80% de la population mondiale est porteuse du virus de l’herpès simplex de type 1 (HSV-1) mais dans la plupart des cas, à l’état latent. Cette étude préclinique de scientifiques du Fred Hutchinson Cancer Research Center apporte, dans la revue Nature Communications, la première preuve de concept d’efficacité d’une nouvelle thérapie génique qui permettrait de guérir une infection qui touche des milliards de personnes.
L’infection à HSV-1 peut en effet commencer de manière anodine, par un léger picotement sur les lèvres par exemple, puis l’apparition d’un bouton de fièvre, puis d’une petite cloque douloureuse remplie du virus extrêmement contagieux. Et lorsqu'une personne contracte le virus, celui-ci reste dans son organisme à vie, et passe généralement inaperçu, mais dans certains cas, peut entraîner des récidives cutanées, voire chez les nouveau-nés ou les personnes immunodéprimées, une inflammation du cerveau ou des poumons.
La plupart des recherches sur l'herpès se sont jusque-là concentrées sur la suppression de la récidive des symptômes douloureux, mais ici l’approche vise à guérir et supprimer la maladie. Les chercheurs utilisent une technique d'édition du génome pour éliminer le HSV-1, également connu sous le nom d' « herpès oral ». Ils montrent, sur des animaux modèles, que la thérapie génique permet une diminution d’au moins 90% de la charge virale latente, ce qui, selon l'équipe, suffit à empêcher l'infection de se déclarer ou de récidiver.
Un double ciseau génétique : les scientifiques utilisent 2 ensembles de « ciseaux génétiques » pour couper et modifier l'ADN du virus, optimiser le ciblage de la thérapie vers les cellules infectées et sur les voies nerveuses qui relient le cou au visage et qui constituent des sites de réservoirs latents.
- Avec cette combinaison de 2 « ciseaux » ou ensembles de protéines (méganucléases) permettant d’opérer des « coupes géniques » ou de segments précis d'ADN, le virus de l’Herpès est trop endommagé pour être réparé ;
- ensuite, d'autres acteurs moléculaires interviennent pour éliminer ce qui reste du virus du corps cellulaire.
« C'est la première technique à pouvoir éliminer la plupart de l'herpès dans le corps», commente l’auteur principal, le Dr Keith Jerome, Pr au département Vaccins et maladies infectieuses au Fred Hutch. « Nous ciblons la cause de l'infection, les réservoirs de virus dormant qui sont les « graines » qui donnent naissance aux infections répétées ». Ici, les scientifiques évaluent la réduction de l'ADN du virus présent dans les ganglions cervicaux supérieurs à 92%. Ces réductions de réservoir viral se maintiennent un mois après le traitement au moins, ce qui suffit à empêcher le virus de se réactiver.
Les chercheurs travaillent déjà à une stratégie similaire pour éliminer l'herpès simplex 2, qui cause l'herpès génital. 3 années de recherche seront encore nécessaires avant de pouvoir passer aux essais cliniques, mais, d’ici quelques années, nous pourrions disposer « d’une approche curative pour l'infection à HSV orale et génitale ».
Source: Nature Communications 18 August 2020 Gene editing and elimination of latent herpes simplex virus in vivo
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