Cibler cette enzyme clé qui contrôle un vaste réseau de protéines importantes dans la division et la croissance cellulaires ouvre la voie à une nouvelle classe de médicaments qui pourraient empêcher le développement du glioblastome. C’est ce que propose cette équipe de cancérologues du Princess Margaret Cancer Centre, du Hospital for Sick Children (SickKids) et de l'Université de Toronto : ils apportent ici, dans la revue Nature Communications, une première preuve preuve de concept : l'inhibition chimique in vitro de l'enzyme PRMT5 sur des lignées de cellules humaines de glioblastome parvient à stopper la croissance tumorale.
L'inhibition de l’enzyme PRMT5 conduit précisément à la sénescence cellulaire, un effet similaire à ce qui arrive aux cellules au cours du vieillissement lorsque celles-ci perdent la capacité de se diviser et de se développer. La sénescence cellulaire est déjà connue comme un puissant mécanisme de suppression possible des tumeurs, puisqu’elle stoppe la division incontrôlée des cellules cancéreuses.
Stopper une cascade biologique au niveau très précoce des cellules souches cancéreuses
L’auteur principal, le Dr Patty Sachamitr, de l’Université de Toronto avec ses collègues du Structural Genomics Consortium font partie de l'équipe Stand Up To Cancer Canada qui se concentre sur les tumeurs cérébrales, des cancers à très mauvais pronostic. Ainsi, la survie des patients atteints de glioblastome reste <10% à 5 ans et il n’existe que des thérapies très limitées pour ce cancer.
D’autres équipes avaient déjà suggéré que l’inhibition de PRMT5 peut être le moyen de cibler les tumeurs cérébrales, cependant c’est la première étude à tester cette stratégie in vitro sur des lignées de cellules dérivées de tumeurs de patients, précisément sur des cellules précurseurs, à l'origine de la croissance du glioblastome. L’équipe montre que l’inhibition de PRMT5 arrête une cascade de protéines impliquées dans la division et la croissance cellulaires. De plus, la technique permet de surmonter le défi de la variabilité génétique observée dans ces tumeurs : en ciblant les processus impliqués en amont de la croissance tumorale, les scientifiques évitent la difficulté posée par la variabilité tumorale individuelle de chaque patient qui peut constituer un obstacle au traitement.
De plus, dans le glioblastome, les cellules souches cancéreuses à l'origine de la tumeur pourraient jouer un rôle extrêmement important, en stimulant justement la croissance tumorale et la résistance au traitement. En ciblant ces cellules souches cancéreuses ou précurseurs, en plus des cellules tumorales matures, les chercheurs augmentent les chances de succès.
Ici, ce sont de petites molécules expérimentales conçues pour inhiber spécifiquement les enzymes cellulaires clés qui montrent leur efficacité à stopper la croissance de ces cellules tumorales cérébrales isolées des tumeurs des patients et cultivées en laboratoire de manière à préserver les propriétés uniques des cellules souches cancéreuses. Alors que la plupart des médicaments anticancéreux actuels n'éliminent pas les cellules souches cancéreuses, ces inhibiteurs constituent un grand espoir dans le traitement de ces cancers « difficiles ».
L’identification, au cours de la recherche, d’une signature moléculaire spécifique aux cellules tumorales qui répondent à l’inhibiteur pourrait conduire à des biomarqueurs tumoraux spécifiques, qui permettraient d’identifier les patients répondeurs à cette nouvelle classe de médicaments.
En dépit de son intervention très en amont, au niveau des cellules souches cancéreuses, le principe thérapeutique relève de la médecine de précision, soulignent les auteurs.
Source: Nature Communications 12 February 2021 DOI : 10.1038/s41467-021-21204-5 PRMT5 inhibition disrupts splicing and stemness in glioblastoma
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