Vivre plus longtemps ou en meilleure santé, constituent deux objectifs généralement et simultanément souhaités, et poursuivis par de nombreuses équipes de recherche. Ces travaux de l’Université de Pittsburgh, menés chez le ver, suggèrent que les 2 voies biologiques impliquées dans la longévité et la santé pourraient être bien séparées. Des travaux certes expérimentaux, présentés dans la revue Nature Communications, qui concluent sur un plan évolutif à une allocation extrêmement serrée de nos ressources, tantôt à la reproduction et à la longévité, tantôt à la santé et à la résistance aux stress.
Aujourd’hui, il est « entendu » qu’une durée de vie prolongée ne vaut qu’à condition d’être en bonne santé. Les recherches sur le vieillissement indiquent ainsi qu'une meilleure santé – la qualité de vie en vieillissant – pourrait être plus importante que la durée de vie. Cette découverte génétique surprenante suggère pourtant l’existence de commutateurs moléculaires contrôlant séparément la durée de vie et la santé.
Longévité oui, mais en bonne santé
L’espérance de vie est définie par un ensemble de paramètres tels que la mobilité et la résistance immunitaire, distincts de la durée de vie, qui peut être facilement mesurée. Bien qu'il soit plus difficile d’évaluer l’espérance de vie à long terme, c’est peut-être la variable sur laquelle il serait préférable de « travailler » suggère l’auteur principal, Arjumand Ghazi, professeur agrégé de pédiatrie, de biologie du développement et de biologie cellulaire à la Pitt School of Medicine. L’auteur rappelle la destinée de la déesse Eos, tombée amoureuse d'un homme mortel, Tithon, qui lui a demandé la vie éternelle, en oubliant de lui demander la jeunesse éternelle : Tithon a donc vécu éternellement, mais comme un vieil homme fragile et immobile.
Ici, les scientifiques se concentrent sur une protéine appelée TCER-1, qui chez le ver Caenorhabditis elegans, favorise la longévité et est également essentiel à sa fertilité. Les gènes de longévité chez de nombreux animaux augmentent la résistance aux facteurs de stress, dont les infections, et les chercheurs s’attendaient donc à ce que la suppression de TCER-1 rende les vers moins résilients. À leur grande surprise, ils constatent le contraire : lorsque les vers sont infectés par des bactéries, ou soumis à des radiations nuisibles à l'ADN ou à des températures élevées,
- privés de TCER-1, ils survivent beaucoup plus longtemps que les vers normaux. Leur mobilité s’améliore même avec l’âge, ils sont moins sujets à l’agglutination de protéines toxiques responsable de maladies neurodégénératives.
- Inversement, l'augmentation des taux de TCER-1 au-delà de la normale supprime les défenses immunitaires de l'animal.
Un gène d’allocation de ressources : surpris, les chercheurs répètent les expériences et réalisent que le TCER-1 ne ressemble à aucun autre gène de longévité : TCER-1 semble ne pouvoir exercer son influence que tant que les animaux sont jeunes et capables de pondre des œufs ; durant la période de procréation, TCER-1 ajuste tous les cadrans moléculaires pour assurer la reproduction efficace et propager l'espèce, en partie en détournant les ressources destinées à la gestion du stress.
Quelles conclusions pour la santé humaine ? Il est certes trop tôt pour pouvoir généraliser ces conclusions à l’Homme, cependant cette découverte pourrait bien changer la façon dont nous comprenons la base moléculaire du vieillissement. Mieux comprendre comment le corps affecte ses ressources est très probablement la clé d’un vieillissement en meilleure santé.
« Par exemple, les femmes pourraient-elles un jour prendre une pilule une fois qu'elles ont décidé d'arrêter d'avoir des enfants, afin d’allouer toutes les ressources à leur résistance au stress et optimiser leurs chances de vieillir en bonne santé ? ».
Source: Nature Communications 17 July 2019 The longevity-promoting factor, TCER-1, widely represses stress resistance and innate immunity
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