C’est un grand pas dans le diagnostic précoce de la démence : un simple test sanguin capable de révéler avec précision une neurodégénérescence sous-jacente. Basé sur un biomarqueur unique, une protéine appelée chaîne légère des neurofilaments (NfL), le test permet d’obtenir un premier diagnostic chez les personnes développant des problèmes cognitifs. Développé par une équipe de bioingénieurs et de biologistes du King's College de Londres, ce test sanguin présenté dans la revue Nature Communications est déjà utilisé en routine clinique dans quelques pays européens.
Les niveaux de la protéine NfL dans le sang permet en effet d’identifier, avant l’apparition des premiers symptômes, tout un spectre de maladies neurodégénératives telles que la démence trisomique, les maladies des motoneurones comme la SLA et les démences dont la démence fronto-temporale. Cette recherche précise les seuils de NfL liés à l'âge qui ont cette valeur diagnostique de manière à préparer l’utilisation de ce test en soins primaires.
Un test sanguin non invasif offre un aperçu invasif des troubles cérébraux
« Pour la première fois, nous montrons qu'un biomarqueur unique peut indiquer la présence d'une neurodégénérescence sous-jacente avec une excellente précision. Bien qu'il ne soit pas spécifique à un trouble en particulier, il va être très utile dans le dépistage rapide de la neurodégénérescence en cas de troubles de la mémoire ou d’autres troubles cognitifs et psychiatriques », précise l’un des auteurs principaux, le Dr Abdul Hye du King's College.
Les biomarqueurs actuels utilisés pour identifier les troubles neurodégénératifs sont présents dans le liquide céphalo-rachidien (LCR) dont le prélèvement nécessite une ponction lombaire. Pouvoir détecter la neurodégénérescence à partir d’un biomarqueur sanguin permettrait une procédure moins invasive et plus confortable pour le patient.
NfL, une protéine clé : une caractéristique majeure et irréversible de nombreux troubles neurodégénératifs est l'endommagement de la fibre nerveuse qui entraîne la libération de cette protéine, NfL, qui sous condition de tests ultrasensibles, peut être détectée dans le sang, même à de faibles niveaux. Les niveaux de NfL sont augmentés dans plusieurs troubles neurologiques, contrairement à la protéine tau phosphorylée qui est spécifique de la maladie d'Alzheimer. NfL est donc un marqueur prometteur pour le diagnostic de nombreuses maladies neurodégénératives.
L'étude a examiné 3.138 échantillons du King's College de Londres, de l'Université de Lund et de l'Alzheimer's Disease Neuroimaging Initiative, dont des prélèvements sanguins de témoins exempts de maladies neurodégénératives sans déficience cognitive, de personnes atteintes de troubles cognitifs, de patients atteints du syndrome de Down (Trisomie) et de patients souffrant de dépression. L’analyse montre que :
- les concentrations de NfL dans le sang sont plus élevées chez les patients atteints de troubles neurodégénératifs vs les témoins exempts de problèmes cognitifs, les concentrations les plus élevées étant détectées chez les personnes atteintes de démence trisomique, de maladie des motoneurones et de démence fronto-temporale.
- Si les niveaux sanguins de NfL ne permettent pas de diagnostiquer un trouble en particulier, ils permettent parfois d’apprécier un peu plus précisément la forme de la maladie (atypique, sévère…). De même, les niveaux de NfL s’avèrent particulièrement augmentés chez les adultes trisomiques qui ont une prédisposition génétique à la maladie d'Alzheimer.
Des seuils de concentrations de NfL pour l'usage du test en clinique : les chercheurs britanniques précisent, pour les différentes tranches d’âge, les seuils des concentrations de NfL qui indiquent un risque élevé de neurodégénérescence. Ces seuils liés à l'âge s’avèrent précis à 90 % dans la détection de la neurodégénérescence chez les personnes de plus de 65 ans et précis à 100 % dans la détection de la maladie des motoneurones et de la démence associée au syndrome de Down. Enfin, les seuils de NfL permettent aussi de distinguer les patients atteints de dépression et des patients atteints de troubles neurodégénératifs.
En conclusion, cette équipe londonienne propose une alternative aux tests invasifs et coûteux de détection de la démence. Le test est déjà utilisé en routine dans certains pays européens tels que la Suède ou les Pays-Bas.
« C’est une période passionnante où les tests sanguins non invasifs vont nous apporter un aperçu invasif des troubles cérébraux ».
Source: Nature Communications 7 June, 2021 DOI: 10.1038/s41467-021-23620-z A multicentre validation study of the diagnostic value of plasma neurofilament light
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