Le lait maternel peut aider à prévenir la septicémie chez les prématurés, grâce à l’un de ses composés qui empêche les bactéries intestinales de pénétrer dans la circulation sanguine. Ces travaux d’une équipe de l'Université de Washington qui apportent un nouvel avantage de taille au recours au lait maternel chez le bébé prématuré et cela dès la naissance, viennent d’être publiés dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine.
Dans le monde, une personne meurt des suites des complications du sepsis toutes les 3-4 secondes. La septicémie (ou sepsis), une réponse inflammatoire généralisée associée à une infection grave est une cause majeure de décès maternel, du nouveau-né ou de patients atteints de plaies, dont les brûlures. Première cause de mortalité maternelle en France, la septicémie représente entre 2,3 et 4,8% des décès maternels, selon les régions. Chez le nouveau-né, ces bactériémies peuvent entraîner des complications graves pneumonie, méningite, septicémie avec une morbidité et également une mortalité importante. Il est donc primordial pour les professionnels de la périnatalité de pouvoir la détecter rapidement compte-tenu du risque de développement des sepsis sévères et de choc septique. Car la septicémie peut conduire à une défaillance systémique vitale.
Le lait maternel, la protection la plus efficace contre le risque de sepsis
« La septicémie d'apparition tardive est un problème majeur chez les bébés prématurés », rappelle l’auteur principal, le Dr Rodney D. Newberry, gastro-entérologue à l'Université de Washington et professeur de médecine. « Ces résultats nous donnent une meilleure compréhension de l'un des scénarii qui déclenche la septicémie et une nouvelle perspective pour lutter contre cette condition ». L’équipe s’est concentrée sur la septicémie d'apparition tardive, qui touche les bébés au moins 72 heures après la naissance et jusqu'à 60 jours après la naissance. La septicémie d’apparition tardive représente 26% de tous les décès chez les nourrissons nés prématurément. Environ 10% des nourrissons nés prématurés souffrent d'une septicémie tardive et 30% à 50% de ceux qui développent les infections meurent. Une grande partie de l'accent mis sur la prévention de la septicémie d'apparition tardive repose sur l'amélioration des protocoles aseptiques, telles que la garantie que la peau d'un bébé est exempte de bactéries et que les lignes intraveineuses et autres tubes ne contiennent pas de bactéries pouvant être mortelles.
Les coupables, les cellules caliciformes, des cellules intestinales, permettent aux bactéries de pénétrer dans le sang. Ces cellules sécrètent du mucus pour aider à empêcher les bactéries nocives de pénétrer dans l'intestin, mais elles chassent également les bactéries hors de l'intestin, à travers la muqueuse intestinale immature du prématuré. Ce scénario permet aux bactéries responsables de la septicémie d'accéder à la circulation sanguine. « Comprendre comment les bactéries se déplacent de l'intestin dans le sang apporte l'occasion de faire quelque chose contre ces infections ». Et l'étude suggère que le lait maternel, de préférence le lait maternel de la mère dès ses premiers jours d'allaitement, semble être un moyen très efficace pour repousser ces infections.
Du facteur de croissance épidermique dans le lait maternel : ici, les chercheurs de l’École de médecine de l'Université de Washington constatent que le lait maternel grâce à des niveaux plus élevés d’un facteur de croissance épidermique, en particulier dès les premiers jours de lactation après la naissance, est la protection la plus efficace contre les bactéries dangereuses et le risque de sepsis. La découverte est réalisée chez des souris nouveau-nées. L’étude montre qu'une molécule appelée facteur de croissance épidermique dans le lait maternel active les récepteurs des cellules intestinales pour empêcher les bactéries intestinales dangereuses de migrer dans la circulation sanguine, où ces microbes peuvent provoquer une septicémie : les chercheurs ont donné aux souris nouveau-nés une solution contenant des bactéries Escherichia coli isolées de la circulation sanguine d'un patient atteint de septicémie tardive peu après la naissance. Les bébés souris ont ensuite été nourris soit par leur propre mère, soit par une autre mère qui avait donné naissance plus tôt et dont, par conséquent, le lait maternel contenait des quantités plus faibles de facteur de croissance épidermique.
Les souris qui ont développé des infections du sang étaient celles nourries par des femelles qui allaitaient déjà depuis de plus longues périodes et avaient donc des niveaux plus faibles de facteur de croissance épidermique dans leur lait.
La conclusion de l’étude est claire, mais il y en a même 2 ! Utiliser le lait maternel pour nourrir les prématurés chaque fois que cela est possible mais peut-être aussi enrichir le lait maternel afin d'obtenir des concentrations plus élevées de facteur de croissance épidermique : il pourrait en effet, être possible d'ajouter un facteur de croissance épidermique au lait maternel ou aux préparations pour nourrissons.
Enfin, contrairement aux antibiotiques qui ont tendance à tuer les bactéries sans discernement, le lait maternel contenant des quantités plus élevées de facteur de croissance épidermique ne tue pas indifféremment les bactéries nocives ou bénéfiques dans l'intestin.
Bref, peut-être pas une option pour traiter l’infection, mais certainement une option pour la prévenir.
Source : Proceedings of National Academy of Science (PNAS) 16 March, 2020 DOI : 10.1073/pnas.1912022117 Maternal activation of the EGFR prevents translocation of gut-residing pathogenic Escherichia coli in a model of late-onset neonatal sepsis.
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