certains anticancéreux notamment, utilisés en chimiothérapie, ainsi que des médicaments des troubles digestifs et cardiaques pourraient également contribuer à cette antibiorésistance.
On sait que les médicaments non antimicrobiens couramment utilisés peuvent provoquer des effets indésirables et avoir un impact significatif sur la composition bactérienne du microbiome intestinal.
3 classes de médicaments couramment prescrits principalement concernées par cette mise en garde :
- Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP), les bêta -bloquants et les antimétabolites
Ces médicaments pourraient notamment conduire à des infections résistantes aux antibiotiques causées par des bactéries de la famille des entérobactéries, associées à un risque plus élevé d’hospitalisation et de décès.
Pour aboutir à ces conclusions, les chercheurs ont analysé les données de 1.807 adultes admis à l’hôpital de Tel-Aviv, entre janvier 2017 et avril 2019, avec un diagnostic d'infection urinaire liée aux entérobactéries. L'utilisation de 19 classes de médicaments non antimicrobiens avant l'admission à l'hôpital a été constatée à partir de l’analyse des dossiers médicaux électroniques. Des organismes résistants aux antimicrobiens ont été identifiés dans plus de la moitié des échantillons d’urine des patients (944/1.807), des organismes multirésistants dans environ un quart des échantillons. L’analyse révèle que l'utilisation de médicaments courants est associée à une résistance accrue aux antimicrobiens, dont :
- les ISRS (inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine) pour le traitement de la dépression ;
- les antipsychotiques typiques utilisés pour traiter les problèmes de santé mentale tels que la schizophrénie ;
- les inhibiteurs du facteur Xa pour la prévention des accidents vasculaires cérébraux chez les patients atteints de fibrillation auriculaire ;
- les IPP (inhibiteurs de la pompe à protons) qui réduisent la production d'acide gastrique ;
- les bêta-bloquants qui aident à traiter les problèmes cardiaques ;
- les antimétabolites (médicaments de chimiothérapie) couramment utilisés pour traiter les cancers et les maladies inflammatoires.
3 classes de médicaments (IPP, bêta-bloquants et antimétabolites) sont plus significativement associées à la résistance aux céphalosporines de troisième génération, au triméthoprime-sulfaméthoxazole et aux fluoroquinolones.
Les antimétabolites semblent avoir le plus fort impact sur la résistance aux antibiotiques.
De nouvelles données qui alertent aussi contre une exposition excessive aux médicaments non antimicrobiens dans ce contexte d’émergence des résistances aux antibiotiques. La recherche se poursuit en particulier pour mieux cerner les effets de certains médicaments, pour lesquels l’échantillon était trop limité.
Source: European Congress of Clinical Microbiology & Infectious Diseases (ECCMID) 9-Jul-2021 Common prescription drugs (not themselves antibiotics) may increase risk of developing antibiotic resistance
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