Ce n’est pas la première étude à le suggérer chez l’animal, et ces conclusions devront être reproduites ou validées chez l'homme : ces chercheurs de l’Université de l'Illinois à Urbana-Champaign démontrent, chez les souris femelles, un effet « perte de fertilité » lié à l’exposition à certains phtalates dont le DEHP et le DiNP. Ces données, présentées dans la revue Toxicological Sciences, ajoutent ainsi à la preuve associant les phtalates (ou agents « plastifiants »), à plusieurs types d'anomalies de la reproduction.
Les phtalates, ajoutés au plastique permettent de les rendre plus souples et plus durables. On retrouve ces substances dans de nombreux produits de consommation, notamment dans des emballages pour aliments et boissons, dans des revêtements de sol, certains dispositifs médicaux et certains produits d’hygiène et cosmétiques. De nombreuses études ont déjà signalé différents risques pour la santé associés aux phtalates. Cependant, la plupart de ces études utilisait des doses très élevées qui ne reflètaient pas les niveaux d'exposition réels et les effets possibles sur la reproduction féminine. Cette nouvelle étude montre que l'administration par voie orale à des souris femelles pendant 10 jours de doses plus réalistes de phtalate diNP (phtalate de diisononyle), perturbe leurs cycles de reproduction et réduit leur capacité de reproduction jusqu’à 9 mois après l’exposition.
Dans l’étude, des souris femelles ont été nourries avec des solutions d'huile de maïs contenant des concentrations de DEHP (phtalate de di-2-éthylhexyle) ou de DiNP pertinentes, comprises entre 20 et 200 milligrammes par kilogramme de poids corporel. Ces doses sont bien comparables aux niveaux d'exposition auxquels les humains peuvent être exposées au cours de leurs activités quotidiennes et professionnelles. À la fin d’une période d'administration de 10 jours, les souris femelles traitées aux phtalates et les souris du groupe témoin sont appariées deux fois avec des partenaires mâles non traités à des fins de reproduction. L’expérience montre que :
- juste après la période d’administration, les utérus des souris traitées sont beaucoup moins développés que ceux des souris témoins ;
- 3 mois après l'administration, un tiers des souris traitées avec les doses les plus faibles de DEHP et de DiNP sont dans l’incapacité de concevoir après l'accouplement, alors que 95% des souris du groupe témoin sont gravides ;
- plus inquiétant, cette réduction drastique de fertilité perdure longtemps après la fin de l’exposition aux phtalates ;
- chez les souris exposées, la production et la signalisation des hormones stéroïdiennes s’avère perturbée ;
- 9 mois après l'administration, les cycles des souris traitées au DiNP sont toujours décalés, vs groupe témoin : le stade de développement des follicules ovariens est plus court. Les derniers stades du cycle, au cours desquels les ovaires produisent la progestérone sont plus longs. Selon l'étude, il existe une fenêtre de temps étroite où la muqueuse endométriale est réceptive à l'implantation et où les hormones stéroïdes doivent être bien régulées pour que la fécondation puisse s'accomplir normalement.
L’exposition aux phtalates réduirait cette fenêtre de fertilité à néant. Une autre explication possible pourrait être l’accélération, sous l’influence des phtalates, de la vie reproductive et du cycle de reproduction, avec une réduction conséquente de la fertilité.
Source: Toxicological Sciences 12 January 2019 DOI : 10.1093/toxsci/kfz013 Sub-Chronic Exposure to Di(2-ethylhexyl) Phthalate and Diisononyl Phthalate During Adulthood Has Immediate and Long-Term Reproductive Consequences in Female Mice
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