« Et si la protéine de pointe n’était pas la bonne cible vaccinale ? », s’était déjà interrogée cette équipe de la Penn State. Ces scientifiques du Scripps Research Institute (La Jolla) prennent la relève et révèlent les détails structurels sur la manière dont les variants du SRAS-CoV-2 échappent à la réponse immunitaire. Leurs données présentées dans la revue Science partagent une même orientation pour de futurs vaccins ou thérapies capables d’offrir une protection plus efficace contre les variants.
Les variantes récentes du coronavirus responsable du COVID-19, le SRAS-CoV-2, présentent toutes une caractéristique commune, leur capacité de propagation rapide. Ces variants portent des mutations qui permettent au virus d'échapper à une partie au moins de la réponse immunitaire induite naturellement (par une infection antérieure par la souche originale) ou par vaccination. Cette étude menée en collaboration avec des collègues en Allemagne et aux Pays-Bas, décrypte le processus d’échappement associé à ces mutations.
Une concentration de mutations sur le site de liaison au récepteur, sur la protéine de pointe du virus.
Comment les variants préoccupants échappent à la réponse immunitaire ? ces variants, qui comprennent « B.1.1.7 » apparu au Royaume-Uni, « B.1.351 » en Afrique du Sud, « P.1 » au Brésil et « B.1.617 » en Inde semblent être plus infectieux que la souche originale de Wuhan et de récentes études ont montré que les réponses d'anticorps générées par une infection naturelle à la souche d'origine ou par la vaccination sont moins efficaces pour neutraliser ces souches. Il est donc urgent de comprendre comment ces variants parviennent à échapper à une grande partie de la réponse immunitaire.
Une concentration de mutations sur le site de liaison : grâce à des techniques de biologie structurale de pointe, l’équipe a pu cartographier à haute résolution comment les principales classes d'anticorps neutralisants se lient à la souche pandémique originale de SRAS-CoV-2 – et comment ce processus est perturbé par les mutations présentes dans ces variants détectés au Brésil, au Royaume-Uni, en Afrique du Sud et en Inde. Les scientifiques se sont principalement concentrés sur 3 mutations de la protéine de pointe du SRAS-CoV-2: K417N, E484K et N501Y. Seules ou en combinaison, ces mutations se retrouvent dans la plupart des variants et toutes ces mutations sont situées sur le site de liaison du récepteur SARS-CoV-2, où le virus se fixe aux cellules hôtes.
Les autres sites du domaine de liaison au récepteur ne sont pas affectés par les mutations.
Les anticorps ne parviennent plus à se lier au site de liaison : les chercheurs ont ensuite testé des anticorps représentatifs des principales classes qui ciblent la zone-même et l’environnement proche du site de liaison au récepteur. Ils constatent qu’une grande partie des anticorps perdent leur capacité à se lier et à neutraliser efficacement le virus lorsque ces mutations sont présentes. L’équipe a ensuite cartographié la partie pertinente du virus à une résolution à l'échelle atomique pour examiner comment les mutations affectent les sites où les anticorps se lieraient et neutraliseraient normalement le virus. Ils apportent enfin une explication structurelle de la raison pour laquelle les anticorps induits par les vaccins actuels anti-COVID-19 ou l'infection naturelle par la souche d'origine sont peu efficaces contre ces variants préoccupants.
Les implications de ces travaux rejoignent donc celles de l’équipe de la Penn : lors de la conception de vaccins de nouvelle génération et de thérapies par anticorps, l'accent devrait être mis davantage sur les autres sites vulnérables du virus qui ne sont pas affectés par les mutations présentes sur les variants préoccupants.
Se concentrer sur les points de vulnérabilité inchangés : ces résultats suggèrent que si les réponses des anticorps au site de liaison du récepteur du SRAS-CoV-2 peuvent être très puissantes pour neutraliser la souche originale de Wuhan, certaines variantes sont capables « d’échappement » nécessitant une mise à jour des vaccins. Alors que les mutations virales clés n'altèrent pas d'autres sites de vulnérabilité du virus, 2 autres zones en dehors du site de liaison au récepteur pourraient être des cibles privilégiées pour les anticorps. En ciblant ces 2 sites, les futurs vaccins et traitements à base d'anticorps pourraient apporter une protection plus large contre le SRAS-CoV-2 et ses variants.
Bientôt donc, de nouvelles stratégies de protection non seulement contre le SRAS-CoV-2 et ses variantes, mais aussi contre le SRAS-CoV-1 et d'autres coronavirus émergents. Bref, on avance rapidement vers un vaccin universel ou « pan-coronavirus ».
Source: Science 20 May 2021 DOI: 10.1126/science.abh1139 Structural and functional ramifications of antigenic drift in recent SARS-CoV-2 variants
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