La technique, développée par ces scientifiques de Stanford et de Berkeley -au départ pour contrer le virus de la grippe-, s’appelle « PAC-MAN » (comme le jeu mais) pour Prophylactic Antiviral CRISPR in human cells. Comme c’est le principe dans l’outil d’édition du génome CRISP, PAC-MAN est composé d'une enzyme (Cas 13) et d'un brin d'ARN guide qui commande à cette enzyme de détruire des séquences nucléotidiques spécifiques dans le génome du coronavirus. En brouillant ainsi le code génétique du virus, PAC-MAN peut neutraliser le coronavirus et l'empêcher de se répliquer à l'intérieur des cellules hôtes. Ces travaux, présentés dans la revue Cell, ouvrent un tout nouveau paradigme pour lutter contre COVID-19 et les futurs virus pandémiques.
L’équipe de Stanley Qi, professeur de bio-ingénierie et de biologie chimique et des systèmes à l'Université de Stanford avait commencé à travailler sur la technique PAC-MAN pour lutter contre la grippe. En janvier, lors de l’émergence de la pandémie de COVID-19 s’est posé la question d'utiliser la même technologie mais contre le coronavirus. Mais le principal défi posé par cette utilisation de PAC-MAN comme thérapie anti-COVID-19 était de trouver un moyen efficace de délivrer la thérapie dans les cellules pulmonaires. C’est alors qu’intervient un autre chercheur, Michael Connolly, un bioingénieur du Berkeley Lab's Molecular Foundry, spécialiste des molécules synthétiques appelées lipitoïdes.
Délivrer une enzyme perturbatrice de code génétique au coronavirus pour l’empêcher de se répliquer
Les lipitoïdes sont un type de peptide synthétique ou peptoïde permettant la livraison d'ADN et d'ARN à une grande variété de lignées cellulaires. Depuis, les différentes équipes qui travaillent sur les lipitoïdes pour des applications thérapeutiques ont montré que ces peptides ne sont pas toxiques pour le corps et peuvent délivrer des nucléotides en les encapsulant dans de minuscules nanoparticules de seulement un milliardième de mètre de large, soit la taille d'un virus. L’idée est donc ici d’utiliser ces lipitoïdes et précisément un type de lipitoïde, Lipitoïde 1, capable de se plugguer avec l'ADN et l'ARN de cellules pulmonaires épithéliales humaines.
Ces travaux documentent l’efficacité de la thérapie in vitro : Les Lipitoïdes 1 parviennent à délivrer l’enzyme tueuse aux cellules pulmonaires en culture et les séquences nucléotidiques spécifiques dans le génome du coronavirus sont détruites, ce qui réduit in vitro de plus de 90% la concentration de SARS-CoV-2.
Prochaine étape, l’étude préclinique : l'équipe prévoit en effet de tester le système PAC-MAN / lipitoïde sur un modèle animal de SARS-CoV-2. Ils seront rejoints lors de cette étape par des collaborateurs de l'Université de New York et du Karolinska Institute de Stockholm.
« Une administration efficace de lipitoïdes, associée à un ciblage CRISPR, pourrait permettre une stratégie très puissante pour lutter contre les maladies virales, non seulement contre COVID-19, mais peut-être contre de nouvelles souches virales pandémiques ».
Source: Cell May 14, DOI : 10.1016/j.cell.2020.04.02 Development of CRISPR as an Antiviral Strategy toCombat SARS-CoV-2 and Influenza
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