Et si les affections oculaires dégénératives qui conduisent au glaucome, à la dystrophie cornéenne et à la cataracte pouvaient être détectées et traitées avant que la vision ne soit altérée ? Ces découvertes récentes de l’équipe Stowers Institute for Medical Research (Kansas City ) laissent espérer une nouvelle clé pour pouvoir réaliser cette hypothèse. Ces travaux menés chez la souris et présentés dans les Cell Reports, désignent le corps ciliaire comme un « joker » pour le développement de nouvelles thérapies permettant de prévenir la perte de la vision.
De précédentes études de la même équipe ont montré que des cellules souches de souris différenciées in vitro en cellules photoréceptrices sensibles à la lumière, puis transplantées chez des souris modèles de maladie dégénérative de la rétine, peuvent restaurer partiellement la vision. Cependant, les photorécepteurs transplantés ne survivent que 3 à 4 mois.
« Comprendre la cause de la maladie est nécessaire pour pouvoir la traiter »,
explique l’auteur principal, Ting Xie, chercheur au Stowers Institute for Medical Research : «Vous ne pouvez pas guérir la maladie d'un œil malade sans connaître les défis majeurs de la thérapie par cellules souches pour les maladies neurodégénératives ». L’équipe a donc d’abord étudié le micro-environnement des tissus oculaires, et en particulier un tissu spécialisé dans l'œil appelé « corps ciliaire ».
Le corps ciliaire est situé au bord postérieur de l'iris et est connu pour ses fonctions de maintien de la pression oculaire, de sécrétion de l'humeur aqueuse, le fluide clair entre le cristallin et la cornée. Le corps ciliaire exerce une fonction similaire chez la souris et chez l'Homme, et ses dysfonctionnements se manifestent de manière similaire chez la souris et l'œil humain. Jusqu’à récemment, le corps ciliaire était considéré comme une réserve de cellules souches rétiniennes, aujourd’hui ses fonctions biologiques sont reconnues comme multiples.
« Sans un corps ciliaire fonctionnel, l'œil dégénère ».
Une voie de signalisation majeure dans le corps ciliaire : cette voie de signalisation appelée « Notch » est une voie importante trouvée chez tout animal. Chez la souris adulte, des défauts de signalisation Notch provoquent une pression oculaire basse, un vitré rétréci et une dégénérescence oculaire. L'inactivation du facteur de transcription en aval RBPJ dans le corps ciliaire conduit également aux mêmes effets. Les chercheurs décrivent ainsi, pour la première fois en détails comment cette voie de signalisation Notch et d’autres (dont Nectin) dans le corps ciliaire permettent le développement et l’entretien du tissu et de la structure oculaires. Plusieurs des protéines identifiées par ces travaux s’avèrent essentielles pour maintenir la pression oculaire, pour guider la morphogenèse du corps ciliaire et réguler la sécrétion d’autres protéines telles que l'Opticin et les collagènes dans le corps vitré, qui apportent un soutien nutritif à la cornée, au cristallin et à la rétine.
Le corps ciliaire apparait ainsi comme une niche de cellules souches pour les tissus oculaires, de protéines et de signaux régulant la morphogenèse et la fonction cellulaires.
Il reste à préciser les facteurs protéiques sécrétés par le corps ciliaire essentiels pour le maintien de la cornée, du cristallin et de la rétine, respectivement. Certains de ces facteurs qui pourraient être directement impliqués dans les maladies oculaires constituent à coup sûr des cibles prometteuses pour de nouveaux traitements de prévention de la perte de vision.
Source: Cell Reports January 12, 2021 DOI: 10.1016/j.celrep.2020.108603 NOTCH Signaling Controls Ciliary Body Morphogenesis and Secretion by Directly Regulating Nectin Protein Expression
Plus sur le Glaucome
Laisser un commentaire